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La pierre et le sabre

La pierre et le sabre

Titel: La pierre et le sabre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eiji Yoshikawa
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ami !
Elle n’en avait pas besoin de beaucoup ; un seul qui la connût bien,
quelqu’un sur qui elle pût s’appuyer, quelqu’un de fort et de totalement digne
de confiance. Voilà ce qu’elle désirait si ardemment qu’elle ne savait plus à
qui se vouer.
    Bien sûr, il lui restait sa flûte ;
mais quand une jeune fille atteint l’âge de seize ans, il y a en elle des
questions et des incertitudes auxquelles un morceau de bambou ne peut répondre.
Elle avait besoin d’intimité ; il lui fallait prendre part à la vraie vie,
et non point seulement l’observer.
    — Tout cela est si révoltant !
dit-elle à voix haute, mais le fait d’exprimer ce qu’elle éprouvait ne
diminuait en rien sa haine envers Matahachi.
    Des larmes tombèrent sur la petite
table laquée ; le sang coléreux qui lui courait dans les veines bleuit ses
tempes, qui battirent.
    Derrière elle, la porte s’ouvrit
en silence. Dans la cuisine du temple brillait le feu pour le repas du soir.
    — Ha ha ! C’est donc ici
que tu te cachais ! Assise ici, à laisser la journée entière te couler
entre les doigts !
    La silhouette d’Osugi parut sur le
seuil. Arrachée à ses réflexions, Otsū eut un instant d’hésitation avant
de souhaiter la bienvenue à la vieille femme et de placer à terre un coussin où
elle pût s’asseoir. Sans demander la permission, Osugi s’installa.
    — Ma chère bru...
commença-t-elle avec emphase.
    — Oui, madame, répondit Otsū,
intimidée au point de s’incliner profondément devant la mégère.
    — Maintenant que tu as
reconnu cette parenté, il y a une petite chose dont je veux te parler. Mais d’abord,
apporte-moi du thé. Je viens de m’entretenir avec Takuan et le samouraï de Himeji,
et l’acolyte de ce temple ne nous a même pas servi de rafraîchissements. Je
meurs de soif !
    Otsū, obéissante, lui apporta
du thé.
    — ... Je veux parler de
Matahachi, dit la vieille sans préambule. Bien sûr, il serait fou de ma part de
croire à aucune des paroles de ce menteur de Takezō, mais il semble que
Matahachi soit vivant et séjourne dans une autre province.
    — Vraiment ? dit avec
froideur Otsū.
    — Je n’en ai pas la
certitude, mais un fait subsiste : le prêtre de ce temple, ton tuteur, a
donné son accord à ton mariage avec mon fils, et la famille Hon’iden t’a déjà
acceptée comme étant sa fiancée. Quoi qu’il arrive dans l’avenir, j’espère que
tu ne songes pas à revenir sur ta parole.
    — Mon Dieu...
    — Tu ne ferais jamais une
chose pareille, n’est-ce pas ?
    Otsū exhala un léger soupir.
    — ... Très bien, alors, j’en
suis fort aise !
    On eût dit qu’elle ajournait un
combat.
    — ... Tu sais comme les gens
bavardent ; impossible de leur dire quand Matahachi reviendra ;
aussi, je veux que tu quittes ce temple pour venir vivre avec moi. J’ai du
travail par-dessus la tête, et ma bru a tant à faire avec sa propre famille que
je ne puis la surcharger. Aussi ai-je besoin de ton aide.
    — Mais je...
    — Qui d’autre que la fiancée
de Matahachi pourrait entrer à la maison Hon’iden ?
    — Je l’ignore, mais...
    — Voudrais-tu dire par là que
tu ne souhaites pas venir ? La perspective d’habiter sous mon toit te
déplaît-elle ? La plupart des jeunes filles bondiraient sur l’occasion !
    — Non, ce n’est pas cela. C’est...
    — Eh bien, alors, cesse de
lambiner ! Prépare tes affaires !
    — Tout de suite ? Ne
vaudrait-il pas mieux attendre ?
    — Attendre quoi ?
    — Que... que Matahachi
revienne.
    — Absolument pas !
    Son ton était sans réplique.
    — ... Tu risquerais de te
mettre des idées en tête au sujet d’autres hommes. Il est de mon devoir de
veiller à ta bonne conduite. Je t’enseignerai aussi les travaux des champs, l’élevage
des vers à soie, à coudre un ourlet droit et à te comporter comme une dame.
    — Ah ! je... vois.
    Otsū n’avait pas la force de
protester. Ses tempes continuaient de battre, et tous ces propos concernant
Matahachi lui serraient le cœur. Elle redoutait, si elle ajoutait un seul mot,
d’éclater en sanglots.
    — Autre chose, dit Osugi.
    Insoucieuse de la détresse de la
jeune fille, elle dressa la tête avec arrogance.
    — ... Je ne suis pas encore
tout à fait sûre de ce que ce moine imprévisible se propose de faire de Takezō.
Cela me tracasse. Je veux que tu les surveilles de près tous les deux jusqu’à
ce que nous ayons la certitude

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