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La règle de quatre

La règle de quatre

Titel: La règle de quatre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ian Caldwell
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moi.
    — Non. Qu’est-ce que je dois comprendre ?
    Je suis furieux contre lui. Furieux qu’il ait eu tant de mal à trouver quelques mots à dire à Charlie. Furieux qu’il ait eu si peur de venir le voir cet après-midi.
    — Tu étais là où tu avais envie d’être, dis-je.
    — Je suis venu aussitôt que j’ai su.
    — Tu n’étais pas avec nous.
    — Quand ? Ce matin ?
    — Tout le temps.
    — Bon sang, Tom…
    — Tu sais pourquoi il est ici ?
    — Parce qu’il a pris la mauvaise décision.
    — Parce qu’il a cherché à nous aider. Il ne voulait pas nous laisser seuls dans le bureau de Taft. Il ne voulait pas que Paul se blesse dans les tunnels.
    — Qu’est-ce que tu veux, Tom ? Des excuses ? Mea culpa. Je ne pourrai jamais rivaliser avec Charlie. Il est comme ça. Il a toujours été comme ça. Une âme de héros.
    — Non, c’est toi qui es comme ça. Tu sais ce que m’a dit sa mère, tout à l’heure ? La première chose dont elle m’a parlé ? Du battant de la cloche à Nassau Hall.
    Gil passe les doigts dans ses cheveux.
    — Elle me reproche de l’avoir entraîné là-dedans. Elle me l’a toujours reproché. Et tu sais pourquoi ?
    — Parce qu’elle pense que Charlie est un saint.
    — Parce qu’elle ne peut pas imaginer une seconde que tu sois capable de faire une chose pareille.
    — Et alors ?
    — Tu aurais pu faire ce que Charlie a fait. Tu l’as déjà fait.
    Il semble perplexe.
    — Le fameux soir de la cloche, il ne t’est pas venu à l’idée que j’avais bu quelques bières avant de tomber sur vous ? Et que je n’avais pas les idées très claires ?
    — Peut-être, aussi, étais-tu différent, à l’époque.
    — Oui, Tom. Peut-être.
    La neige forme de petites rides blanches sur le capot de la Saab. Les mots finissent par ressembler à un aveu.
    — Je m’excuse, dit-il.
    — De quoi ?
    — J’aurais dû aller voir Charlie plus tôt. Quand je vous ai croisés, Paul et toi.
    — Ça va. Ne t’en fais pas.
    — Je suis têtu. Depuis toujours.
    . Il insiste sur le « toujours », comme s’il voulait me dire : « Crois-moi, Tom, certaines choses n’ont pas changé. »
    Pourtant, tout a changé. En une semaine, un jour, une heure… Charlie, puis Paul. Et maintenant, Gil…
    — Je ne sais pas, dis-je.
    — Tu ne sais pas quoi ?
    — Ce que tu as fait pendant tout ce temps. Pourquoi tout est si différent. Je ne sais même pas ce que tu vas faire l’année prochaine.
    Il sort sa clef, déverrouille les portières.
    — Allons-y, avant de geler sur place.
    Nous sommes dans la neige, seuls sur le parking de l’hôpital. Le soleil s’est fondu dans l’horizon. L’obscurité gagne lentement sur le jour, jetant sur nous un voile de cendres.
    — Monte, conclut Gil. On va parler.

Chapitre 25
    Cette nuit-là, pour la première fois, et sans doute la dernière, je redécouvris Gil. Il se montra presque aussi charmant que dans mon souvenir : drôle, vif, ouvert. Pendant le retour à Dod Hall, nous parlâmes à bâtons rompus en écoutant Frank Sinatra. Avant que j’aie pu m’interroger sur ce que j’allais porter au bal, je trouvai, dans ma chambre, un smoking suspendu à un cintre, avec une note épinglée à la housse : Tom — s’il ne te va pas, c’est que tu as rétréci – G. En dépit de tout, il avait trouvé le temps d’apporter un de mes costumes à un loueur de smokings et de dégoter une tenue de soirée à ma taille.
    — Mon père me suggère de faire une pause, dit-il, répondant à ma question de tout à l’heure. Voyager un peu. Visiter l’Europe, l’Amérique du Sud…
    Renouer avec quelqu’un qu’on côtoie depuis longtemps réserve bien des surprises. Cela n’a rien de comparable avec ce que l’on ressent en revenant dans la maison où l’on a grandi pour découvrir que rien n’a changé, que les murs et les portes n’ont pas bougé. Non. Tout se passe plutôt comme si vous rentriez chez vous pour vous rendre compte que votre mère ou votre sœur ont évolué loin de vous, pour les voir pour la première fois avec les yeux d’un étranger, saisir à quel point vous les trouveriez belles si vous ne les connaissiez pas, déceler en elle cet attrait qui a tant frappé votre père ou votre beau-frère au premier jour de leur amour.
    — Honnêtement, précise Gil, je n’ai encore rien décidé. Je ne suis pas sûr que mon père soit de bon conseil. La Saab, c’était son idée et

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