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La polka des bâtards

La polka des bâtards

Titel: La polka des bâtards Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Stephen Wright
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je
l’admets, elle n’est pas sous mes latitudes.
    — Capitaine, si je puis me permettre, l’interrompit
Maury qui s’impatientait. Mon majordome attend, et à cette heure les docks ne
sont pas sûrs.
    — Êtes-vous donc sourd, mon brave ? Je vous ai promis
la cabine, mais si vous osez encore m’interrompre vous allez devoir barboter à
la nage jusqu’aux Bahamas. Je vous livre un récit d’une immense portée sur
l’amour et ses tendres paradoxes. Comme je vous l’expliquais, au cours de mes
absences fréquentes et prolongées, ma chère Ellen a été présentée et a donné
son cœur à un autre, dont les absences, quoique nombreuses, n’étaient pas aussi
fréquentes ni aussi prolongées que les miennes. Un jeune capitaine de
cavalerie, m’informe-t-elle, qui, à l’heure qu’il est, picote les flancs de
l’armée de Grant à Petersburg comme un moucheron harcèle le cul d’un éléphant.
Je ne lui suis plus d’aucune utilité. Elle attend le retour de son héros.
    — Oui, oui, l’inconstance du cœur, proclama Maury de
toute son emphase. Un sujet éternel, oui, oui. L’obsession pitoyable de tout
écrivaillon à qui on a jamais confié une plume.
    — Je crois que je préférerais composer des odes sur le
sujet dans une thébaïde apaisée qu’en goûter les plaisirs singuliers dans ma
chair torturée. Mais foin de mes griefs ! ajouta brusquement Wallace en
agitant devant sa figure une main irritée comme pour chasser le susnommé
moucheron. Ma triste histoire est effectivement une vieille histoire,
certainement rejouée, à l’heure où nous parlons, par d’innombrables acteurs
dans d’innombrables foyers sur tout ce continent éclaté. Toutefois le
dénouement, regrettable pour moi, constitue pour vous une aubaine inespérée,
messieurs, et madame » – il fit une révérence en direction de Tempie.
« Dans cette rencontre, je sens la main du destin. Peut-être avez-vous été
guidés ici pour m’instruire de quelque affaire dont je suis encore
bienheureusement ignorant. Ou peut-être me porterez-vous chance, bénissant
cette traversée. À tout le moins, nous aurons le plaisir de votre compagnie, et
cela sera déjà une chance. Autant de questions intéressantes que nous aurons
amplement l’occasion d’approfondir. En attendant, nous embarquons dans l’heure.
Je veux que d’ici là vos personnes et vos biens soient solidement arrimés. Flynn ! »
cria-t-il, provoquant l’apparition immédiate sur le seuil d’un matelot
remarquablement jeune et remarquablement soigné, n’était l’ancre renversée
grossièrement tatouée sur sa joue gauche. « M. Flynn vous aidera à
monter vos bagages, et vous conduira dans vos quartiers. Vous constaterez que
la cabine est étroite mais acceptable. Bienvenue à bord du Cavalier », conclut-il
brusquement, serrant la main des deux hommes avant de gratifier Tempie d’une
nouvelle révérence appuyée. Puis, prenant sa main svelte et menue dans la
sienne, il y déposa un baiser galant et délicat.
    À l’heure dite, Monday relâcha les chevaux, Maury leva les
bras pour bénir comme un prophète fou les bêtes effrayées qui détalaient sur
les pavés sombres et s’écria : « Plaise à Dieu qu’ils puissent servir
la Cause, où que la Cause les rattrape ! », et, après avoir hissé les
livres, caisses, cages et autres effets de Maury sur le pont, dans des
coursives étroites rendues plus étroites encore par les balles de coton
empilées contre les cloisons, et jusqu’à une modeste cabine dont le caractère
confiné et oppressant était renforcé par une balle de coton pachydermique qui
occupait presque tout le plancher, les voyageurs exténués se retrouvèrent dans
l’obscurité totale, avec ordre strict du capitaine de ne pas dire un mot ni
faire un geste avant qu’on ne vienne les chercher. Les écoutilles avaient été
couvertes de toile goudronnée, les lanternes et les bougies éteintes, lorsque
le Cavalier s’éloigna doucement de la jetée : on n’entendait que le
bourdonnement sourd des moteurs, le clapotis discret et régulier des roues à
aubes, et leurs corps ne sentaient le mouvement qu’à une succession constante
d’ondes vibratoires. Comme s’ils étaient des figurines précieuses enfermées
dans un coffret de ténèbres et transportées en secret d’une cachette à une
autre. La chaleur était étouffante, la tension presque insoutenable. Ce fut
Maury qui craqua le premier.
    « Le baisemain

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