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La pique du jour

La pique du jour

Titel: La pique du jour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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jésuite !
    — Lequel est un homme, en effet, très docte…
    — Et très zélé, dit M. de La Surie.
    — Ha certes, très zélé, dit Rosny. Mais n’est-ce pas
tautologie et redite que d’affirmer que Varade est jésuite et zélé ? Mais je poursuis. Vous allez voir, de reste, à quels incrédibles
excès son zèle porta ledit jésuite. Car dès qu’il eut ouï Barrière lui exposer
son projet, il le loua chaleureusement d’envisager une action si belle et si
sainte, l’exhorta à rester ferme en son courage et pour ce, lui recommanda de
se confesser et de communier, l’assurant que s’il était pris et mis à mort, il
recevrait au ciel la couronne du martyre.
    — Ventre Saint-Antoine ! dis-je, envoyer un homme
à la communion pour l’engager à commettre un régicide ! Quelle perversion
horrible de la chrétienne religion !
    — Il est de fait, dit M. de La Surie,
que ce détail-là est si odieux qu’on hésite à le croire.
    — Il n’est pourtant pas possible de le décroire, dit
M. de Rosny. Il figure noir sur blanc dans les pièces du procès
criminel. Pasquier, De Thou et Condé l’y ont vu. Eh bien, Siorac,
poursuivit-il, vous vous accoisez ?
    — Monsieur, dis-je, c’est que je songe à ce que vous
avez dit au début de votre récit : à savoir que, depuis sa conversion, le
roi est devenu tuable. Comment l’entendez-vous ?
    — C’est que depuis sa conversion, il vole de victoire
en victoire et bat la Ligue et l’Espagnol chaque fois qu’il l’encontre, tant
est que rien ne pouvant arrêter l’irrésistible reconquête de son royaume, de
bons esprits ligueux commencent à dire…
    — Qu’il ne leur reste plus que le cotel, dit Miroul.
    — Vous croyez donc, dis-je, que les jésuites…
    — Les jésuites, dit M. de Rosny en levant le
sourcil, ou les carmes, ou les capucins, ou les jacobins ! Il y a, en ce
pays, tant de moines de tous poils, de tout ordre, et de toute bure ! Et
tant d’abbayes où même le roi ne peut mettre le pié sans la permission de
l’abbé.
    — Et comment, dis-je au bout d’un moment, se va définir
ma mission, les choses étant comme vous les décrivez ?
    — Cela dépend.
    — Cela dépend ? dis-je, étonné.
    — De qui la définit. Car je ne vous cèlerai pas plus
longtemps, mon cher Siorac, que le roi l’entend d’une certaine guise, et moi
d’une autre.
    — Eh bien, dis-je en souriant, avec tout le respect que
je dois au futur grand-maître de l’artillerie, peux-je connaître de prime les
intentions du roi ?
    — Vous dépêcher comme observateur à un procès qui est
pour se plaider devant le Parlement de Paris entre la Sorbonne et les curés de
la capitale d’une part, et les jésuites de l’autre.
    — Voilà qui est étrange ! La Sorbonne attaquer les
jésuites ! Elle qui fut si ligueuse !
    — Simple jaleuseté de boutique à boutique, dit Rosny
avec un sourire plein d’irrision. Les révérends docteurs de la Sorbonne
trouvent que les jésuites, par leur collège, leur robent trop d’élèves.
    — Et les curés ?
    — Que les jésuites leur robent trop de confessions et,
partant, trop de dons et de legs.
    — Et qu’attendent Sorbonne et curés de ce procès ?
    — Le bannissement des jésuites hors de France.
    — Amen, dis-je.
    — Voire !
    — Voire, Monsieur de Rosny ? Que dit le roi ?
    — Le roi est neutre.
    — Après le rôle joué par le jésuite Varade dans
l’attentement de Barrière, je l’eusse cru plus intéressé.
    — C’est que la chose, Siorac, n’est point si simple,
dit Rosny qui marqua bien à son ton qu’il n’avait pas appétit à en dire
davantage.
    — Si le roi, dis-je, est neutre, que vais-je faire en
Paris ?
    — Connaître plus précisément le déroulement de ce
procès.
    — Ceci, dis-je avec un sourire, est la mission à moi
baillée par le roi. Et la vôtre, Monsieur de Rosny ?
    — Connaître plus précisément les buts que se donnent
les jésuites.
    — Tâche énorme ! dis-je en écartant les bras, les
deux sourcils levés.
    — Mais circonscrite aux seules sûretés du roi.
    — Ha ! Monsieur ! dis-je comme effrayé,
comment l’entendez-vous ?
    — Comme je le dis. D’aucuns gens contrefeignent de
douter de la conversion du roi et prêchent toujours sa mort.
    — Mais pourquoi, pourquoi ? s’écria
M. de La Surie, si ému qu’il saillit de sa coutumière réserve.
    — Pour ce qu’ils savent bien que Henri

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