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La reine du Yangzi

La reine du Yangzi

Titel: La reine du Yangzi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques Baudouin
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la première fois de ma vie.
     

 
     
     
     
     
     
     
    14.
     
     
     
    — Nous n’avons plus aucune raison de nous cacher, s’écrie Olympe.
    À peine Patrick est-il revenu à Shanghai qu’elle a décidé de l’inviter à déjeuner chez elle le dimanche suivant.
    — J’en ai assez de ne pas pouvoir vous rejoindre avant la nuit et de jouer à la veuve alors que je couche avec vous depuis des mois, ajoute-t-elle. Je veux pouvoir vous emmener dans ma chambre sans avoir à vous faire entrer par la fenêtre ! Surtout depuis que vous avez rasé cette horrible moustache. Ces cachotteries n’ont que trop duré.
    — J’espère que vos enfants ne s’en formaliseront pas, dit Patrick. Ils pourraient être choqués que nous assumions notre liaison au grand jour sans être mariés.
    — J’en doute : ils sont aussi peu conventionnels que leur père et moi.
     
    *
     
    Pour l’occasion, Mme Hu a préparé un repas typiquement shanghaien. Crabes de rivière à la chair délicate, poulet mariné dans l’alcool, poisson cuit à la vapeur, boulettes de porc. Elle veut faire honneur à l’invité d’Olympe comme si c’était elle-même qui recevait, a choisi dumeursault et du saint-julien, les vins préférés de sa maîtresse, et a sorti toute l’argenterie, les verres en cristal, les serviettes damassées brodées aux initiales d’Olympe, un O et un E entrelacés, et les rafraîchissoirs en argent.
    Olympe a passé une robe de percale du même bleu que ses yeux et retenu ses cheveux avec l’épingle à cheveux en or et écaille d’époque Ming que Marie-Thérèse Liu lui a offerte. Patrick n’a pas fait l’erreur de venir dans son uniforme de capitaine et a préféré passer un costume de lin grège et un gilet de soie lie-de-vin. Il a fait livrer un énorme bouquet de lis à Olympe et a apporté à Laure une boîte de pâtes de fruit, achetée chez le confiseur français qui vient d’ouvrir sur Nankin Road. Pour Louis, dont Olympe lui a expliqué le goût pour l’histoire chinoise, il a déniché les premiers tomes du Shiji , les Mémoires historiques de Sima Qian, chez un vieux libraire installé près de la Porte du Nord. Mais autant Laure s’est jetée à son cou pour l’embrasser, autant Louis est resté distant, le remerciant du bout des lèvres sans le regarder.
    À table, Olympe entretient la conversation avec Laure dans l’espoir que Louis commencera à montrer un peu d’empathie pour son amant mais sans succès, et elle recule de minute en minute le moment où elle leur annoncera qu’elle entame une nouvelle vie avec lui. « C’est idiot, se dit-elle, je suis plus intimidée par mon fils que par n’importe qui d’autre. Même Charles ne m’impressionnait pas autant, au début. Et ce garçon que j’ai fait, que j’ai porté dans mon ventre, qui me doit la vie, me paralyse... » Conscient de son embarras, Patrick se tourne vers Laure :
    — Et votre séjour à Hangzhou ? questionne-t-il. Ta mère m’a dit que vous étiez restés plus longtemps que prévu, ton frère et toi. Comment était la ville ?
    — Bien plus belle que la Shanghai chinoise, répond Laure. On voit que c’est l’ancienne capitale des Song. Il ya des canaux partout et, quand on se promène le long du fleuve, on a l’impression d’être revenu aux premiers temps de l’empire.
    — Il y a surtout moins de miséreux qu’ici, interrompt Louis d’une voix sèche. Et aucun Européen !
    — Et c’est mieux ? questionne Patrick.
    — Ah ça, oui ! Au moins les Chinois de là-bas sont chez eux et ne sont pas obligés de s’aplatir devant les Blancs pour avoir le droit de manger.
    — Tu dis des bêtises, intervient Olympe, je ne les ai jamais vus s’aplatir devant nous. Ils font le kowtow uniquement devant le Taotai ou les fonctionnaires impériaux. Les Blancs ne leur ont jamais demandé de se prosterner à leurs pieds !
    — Cela ne les empêche pas de les faire trimer comme des bêtes, poursuit Louis.
    Gênée, elle aussi, par la mauvaise humeur de son frère, Laure revient sur leur séjour à Hangzhou.
    — Et Marc a été un grand guide, dit-elle. C’est un artiste. Il nous a emmenés un soir sur le lac de l’Ouest pour nous réciter de vieux poèmes, juste au moment où la lune se levait. C’était magique.
    — Patrick a promis, lui aussi, de me dire un poème irlandais, la prochaine nuit de pleine lune, plaisante Olympe pour détendre l’atmosphère.
    Surpris, Patrick s’apprête à

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