Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La polka des bâtards

La polka des bâtards

Titel: La polka des bâtards Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Stephen Wright
Vom Netzwerk:
blessures.
Il monta dans sa chambre tandis que la famille se réunissait au salon pour
discuter le cas du fils prodigue.
    « Je vous l’avais bien dit ! s’écria Tante
Aroline. Voilà des années que je vous mets en garde, tous les deux, mais personne
n’y a prêté attention. Je vous avais avertis que ce garçon manquait de
discipline, qu’il avait besoin d’une main pour le corriger, mais personne ne
m’a écoutée, personne ne s’est soucié de ce que pouvait dire cette pauvre
vieille Aroline.
    — Ce n’est pas vrai, rétorqua Thatcher. Tes
contributions à la conduite de cette maison sont accueillies avec gratitude et
respect, et je ne te laisserai pas dire des choses pareilles.
    — Tout ce que je demande, depuis toujours, c’est qu’on
montre un soupçon d’estime pour mon modeste apport au salut de cette maisonnée
si fragile. Dieu sait que nous avons eu notre part de conflits dans cette
famille, et franchement je ne sais pas si je supporterais d’en voir cette
branche précieuse éclater en mille échardes. » Elle extirpa de la poche de
son tablier un mouchoir à fleurs qu’elle serra très fort dans son poing en
contemplant la pièce d’un regard de détresse, défiant les autres d’oser la
faire pleurer.
    « Honnêtement, dit Roxana d’une voix durcie par
l’énervement, tu te comportes comme si c’était toi qui étais sur la sellette.
Ce n’est pas toi, le problème, Aroline, et j’apprécierais que tu cesses de te
mettre ainsi en avant.
    — J’ai le droit d’avoir un avis, autant que n’importe
qui d’autre dans cette pièce.
    — Naturellement, dit Thatcher, mais il me semble que
nous nous égarons, que nous nous éloignons de notre sujet.
    — Ce n’est pas moi qui me suis égarée, soutint Aroline.
    — Je n’ai jamais dit ça.
    — Elle semble avoir quelque difficulté à entendre
clairement ce que disent les autres, glissa Roxana.
    — Ça, je l’ai très bien entendu, aboya Aroline, et ça
ne me plaît pas du tout.
    — Ce n’est pas grave. Est-il vraiment nécessaire que tu
approuves le moindre mot prononcé sous ce toit ?
    — Pourrions-nous en revenir à Liberty ? » intervint
Thatcher.
    À l’abri du sofa où, mollement avachi, brandy et cigare à la
main, il écoutait avec un détachement amusé cette charmante discussion de
famille, Oncle Potter s’éclaircit la gorge, attendit d’obtenir l’attention de
tous et dit : « Confiez-moi ce garçon quelques jours. Je peux lui
offrir ce dont il a envie.
    — Quelle absurdité ! dit Aroline.
    — Je pensais faire une virée dans la grande ville,
poursuivit-il. Ce gamin a la bougeotte, comme son vieil oncle. Il va sûrement
apprécier la visite, s’en mettre plein les mirettes.
    — Je ne vous confierais pas cet enfant, même pour
l’emmener dans la cuisine, proclama Aroline.
    — Ce n’est plus tout à fait un enfant, lui rappela
Thatcher.
    — Enfant ou non, toute âme confiée à la garde de ce
dépravé verrait son salut mortellement compromis. »
    Thatcher dévisagea sa femme, qui était demeurée étrangement
silencieuse. « Qu’en penses-tu, ma chérie ?
    — Je fais confiance à Potter, répondit Roxana. Je
préfère le savoir en sa compagnie plutôt qu’à battre la campagne tout seul.
    — Excellent ! dit Potter en buvant une grande
rasade directement au goulot. Nous partirons dès demain matin.
    — Je t’en prie, Potter, supplia Roxana, veille bien sur
lui. Je ne voudrais pas…
    — Allons, allons, l’interrompit-il en agitant son
cigare d’un geste nonchalant. Je le garderai collé à moi comme s’il était mon
rejeton.
    — Dieu nous préserve ! » commenta Aroline.
    La mère et le père échangèrent un regard et, si elle parvint
à produire un sourire, ce sourire parut laborieusement tissé dans la plus
fragile des étoffes. Roxana avait toujours su que ce jour finirait par arriver,
mais pas si tôt. Néanmoins, elle s’était promis depuis longtemps d’être forte,
de ne pas protester, de ne pas pleurer. Elle était bien décidée à ce que jamais
le traumatisme de son propre départ ne se reproduise dans sa famille. Elle ne
supportait pas l’idée que son enfant puisse se sentir emprisonné entre les murs
du foyer. Et, si douloureuse que fût cette décision, elle se disait qu’accorder
à Liberty le droit de partir à sa guise garantissait qu’il reviendrait aussi à sa guise.
     
    New York. Un royaume de rêve où le bruit, la chaleur,

Weitere Kostenlose Bücher