La Prophétie des papes
lumière dâune lampe à huile fumante, Balbilus examina le pendentif.
Le symbole chi-rhô .
Les chrétiens !
Quâils soient damnés ! Puisse Néron massacrer les chrétiens jusquâau dernier, hommes, femmes et enfants. Quâils soient maudits pour lâéternité !
Une centaine de lémures étaient entassés dans le columbarium, luttant pour le moindre centimètre carré dâespace au sol.
Balbilus se tint sous sa fresque de signes astrologiques et exigea le silence. Un petit enfant pleurait. Il menaça de le tuer si quelquâun ne le faisait pas taire.
« Ãcoutez-moi, siffla-t-il. Nous nâavons quâune nuit à passer. Au matin, nous trouverons un abri ailleurs. Nous sommes plus forts quâeux. Nous sommes meilleurs quâeux. »
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Lâun des chrétiens avait vu Antonius sâenfuir en courant du mausolée. Il le trouva encore chaud et agité de soubresauts, se vidant de son sang. Rapidement, lâhomme courut retrouver Cornelius et Peter.
« Venez ! insista lâhomme. Il faut que vous voyiez ça ! »
Lorsquâils furent rassemblés autour du corps dâAntonius, lâhomme descendit la culotte du mort.
« Mon Dieu ! » sâécria Cornelius.
Pierre tendit le bras pour sâappuyer contre le tronc de lâarbre voisin.
Antonius avait une queue.
Lorsque les jeunes chrétiens retournèrent à la villa, leurs poings et leurs sandales tachés du sang de Vibius, ils trouvèrent Pierre à côté de lâarbre. Lâun dâeux avait un couteau dans une main â et autre chose dans lâautre. Il montra lâobjet à Pierre. Câétait une queue rose ensanglantée.
« Câest indéniable, dit Pierre, ébranlé. Ce ne sont pas des fantômes. Ces êtres existent bel et bien. Que devons-nous faire lorsque nous découvrons le véritable mal parmi nous, un mal qui ne peut être que lâÅuvre du diable ? demanda-t-il.
â Nous devons lâéliminer, dit Cornelius.
â Il nây a pas dâautre réponse », chuchota Pierre. Puis il haussa la voix. « Au nom du Christ tout-puissant, vous pouvez allumer la torche ; renvoyez ces démons en enfer. »
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Balbilus leva les yeux vers le plafond noir et entendit les cris étouffés des maraudeurs chrétiens et le bruit de leur course.
Les lémures étaient accroupis devant lui, serrés comme des poissons salés dans un tonneau : les hommes, stoïques, les femmes, en colère, les enfants, agités. Au-dessus de leurs têtes, les loculi creusés dans les murs étaient occupés par des urnes pleines de cendres et dâossements de leurs derniers ancêtres. La puissante odeur de pourriture leur emplissait le nez.
Soudain les cris étouffés au-dessus de leurs têtes cessèrent et tout devint silencieux.
Balbilus tendit lâoreille.
Il entendit la voix de Pierre, mais ne parvint pas à comprendre ses paroles.
Balbilus perçut un souffle puissant et un petit bruit sec tandis quâun incendie ravageur se répandait au-dessus et aspirait une partie de lâair contenu dans le mausolée. Il sentit sa peau frémir tandis que la température dans le caveau grimpait de minute en minute. Au bout dâun long moment, il entendit un grondement fracassant et le toit voûté sâécroula sur le sol du mausolée.
Il se passa encore un peu de temps et il vit les lampes à huile sâéteindre en crachotant, lâune après lâautre, par manque dâair. Lorsque la dernière expira, ils se retrouvèrent dans une obscurité totale.
Et dans ces ténèbres il entendit les halètements et respirations sifflantes dâune centaine dâhommes, de femmes et dâenfants.
Il fut le plus fort et le dernier à partir. Lorsquâil tomba à genoux dans le noir, serrant avec colère le pendentif chi-rhô si fort que sa main se mit à saigner, il eut un dernier sursaut et fut parcouru dâune colère si violente et si brûlante quâelle parut lui calciner le cerveau.
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Il faudrait des semaines pour que la terre de Rome soit fraîche sous le pied, mais Néron entreprit rapidement dâapporter du réconfort à ses sujets aux abois.
Ses soldats arrêtèrent tous les chrétiens qui
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