La Révolution et la Guerre d’Espagne
au sud et de
livrer la bataille dans le Levant, où les trois corps d’armée atteignent la
Méditerranée. Au quartier général franquiste on se pose la question de savoir s’il
convient de faire un nouvel effort contre la Catalogne que tiennent des troupes
très éprouvées ou s’il faut rechercher l’écrasement de l’adversaire en
attaquant l’armée de manœuvre républicaine dont les lignes se sont
dangereusement étirées. C’est la deuxième solution qui est choisie.
C’est en réalité l’opération la plus difficile : la
zone montagneuse du Maeztrazgo à la mer, les escarpements de la Sierra de
Javalambre qui s’élèvent jusqu’à 1 500 et 2 000 mètres, et, à un moindre degré, la Sierra de Espadan, entre Castellon et Valence, facilitent
singulièrement la défense. Les gouvernementaux, d’ailleurs, fortifient une
ligne de Viver à Segorbe. Leurs troupes, ici, sont plus fraîches. Contre elles,
et dans un espace beaucoup plus restreint, il faudra concentrer beaucoup plus d’hommes
et de matériel que dans la première partie de l’offensive. Tandis que le corps
d’armée marocain couvre le secteur de l’Ebre jusqu’au delta, Navarrais et
Galiciens sous Aranda opèrent une reconversion vers le sud, et progressent le
long de la côte, occupant sans difficulté Castellon le 16 juin, tandis que
Varela dispose du corps d’armée de Castille et du C. T. V. dont les éléments
motorisés joueront ici encore un rôle décisif. Il s’agit d’une nouvelle
bataille de rupture ; les forces concentrées par les républicains pour
sauver Valence sont les dernières dont dispose Miaja, nommé commandant de la
zone Centre-Sud. Il n’y a plus de réserves. Les seuls renforts, si nécessaires
pourtant, ne pourraient être prélevés que sur l’armée du Centre, ce qui
risquerait de dégarnir dangereusement, pour la première fois, la défense de
Madrid. Franco escompte la chute prochaine de Valence, troisième ville d’Espagne
et hier encore siège du gouvernement, un succès de prestige au moins aussi
important que la conquête du Levant qui priverait la zone Centre-Sud, où la
situation alimentaire est déjà précaire, d’une région indispensable à son
ravitaillement. Mais les difficultés de l’opération exigeront une préparation
de deux mois ; la « bataille du Levant » ne s’engagera pas avant
l’été. Le 15 juillet, elle est déclenchée avec de gros moyens matériels, de
part et d’autre de Teruel. Les 13 e et 17 e corps
républicains doivent se replier ; les armées de Varela et d’Aranda font
leur jonction et atteignent la ligne Viver-Segorbe. Du 20 au 23, après d’intenses
préparatifs d’artillerie, se succèdent les attaques de chars et d’infanterie
contre la ligne fortifiée. Mais, finalement, l’offensive échoue.
Entre mai et juillet, conscient du péril que court la zone
Sud, l’état-major républicain a en effet regroupé des troupes et lancé la
contre-attaque de l’Ebre qui obligera l’état-major nationaliste à relâcher son
étreinte contre le Levant. Valence est provisoirement sauvée. Cependant, depuis
juillet 38, la situation militaire des républicains s’est considérablement
détériorée. L’Aragon est perdu, la défense du Maeztrazgo reste précaire. La
preuve est faite définitivement de la supériorité matérielle des nationalistes,
de la capacité de leur commandement à mener la guerre avec les moyens modernes
dont il dispose. Enfin, la division de l’Espagne républicaine en deux zones est
très grave, non seulement parce qu’elle rend difficile une stratégie d’ensemble,
mais parce qu’elle sape les bases mêmes du régime politique imposé par le
gouvernement Negrín, obligé de déléguer ses pouvoirs, dans une partie
importante du territoire, aux autorités militaires. Séparées, les deux zones
vont évoluer de façon différente sur le plan politique et la zone Centre-Sud
échappera bientôt à l’influence directe du gouvernement. Entre-temps, le
désastre d’Aragon aura eu une conséquence politique directe : une crise au
sein même du gouvernement.
Le renvoi de Prieto
Le départ de Prieto du ministère de la Défense nationale est
en effet l’événement politique le plus important qui se soit produit en zone
républicaine depuis la chute de Largo Caballero. Il jette une note discordante
dans le calme politique relatif et l’ambiance d’« union sacrée » qui
ont suivi les événements du printemps 37.
Son
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