La Prophétie des papes
de Sabinus, le préfet de Rome, qui lui fit un compte rendu sommaire : la ville était à la merci des flammes. Lâincendie ne pouvait plus être contrôlé par la main de lâhomme. Ils passèrent la porte Esquiline, puis entrèrent dans les décombres fumants des jardins de Mécène, qui, encore quelques jours auparavant, étaient le plus bel endroit de Rome. Néron grimpa au sommet de la colline et monta sur la massive tour de Mécène pour avoir une meilleure vue sur sa ville en feu. De lâautre côté de la vallée, le Palatin et tous les anciens palais impériaux dâAuguste, Germanicus, Tibère et Caligula étaient en train de brûler. Le Forum avait disparu, la maison des Vestales, le temple de Vesta, la Regia, lâancienne demeure des rois de Rome, tout nâétait plus que cendres. Poussant un lourd soupir, Néron contempla les flammes qui venaient lécher les abords de la Domus Transitoria. Les cohortes prétoriennes et les esclaves de lâempereur avaient construit un pare-feu qui nâavait pas réussi à les arrêter.
« Je suis navré que votre palais soit en train de brûler », dit Tigellinus dâun air sombre.
Néron haussa les épaules.
« Il en sortira du bien. Dâici là , restons ici et regardons le feu. Il a une certaine beauté, ne trouves-tu pas ? »
Â
Le cinquième jour de lâincendie, Néron fit le tour de la ville, agissant comme un véritable empereur : dirigeant les pare-feu, organisant lâhébergement temporaire des réfugiés sur le Champ de Mars et faisant appel aux entrepôts de grains pour que la ville soit approvisionnée depuis Ostie. Néanmoins, malgré ses apparitions publiques, on entendait partout circuler des rumeurs selon lesquelles ses hommes de main et lui étaient responsables de ce sinistre et on lui en voulait de plus en plus dâavoir mis tant de temps à revenir à Rome.
Lorsquâil fut informé des bruits qui couraient, la réponse de Néron fut :
« Il faut combattre le feu avec le feu. »
Bientôt, tous les commandants de prétoriens et de vigiles reçurent lâordre de répandre, auprès des citoyens de Rome, lâinformation selon laquelle ils détenaient la preuve que des chrétiens pyromanes étaient responsables du désastre et se vengeaient ainsi des Romains qui avaient crucifié le Christ. Rapidement, des soldats patrouillèrent la ville, firent sortir les chrétiens de toutes les habitations et boutiques qui nâavaient pas brûlé et les exécutèrent sur place.
Le matin suivant, les vents étaient tombés et les feux cessèrent de progresser. Mais une nouvelle parvint à Néron qui le mit dans une rage folle. Alors quâil avait perdu sa Domus Transitoria et quâil allait devoir emménager dans une autre résidence temporaire, il apprit que la basilique Aemilia, la prunelle des yeux de Tigellinus, avait survécu aux flammes sans la moindre égratignure sur sa façade de marbre. On lui rapportait même que Tigellinus se vantait de sa bonne fortune.
Le subalterne de Néron sâen était mieux sorti que son empereur ! Sur ce, il envoya un message au domaine de Balbilus disant quâune action brutale mais juste sâimposait. Ce soir-là , un feu se déclara dans une jolie boutique de soieries et dâétoffes de lin au rez-de-chaussée du bâtiment de Tigellinus.
Il engloutit rapidement la totalité de lâédifice â et câest ainsi que démarra la seconde phase du grand incendie. Il monterait sur le Capitole et ravagerait les temples sacrés qui avaient échappé à la destruction. Le temple de Jupiter Stator serait perdu, ainsi que les temples de Luna et dâHercule, le théâtre de Taurus. En redescendant du Capitole, lâincendie franchirait le mur servien et réduirait en cendres de grands bâtiments publics sur le côté sud du Champ de Mars, où sâamassaient une foule de réfugiés. Sâil nây avait pas eu une surface occupée par des colonnades de pierre et si le vent sâétait maintenu, le feu aurait englouti le camp de réfugiés et aurait fait plusieurs milliers de victimes supplémentaires. Lorsquâil prit fin deux jours plus tard, seuls quatre des quatorze quartiers de Rome
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