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La Révolution et la Guerre d’Espagne

La Révolution et la Guerre d’Espagne

Titel: La Révolution et la Guerre d’Espagne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Broué , Emile Témime
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repartent
les mains vides [242] .
Rien ne doit être fait qui puisse constituer une menace pour les intérêts
anglais ou français. Franco a beau jeu, pour assurer ses arrières marocains, d’y
autoriser les journaux et les réunions interdites au Maroc français par le
gouvernement Léon Blum, l’ « allié » potentiel du Front
populaire espagnol. Le gouvernement Largo Caballero ira plus loin, proposant à
Londres et Paris des concessions territoriales au Maroc [243] . Le désir de ne
pas mécontenter les puissances occidentales le conduit ici à renoncer
délibérément, non seulement au principe de l’autodétermination des peuples
coloniaux, mais encore à une chance réelle de frapper Franco au cœur de sa
puissance. L’arrêt de la révolution, ici, a une influence directe sur la conduite
de la guerre. La volonté de respecter les accords internationaux depuis le
traité d’Algésiras, derrière laquelle se retranche le ministre des Affaires
étrangères, Alvarez del Vayo, prive l’armée populaire de l’instrument
révolutionnaire du défaitisme dans l’armée ennemie que lui aurait fourni l’alliance
de la révolution espagnole avec le nationalisme, nord-africain et qu’elle avait
su si bien utiliser contre l’intervention italienne.
Les rapports avec l’U.R.S.S.
    L’isolement de la République, le soutien matériel de l’U.R.S.S.
ont donné un caractère particulier à l’action en Espagne des diplomates russes.
Rosenberg et Antonov Ovseenko sortent immédiatement du rôle traditionnellement
dévolu aux ambassadeurs et consuls. Ils ont des contacts et des discussions
quotidiens avec hommes politiques et chefs militaires espagnols, interviennent
dans la presse, prennent la parole dans des meetings publics pour y défendre la
politique de leur gouvernement et apporter leur soutien à celui de l’Espagne [244] . Le gouvernement
de l’U.R.S.S. conçoit son alliance avec l’Espagne sous une forme entièrement
nouvelle, exempte de tout souci formaliste.
    C’est Luis Araquistain qui, le premier, a rendu publique une
lettre de Staline, Vorochilov et Molotov, remise par Rosenberg en décembre 1936
à Largo Caballero [245] .
Les dirigeants russes demandent au chef du gouvernement espagnol s’il est
satisfait de l’action des « camarades conseillers militaires », se
préoccupent de savoir s’ils ne sortent pas de leur tâche de conseillers, le
prient de donner son opinion « directe et sans ambages » sur le
« camarade Rosenberg ». L’intérêt du document réside surtout dans les
« conseils d’amis » donnés par le gouvernement russe au gouvernement
espagnol. Il faut, selon lui, tenir compte des paysans et se les attacher par «
quelques décrets, ayant trait à la question agraire et aux impôts »,
gagner l’appui ou, au moins, la bienveillante neutralité de la petite et
moyenne bourgeoisie en les protégeant contre les confiscations et « en leur
assurant, dans toute la mesure du possible, la liberté du commerce », attirer
au gouvernement les amis d’Azaña « pour empêcher les ennemis de l’Espagne
de la considérer comme une République communiste, ce qui constitue le pire
danger pour l’Espagne », déclarer enfin solennellement que le gouvernement « ne
tolérera pas que soit porté atteinte à la propriété et aux intérêts légitimes
des étrangers établis en Espagne et citoyens des pays qui ne soutiennent pas
les rebelles ».
    Largo Caballero, le 12 janvier, répond brièvement. Relevant
dans la note russe une phrase sur « l’action parlementaire, moyen d’action
peut-être plus efficace en Espagne qu’en Russie », il précise sèchement
que « l’institution parlementaire n’a pas, même parmi les simples
républicains, d’enthousiastes défenseurs ». Il assure par ailleurs que les
conseillers russes « accomplissent leur mission avec un véritable
enthousiasme et un extraordinaire courage ». Quant à Rosenberg,
« tout le monde l’aime ». Largo Caballero remercie les dirigeants
russes de leurs conseils, souligne que la politique qu’ils lui suggèrent est en
réalité la sienne. Il est vrai qu’il n’y a pas, à cette date, de divergence
essentielle sur la politique générale entre Moscou et Valence. Le ton de la
réponse de Largo Caballero traduit cependant un certain mécontentement :
les « conseils » de Staline sont peut-être justes, mais le fait qu’ils
aient pu être donnés dénote une certaine insuffisance

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