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La reine du Yangzi

La reine du Yangzi

Titel: La reine du Yangzi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques Baudouin
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pour l’embrasser, c’est elle qui, après lui avoir rendu passionnément son baiser, lui a proposé de le revoir dès le lendemain.
    Depuis, Louis et Deborah se retrouvent dès que possible. Quand ils s’octroient un après-midi de liberté, ils abritent leurs amours dans le house-boat de Louis amarré le long du canal du Yangjingbang où elle le rejointdiscrètement. À peine réunis, ils s’enferment dans la chambre et chavirent dans une étreinte passionnée. Elle a trente ans, lui bientôt vingt-six, ils partagent le même goût ardent de la chair et s’aiment sans se faire d’illusions sur des lendemains possibles.
    — Je ne divorcerai jamais de mon mari, autant que tu le saches, lui a-t-elle annoncé dès leur deuxième rencontre.
    — Je ne te l’aurais pas demandé, a-t-il répliqué.
    — Tu es mon jardin secret, mon amant français qui me permet de supporter mon époux et cette vie sans histoire, mais c’est tout, tu comprends ?
    — Rien de plus ?
    — Rien de plus. De la passion, de la tendresse, du désir, oui, mais pas d’amour. C’est le prix à payer pour m’avoir.
    Un peu déconcerté par cette condition sine qua non , Louis s’est dit qu’après tout, cet ukase était ce qu’il pouvait espérer de mieux. Il n’avait ni le temps ni l’envie pour le moment de s’encombrer d’une femme et de fonder une famille, et la liaison purement utilitaire proposée par l’Américaine convenait parfaitement à ses besoins. Quand il la regarde comme maintenant en train de choisir de ses baguettes le morceau qu’elle va délicatement porter à sa bouche puis de boire une gorgée de meursault, il sait qu’un seul mot d’elle suffirait pour qu’il tombe vraiment amoureux. Mais pourquoi gâcher par les sentiments, nécessairement volatils, une relation hédoniste où chacun d’eux trouve son compte ? Parfois, Deborah vient retrouver Louis dans son bureau du quai de France, à l’heure où les employés vont déjeuner à la cantine qu’il a fait installer au sous-sol, et ils s’aiment avec d’autant plus de fougue que le temps leur est compté et qu’ils peuvent être surpris à tout moment.
    —Tu as l’air particulièrement de bonne humeur, constate Deborah de sa voix sensuelle de mezzo en reposant son verre.
    — J’ai réalisé une belle opération ce matin, répond Louis. Je viens de racheter une petite usine métallurgique à un Hollandais qui rentre au pays. Et encore une fois, j’ai coiffé les plus gros au poteau.
    — Tu vas faire des jaloux, Louis, si tu continues à investir à tour de bras. La Compagnie du Yangzi fait de plus en plus d’ombre aux grandes compagnies anglaises et américaines.
    — C’est ce qu’on dit ou ce que toi tu penses ?
    — C’est ce qu’on dit quand on parle de ta réussite. Elle est saluée, on apprécie ton caractère entreprenant, mais j’ai plusieurs fois surpris des commentaires peu amènes sur ton activisme financier. J’ai même entendu parler de boulimie. Tu devrais te retenir de trop marcher sur les plates-bandes de nos grands tycoons. Ce sont des fauves et ils deviennent féroces quand un étranger vient chasser sur leurs territoires.
    — Je le sais. Je ne les aime pas. Ils sont si cupides qu’ils en oublient toute humanité. Pourquoi crois-tu qu’ils médisent sur mon compte ? Parce qu’ils réprouvent la façon, trop douce m’ont-ils affirmé, dont je traite mes employés chinois ! Selon eux, je les paierais trop et leur accorderais trop d’avantages. Et, à cause de moi, les ouvriers commenceraient à avoir des idées dangereuses !
    — Et c’est vrai ? questionne Deborah.
    — Ce n’est pas faux, je l’avoue. J’estime qu’on a trop exploité ces pauvres gens et que leur offrir des salaires corrects et des conditions de travail convenables est du devoir d’un patron. Les choses doivent changer dans ce pays si l’on veut y rester. Sinon, tôt ou tard, les Chinois se révolteront et ils nous chasseront après nous avoir tout pris.
    —Ils sont trop attardés pour y parvenir et toi, tu me donnes l’impression de jouer un peu trop avec le feu. Je me trompe ? demande Deborah.
    Il rit, prend sa main et l’entraîne à nouveau vers l’alcôve. 
    — Non. Surtout quand c’est avec toi !
     
    *
     
    Le grand mérite de ces après-midi libertins est de lui laisser l’esprit particulièrement clair. Comme si assouvir ses désirs et se laisser aller aux embrasements offerts par Deborah lui procuraient, au-delà

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