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La Papesse Jeanne

La Papesse Jeanne

Titel: La Papesse Jeanne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Donna Cross
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fille
que vous envoyâtes chercher, monseigneur. Celle que vous envisagez d’accueillir
à l’école épiscopale, me semble-t-il. Elle vous fut recommandée par le Gr...
    — Oui, oui,
je m’en souviens, fit l’évêque avec un geste d’impatience, reposant négligemment
le bras sur l’épaule de sa voisine.
    Son regard alla
de Jeanne à Jean.
    — Au nom du
ciel, je vois double !
    — Non,
monseigneur. Le chanoine d’Ingelheim vous confie également son fils. Le frère
et la sœur sont arrivés ensemble à l’auberge et refusent d’être séparés.
    — De mieux
en mieux, dit l’évêque, visiblement amusé. Que pensez-vous de cela, vous autres ?
J’en demande un, et on m’en ramène deux ! Si seulement l’empereur savait
se montrer aussi généreux envers son humble prélat !
    Toute la tablée éclata
de rire. Quelques « Amen » fusèrent.
    L’évêque se
pencha pour détacher la cuisse d’une poule rôtie, puis se tourna vers Jeanne.
    — Es-tu
aussi savante qu’on veut bien le dire ?
    Jeanne hésita.
    — Je... je
tâche d’étudier avec application, monseigneur.
    — Étudier,
la belle affaire ! lâcha l’évêque, en mordant dans la cuisse dégoulinante
de sauce. Mon école est pleine de nigauds qui passent leur temps à étudier,
mais ne savent rien. Que sais- tu , ma fille ?
    — Je sais
lire et écrire, monseigneur.
    — En langue
tudesque, ou en latin ?
    — En langue
tudesque, en latin, et en grec.
    — En grec ?
Voilà qui est intéressant ! Odo lui-même ne sait pas le grec, n’est-ce
pas, Odo ? lança l’évêque à un homme émacié, assis à quelque distance.
    L’intéressé
esquissa un sourire lugubre.
    — C’est une
langue païenne, messire, une langue d’idolâtres et d’hérétiques.
    — Très
juste, approuva l’évêque d’un ton malicieux. Odo a toujours raison, n’est-ce
pas, Odo ?
    Le clerc fit une
moue.
    — Vous savez
fort bien, monseigneur, que je n’approuve pas votre dernière lubie. Il me
paraît dangereux, pour ne pas dire sacrilège, d’admettre une femme à l’école.
    Une voix s’éleva
du fond de la salle, déclenchant une fois de plus l’hilarité générale :
    — Elle n’est
pas encore femme, ou je ne m’y connais plus !
    Jeanne sentit le
sang affluer à ses joues. Comment ces gens osaient-ils se comporter de la sorte
en présence de l’évêque ?
    — C’est
aussi une vaine entreprise, reprit Odo, haussant le ton. Les femmes sont, par
leur nature, entièrement incapables de raisonner. Leurs humeurs corporelles,
froides et humides, ne sont pas propices à l’activité cérébrale. Elles ne
peuvent donc pas comprendre les plus hautes idées spirituelles et morales.
    Jeanne posa un
regard incrédule sur l’homme qui venait de parler.
    — En effet,
j’ai déjà entendu exprimer cette opinion, dit l’évêque, un large sourire aux
lèvres. Mais dans ce cas, comment expliques-tu le savoir de cette fille  –
sa connaissance du grec, par exemple, que tu ignores toi-même ?
    — Pure
vanterie ! Nous n’avons nulle preuve de ses talents. Vous êtes trop
crédule, monseigneur. Peut-être le Grec a-t-il manqué d’honnêteté en vous
rapportant ses exploits.
    C’en était trop.
Non content de l’insulter, cet homme plein de haine osait s’attaquer à
Asclepios ! Jeanne était sur le point de répliquer lorsqu’elle croisa le
regard bienveillant d’un chevalier aux longs cheveux roux, assis près de l’évêque. Non , semblaient lui souffler ses yeux de saphir. Elle hésita, troublée.
Le chevalier se pencha vers l’évêque et lui glissa quelques mots à l’oreille.
Le prélat opina, puis s’adressa au clerc nommé Odo.
    — Soit.
Fais-lui donc subir l’examen.
    — Monseigneur ?
    — Interroge-la.
Vois si elle est digne de notre école.
    — Ici,
monseigneur ? L’endroit me paraît peu indiqué pour...
    — Ici même.
Ainsi, nous en profiterons tous.
    Le clerc fronça
les sourcils, puis tourna vers Jeanne son visage en lame de hache.
    — Quicunque
vult, lâcha-t-il. Signification ?
    Jeanne fut
surprise de la simplicité de la question. Peut-être cachait-elle un piège.
Peut-être cherchait-on à lui faire baisser sa garde.
    — C’est la
doctrine selon laquelle les trois parties de la Trinité sont consubstantielles,
répondit-elle avec prudence. Elle montre que le Christ est divin aussi
pleinement qu’il est humain.
    — L’origine
de cette doctrine ?
    — Le premier
concile

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