La Prophétie des papes
avant quâElisabetta ait la possibilité dâactionner elle-même la poignée. Le professeur De Stefano lâattendait à lâentrée du public, une construction de plain-pied qui ressemblait à une simple villa méditerranéenne. à lâintérieur, De Stefano la fit passer devant le policier qui montait la garde près du portail en fer forgé des visiteurs. De là , ils descendirent un escalier de pierre jusque dans les entrailles de la terre.
« Cela fait un bout de trajet, dit-il. Câest à mi-parcours de Domitille. Et il nây a pas vraiment de raccourci. »
Elisabetta souleva le bas de son habit juste assez pour ne pas trébucher. Lâair du souterrain sentait la mort, une odeur familière.
« Je me souviens du chemin », répondit-elle.
Elle se sentit envahie par un mélange troublant dâappréhension et dâexcitation en se rappelant les visites quâelle avait effectuées ici, et elle se concentra sur ce quâelle allait découvrir.
Ils avancèrent rapidement dans les zones normales accessibles au public. Les galeries, creusées à la pioche et à la pelle dans le tuf volcanique meuble entre les II e et V e siècles après J.-C., étaient les sinistres vestiges dâun grand mouvement de lâhistoire. Les Romains avaient toujours enterré ou incinéré leurs morts dans des nécropoles situées à lâextérieur des murs de la ville parce quâil était strictement interdit de le faire à lâintérieur de la cité. Les riches bâtissaient des caveaux familiaux. Les pauvres étaient entassés dans des fosses communes.
Cependant, les premiers chrétiens refusaient obstinément de mêler leurs morts aux restes de païens et la plupart dâentre eux étaient trop pauvres pour sâoffrir de véritables tombes. Une solution fut trouvée sur les terres rurales de sympathisants de leur religion.
« Creusez vos nécropoles, sâentendirent-ils dire. Creusez autant que vous voulez, venez rendre visite à vos morts librement, mais laissez nos champs intacts. »
Câest ainsi que les catacombes se multiplièrent aux quatre points cardinaux en dehors des murailles de la ville, mais surtout vers le sud, de part et dâautre de la via Appia.
Au fur et à mesure des siècles, dâimmenses réseaux de galeries souterraines furent creusés pour accueillir les restes de papes et de martyrs, de roturiers et de riches. Les papes avaient droit à des voûtes couvertes de fresques compliquées et les pèlerins venaient les vénérer. Les pauvres avaient de petits loculi , rien de plus que des étagères de pierre creusées dans le roc où on étendait leur corps enveloppé dans un linceul. Leur nom était parfois inscrit dans la roche. Ceux qui les aimaient laissaient les symboles sacrés de leur nouvelle religion, le poisson, lâancre, la colombe et le monogramme chi-rhô . à mesure que le temps passait, les galeries se complexifièrent et devinrent des labyrinthes à plusieurs étages, comportant des kilomètres de tunnels pour accueillir les centaines de milliers de défunts croyants.
Bien que les premiers temps de lâhistoire de la chrétienté fussent troublés, le destin finit par favoriser la nouvelle religion lorsque, au IV e siècle après J.-C., lâempereur Constantin lui-même sây convertit, interdit la persécution des chrétiens et restitua à lâÃglise les biens qui lui avaient été confisqués. Progressivement, les restes des papes et des martyrs importants furent retirés des catacombes et enterrés dans des terres consacrées appartenant aux églises. Le sac de Rome par les Goths en 410 après J.-C. mit fin à lâutilisation des catacombes pour des enterrements, même si, pendant des siècles, les pèlerins continuèrent à y venir et les papes firent de leur mieux pour préserver et même embellir ces importants caveaux.
Mais leur conservation ne durerait pas éternellement. Au XI e siècle, on transférait de plus en plus de reliques vers les églises à lâintérieur des murs de la ville. Les catacombes étaient condamnées à disparaître peu à peu. Leurs entrées furent envahies par la végétation et elles se trouvèrent dissimulées,
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