La Révolution et la Guerre d’Espagne
de l’étranger qui fourmillent dans les milieux politiques, laisse
entendre que les républicains rêvent d’un compromis avec Franco qu’imposerait
une médiation occidentale. Carlos Espla renonce à son voyage.
La contre-attaque de Largo Caballero intimide les opposants,
mais achète de lui aliéner les dernières sympathies. Républicains, socialistes
de droite et communistes lui cherchent un successeur. On parle de Prieto,
Martinez Barrio, Negrin. Le Temps écrit le 23 mars : « Un
ministère présidé par exemple par M. Negrin, l’actuel ministre des Finances (M . Prieto, grand animateur de la combinaison restant discrètement au second
plan), pourrait peut-être se prêter à une médiation et offrir à l’Espagne
républicaine une porte de sortie préférable à une lutte sans espoir. »
Le conflit entre la C.N.T. et le P.C.
La chute de Malaga a aussi pour conséquence un regain d’hostilité
entre le P.C. et la C.N.T. D’accord pour dénoncer la « trahison » et
faire d’Asensio le bouc émissaire de la défaite, anarchistes et communistes s’accusent
réciproquement d’avoir été les instruments de la trahison. Pour les communistes,
les anarchistes de Malaga ont « joué à la révolution », multiplié les
Comités, facteur d’indiscipline et d’irresponsabilité. Selon les anarchistes,
le prosélytisme du P.C. a semé la division dans le front antifasciste et
favorisé la mainmise des officiers traîtres. L’arrestation de Francisco Maroto,
militant connu et chef de colonne de la C.N.T., sur l’ordre du gouverneur d’Almeria,
met le feu aux poudres. En même temps, les socialistes dénoncent, dans un
retentissant manifeste, l’activité des « tchékas » anarchistes,
publiant une liste impressionnante de militants socialistes assassinés dans la
région du Centre. La presse de la C.N.T. rétorque en dénonçant l’assassinat de
plusieurs de ses militants, en Castille, par des troupes communistes. Le gouvernement
tente d’apaiser les esprits, suspend les journaux de la C.N.T. et de la F.A.I.
qui ont publié ces attaques, mais fait mettre Maroto en liberté provisoire [255] .
Pourtant l’affaire des « tchékas » ne fait que
commencer. Le journal C. N. T. publie des accusations précises de
Melchior Rodriguez, délégué des prisons, contre José Cazorla, conseiller à l’ordre
public de la Junte de Madrid. Selon lui, le P.C. possède toujours à Madrid des
prisons privées dans lesquelles sont interrogés, torturés et parfois abattus
des militants de la C.N.T. arrêtés sans mandat régulier par des policiers
communistes, ainsi que d’anciens détenus des prisons d’État, acquittés par les
tribunaux populaires, mais aussitôt enlevés par les policiers aux ordres de
Cazorla.
L’enquête ouverte par la Sûreté aboutit à la découverte,
dans l’entourage de Cazorla, d’un véritable gang se faisant payer à prix d’or
la libération de prisonniers régulièrement poursuivis. C. N. T., le 14
avril, titre : « Cazorla est un provocateur au service du fascisme »,
et exige sa destitution. La Junte, pressée de tous côtés, annonce à son tour
une enquête. Le scandale est énorme : Largo Caballero saisit l’occasion de
se débarrasser de la Junte, qu’il dissout le 23 avril. Madrid aura, désormais,
un Conseil municipal [256] .
Caballero contre le Parti Communiste
La dissolution de la Junte est une victoire de l’État
restauré, et une revanche de Largo Caballero. Elle lui redonne l’initiative. Le
même jour, El Socialista de Madrid et Castilla Libre dénoncent le
« scandale de Murcie » : dans des prisons privées aux mains du
P.C., des militants socialistes sont détenus et torturés. Le gouvernement
révoque le gouverneur civil, complice de cette activité clandestine, fait
arrêter et juger quatre policiers communistes compromis. Puis il s’attaque à l’autre
bastion du parti communiste, l’Armée. Largo Caballero restreint les pouvoirs
des commissaires politiques et se réserve personnellement le droit de les
désigner. De nombreux commissaires doivent abandonner leurs fonctions. C’est
une véritable déclaration de guerre au P.C., que les communistes prennent comme
telle. Ils entament alors contre Largo Caballero une campagne dont la presse ne
donne jamais qu’un écho déformé. Ils en font le responsable de tous les revers
militaires. Pour eux, il se conduit en « patron » et en
« cacique », veut tout contrôler alors qu’il
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