La Révolution et la Guerre d’Espagne
troupes de plus
en plus nombreuses. Les Jeunesses libertaires catalanes avaient en septembre
signé avec la J.S.U. un pacte d’unité d’action. Mais dans leur organe, Ruta ,elles prennent des positions révolutionnaires. Un manifeste du 1 er avril dresse contre le gouvernement Caballero un véritable réquisitoire [264] . Les jeunes
libertaires catalans dénoncent la coalition des communistes et des républicains
comme le reflet en Espagne de l’alliance de l’U.R.S.S. avec la France et l’Angleterre
en vue d’ « étrangler la révolution ».
On comprend que les mots d’ordre de la J.C.I. rencontrent
dans leurs rangs un écho favorable. Le 14 février, plus de 50 000 jeunes
assistent à Barcelone à un meeting pour la constitution en Catalogne du « Front
de la jeunesse révolutionnaire ». Y prennent la parole, successivement,
Fidel Mire, secrétaire des Jeunesses libertaires, Solano, secrétaire général de
la J.C.I., et le jeune libertaire Alfredo Martinez, secrétaire du
« Front » de Catalogne. Le mouvement s’étend rapidement à d’autres
provinces : à Madrid [265] et au Levante, Jeunesses libertaires et J.C.I. organisent campagnes et meetings
communs.
La jeunesse ouvrière se divise en deux camps. D’un côté, à l’appel
de la J.S.U. se constitue l’ « Alliance de la jeunesse antifasciste », dont
Santiago Carrillo voudrait qu’elle soit « l’unité avec les Jeunes
républicains, avec les jeunes anarchistes, avec les jeunes catholiques qui
luttent pour la liberté... pour la démocratie et contre le fascisme et pour l’indépendance
de la patrie contre l’invasion étrangère », mais qui se réduit à une
alliance entre la J.S.U. et les jeunesses de partis républicains. De l’autre,
dans le Front de la jeunesse révolutionnaire, se groupent les révolutionnaires
de la J.C.I. et des J.L. Or, les jeunes ont été à l’avant-garde du mouvement
révolutionnaire et de la lutte armée, Ils occupent, sinon dans partis et
syndicats, du moins dans les forces armées une place importante. En dehors de
la Catalogne, c’est la J.S.U. qui a regroupé et enrôlé derrière le P.C. la plus
grande partie de la « jeune garde » militante. Nombre de ses
militants, surtout les anciens de la Jeunesse socialiste, refusent de
participer à l’Alliance, qu’ils jugent modérantiste, et affirment leurs
objectifs révolutionnaires. Dès le lendemain de la Conférence de Valence, les
protestations s’élèvent dans la J.S.U. contre la « nouvelle ligne », la
« politique d’absorption et de confusionnisme », « l’abandon des
principes marxistes » [266] .
Le 30 mars le secrétaire de la fédération des Asturies, Rafaël Fernandez
démissionne du Comité national de la J.S.U. Sa fédération rejette la ligne de
Carrillo, dénonce le manque d’esprit démocratique dans l’organisation, signe
avec les Jeunesses libertaires asturiennes un pacte pour la Constitution d’un
Front de la jeunesse révolutionnaire [267] .
Quelques jours après, c’est le secrétaire de la puissante fédération du Levante,
José Gregori, qui démissionne à son tour du Comité national, soutenu, lui
aussi, par sa fédération. Santiago Carrillo, dans Ahora, accuse les
opposants de s’inspirer des trotskystes, de Franco et de Hitler. Le mouvement
continue pourtant et, même en Catalogne, des groupes locaux adhèrent au Front
révolutionnaire... La Crise ainsi ouverte dans la J.S.U. risque de mettre en
question l’influence conquise par le P.C. sur une fraction importante de la
jeunesse.
Une situation explosive
Ainsi, au printemps de 1937 se trouvent de nouveau réunies
les conditions d’une poussée révolutionnaire. Les thèmes de l’opposition
révolutionnaire rencontrent au moins en Catalogne, un écho grandissant parmi
les travailleurs qui suivent la C.N.T. et voient leurs « conquêtes »
remises en question. Dans l’U.G.T., l’armée, l’administration, les partisans de
Largo Caballero réagissent contre les communistes. Les difficultés économiques,
les scandales des « tchékas » offrent à l’agitation un terrain favorable.
L’aile modérée de la coalition gouvernementale s’en
inquiète. A la pression extérieure pour l’arrêt de la révolution est venue s’ajouter,
au cours des derniers mois celle de la petite bourgeoisie qui se remet des
coups de la terreur initiale et voudrait voir liquider définitivement les
vestiges révolutionnaires. Au Levante et en Catalogne, les
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