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La rose de Raby

La rose de Raby

Titel: La rose de Raby Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: C.L. Grace
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charmant quand il le souhaitait, et sans pitié pour ses adversaires. À présent, il faisait rouler entre ses mains un chapeau à plume, et regardait la bague portant son emblème, le sanglier rampant.
    —
    Vous trouvez cela drôle, mon frère?
    Édouard aurait aimé ne pas avoir bu autant lui-même; il avait le ventre tendu, gonflé. Il desserra sa veste de brocart tout en promenant son regard sur l'assemblée, composée d'hommes qui avaient combattu au coude à coude avec lui aux sanglantes batailles de Towton, Mortimer's Cross, Barnet et Tewkesbury : le très brun Hastings avec qui il avait partagé plus d'une maîtresse, son compagnon de débauche; Francis Lovell, assis de l'autre côté de Richard de Gloucester, qui regardait le frère du roi comme un lévrier son maître. « Mouvantes alliances », pensa le roi. Il avait vaillamment combattu pour la Couronne. À présent, il devait lutter contre les jalousies à l'intérieur de son propre parti qui se divisait en factions et se perdait dans des intrigues de cour, chacun choisissant son maître.
    Édouard pianota sur la table. Sa mère, sur le qui- vive, essayait de maîtriser sa rage et sa peur. «Tu deviens gros, Edouard », se disait-elle, remarquant que les bagues de son fils étaient serrées, perdues dans des bourrelets. Le bel Édouard, plus d'un mètre quatre- vingt-cinq en chausses, celui qu'on surnommait autrefois le Léopard royal, le Lion d'or, la douce Rose blanche d'York, avait un peu trop bu et festoyé. Tout cela par la faute de son épouse, cette parvenue qui se rengorgeait et prenait de grands airs comme si elle était la reine de Saba ! Et elle, Cécile, veuve du grand héros d'York, devait se tenir en retrait. Mais pas aujourd'hui! Cécile avait secoué le roi, demandé ce conseil, et, en fixant les visages souriants de ses deux autres fils, elle s'interrogeait sur le rôle qu'ils allaient jouer. Ah, si seulement Walter Venables était à côté d'elle pour lui glisser de bons conseils ! Cependant, le roi s'était montré inflexible :
    — Pas de partisan, très chère mère. Si vous amenez le vôtre, mes frères chéris amèneront les leurs.
    Édouard continuait à regarder avec une sorte de fascination l'écusson bleu et blanc fixé sur le mur, au-delà de la table, au-dessus des lambris de chêne.
    Cécile observa ses deux cadets. Richard, elle ne le comprendrait jamais : il n'était que l'ombre de son frère aîné. Si Édouard disait lundi que l'on était dimanche, Richard le croyait. Dissimulé et renfermé! Cécile regrettait d'avoir dit de lui qu'il était « le vilain de sa couvée ». Il ne l'oublierait jamais.
    Impétueux et très orgueilleux ! Le regard vert de Richard croisa celui de sa mère, et il lui adressa son sourire en coin, comme s'il lisait dans ses pensées.

    À son côté, Clarence faisait semblant de dormir. Sous la table, Cécile serra le mouchoir noué. Clarence était un jeune homme très dangereux, un être véritablement instable. Il s'était battu avec les York mais avait aussi soutenu l'autre bord, s'alliant avec des traîtres. Pourtant Clarence était rusé comme un chat : il savait quand bondir pour habilement changer de camp.
    Connaissait-il les craintes de sa mère ? En avait-il touché un mot au jeune Richard, qu'il avait toujours essayé de séduire avec ses boucles blondes et sa fausse bonhomie?
    Cécile leva les yeux sur le portrait de son époux accroché au mur du fond.
    C'était un homme au large visage et aux cheveux blonds. L'artiste l'avait avantagé. Cécile n'avait pas vraiment aimé son mari, mais elle avait soutenu sa cause, partagé ses triomphes et consommé avec lui les cendres amères de la défaite : la fuite, le dénuement et l'exil. Et sa disgrâce ? La pensée la fit frissonner. Cependant elle ne devait pas s'affoler. Le jeu se tramait. Le roi Louis, cette vieille « araigne » dans sa forteresse garnie de tourelles, avait tissé sa toile pour voir quelles mouches il pouvait attraper. Un espion se cachait ici. Le roi ne voulait pas y croire, mais Cécile en était convaincue. Venables l'avait à peine laissé entendre : une allusion, une réflexion de temps en temps. Cécile avait placé toute sa confiance en Padraig Mafiach, l'Irlandais, et espérait qu'il apporterait des nouvelles permettant de démasquer le traître et de l'envoyer à l'échafaud, de sorte à le rendre muet une fois pour toutes. Si seulement le vénérable Roger vivait encore ! Il aurait pu donner à Cécile son

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