Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La Poussière Des Corons

La Poussière Des Corons

Titel: La Poussière Des Corons Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie-Paul Armand
Vom Netzwerk:
point il m’aimait.

6
    CE même soir, j’ai raconté à ma mère ce qui s’était passé. Quand
je lui ai parlé de la proposition de ! Charles, j’ai vu des larmes dans
ses yeux :
    — Mon Dieu, le braye garçon !… Comme il t’aime,
Madeleine !
    Nous avons parlé, longuement. Ma mère, comme moi, éprouvait
envers Charles une reconnaissance infinie. Je me promis, une nouvelle fois, de
le rendre heureux, ce serait ma façon de le remercier.
    Dans mon lit, pour la première fois depuis bien des jours, l’inquiétude
me laissa en paix. Et l’insomnie, disparut, elle aussi. D’une façon que je n’aurais
jamais osé espérer, une solution s’offrait à mon problème. Je me sentais
apaisée, profondément soulagée.
    Le lendemain matin, Jeanne, la mère de Charles, vint nous
voir. Elle semblait affolée :
    — Charles vient de me parler, avant d’aller à la
mine. Si je m’attendais à ça ! Est-ce vrai, ce qu’il m’a dit, Madeleine ?
J’ai du mal à le croire !
    Le cœur serré, je demandai :
    — Qu’a-t-il dit, exactement ?
    — Eh bien, que… qu’il y a eu une fois où il a
perdu la tête… et que maintenant tu es enceinte, et qu’il doit réparer…
    Ainsi, même à ses parents, Charles n’avait pas confié mon
secret. Il avait dit ce qu’il m’avait promis : que l’enfant était de lui. Je
dis, gênée devant le regard douloureux et réprobateur de Jeanne :
    — Oui, c’est vrai, Jeanne…
    Sa bonté naturelle reprit le dessus, et elle me rassura :
    — Eh bien, il t’épousera. Il t’aime, c’est son
plus cher désir. Et moi, ajouta-t-elle avec un tremblement dans la voix, j’y
gagnerai une fille. Je n’aurais pas choisi pour Charles une autre fille que toi,
Madeleine.
    Nous avons parlé du mariage qu’il faudrait précipiter.
    — Bien sûr, dit Jeanne, les gens vont jaser. Mais
qu’y faire ?
    — Rien du tout, dit ma mère. De toute façon, ils
finiront bien par se calmer.
    J’ai vu dans son regard qu’elle pensait la même chose que
moi : qu’était-ce, un peu de cancans à affronter, à côté de ce qu’aurait
été ma vie sans l’intervention de Charles, avec l’étiquette de fille-mère à
porter comme une tare ?
    En fin d’après-midi, Charles vint, solennellement, faire sa
demande à ma mère. Elle le serra contre elle :
    — Merci, Charles, pour Madeleine, et pour l’enfant
qui va naître.
    Il sourit, ému :
    — Il ne faut pas me dire merci, Louise. Je ne
fais pas un sacrifice en épousant Madeleine. Je l’aime, je suis heureux de l’épouser.
    Je n’ai pu m’empêcher de demander :
    — Même dans les conditions actuelles, Charles ?
    Il me regarda gravement :
    — Oui, Madeleine, même ainsi. J’ai même de la
reconnaissance pour cet enfant que tu attends, car c’est surtout grâce à lui
que tu acceptes de m’épouser. Sans lui, probablement m’aurais-tu encore
repoussé…
    Je m’approchai de lui, et, timidement, l’embrassai sur la
joue. Je rougis lorsqu’il me prit dans ses bras et me serra contre lui. J’eus
même un geste pour me dégager. Je ne parvenais pas à penser à Charles autrement
que comme à un frère. Comprit-il mon geste de recul ? Il n’insista pas, et
me lâcha aussitôt.
    Lorsqu’il partit, je le reconduisis jusqu’à la porte. Il me
prit aux épaules. Avec appréhension, je levai les yeux vers lui. Il sourit
doucement, avec tendresse m’attira et m’embrassa sur les joues, comme un frère.
Mon soulagement ne lui échappa pas.
    — Bonsoir, Madeleine. Dors bien.
    — Bonsoir, Charles. À demain.
    Je rentrai chez moi, avec une pointe d’inquiétude au cœur :
que se passerait-il, lorsque Charles voudrait m’embrasser comme un fiancé ?
Et lorsque nous serions mariés ? Jusque-là, dans mon soulagement, je n’avais
pas pensé plus loin. Mais maintenant je m’inquiétais. Je ne savais même pas ce
qui se passait lorsqu’on était marié, et je n’osais pas en parler à ma mère. De
ces choses-là, on ne parlait pas. La seule expérience que j’avais, c’était un
souvenir désagréable et confus dans lequel une douleur déchirante me traversait.
Qu’exigerait Charles de moi ? À la pensée qu’il pourrait m’embrasser comme
l’avait fait Henri, tout mon être se raidissait. Je ne voulais pas embrasser
Charles de cette façon, je n’étais pas amoureuse de lui.
    Juliette vint me voir, dans la semaine. Je lui annonçai mon
prochain mariage avec Charles. Je lui racontai tout.

Weitere Kostenlose Bücher