La Traque des Bannis
discréditer Tennyson devant ses nouveaux convertis, puis de nous occuper de lui et de ses complices.
— Comment comptez-vous vous y prendre ? demanda Malcolm en fixant tour à tour les visages déterminés de ses compagnons.
— Il nous faudra recourir à des méthodes brutales, répondit Halt d’un ton posé.
— À trois contre vingt ? insista le guérisseur.
Le vieux Rôdeur eut un haussement d’épaules.
— Seuls quelques-uns doivent être entraînés à se battre… et encore. La plupart sont de simples brutes, habituées à tuer plus faible qu’eux et à terroriser des paysans sans défense. Il est parfois étonnant de voir comment des individus de leur espèce savent se faire tout petits dès qu’ils sont confrontés à des gens qui savent à peu près manier une arme.
Malcolm n’était pas convaincu. Cependant, il avait vu Will et Horace en action lors de la prise du château de MacIndaw, lorsque les deux jeunes gens avaient grimpé jusqu’aux remparts et s’étaient battus seuls contre la garnison en attendant que leurs hommes puissent les rejoindre. Peut-être sauraient-ils se charger de la vingtaine d’acolytes de Tennyson.
Horace, qui observait le guérisseur, devina ses doutes et précisa :
— Il y a un vieux dicton, qui dit : « À chaque problème son Rôdeur. »
— Cela signifie-t-il qu’en cas de problème, un seul Rôdeur suffit à rétablir l’ordre ? demanda Malcolm.
— Exactement, acquiesça le chevalier. Et vous avez là non pas un, mais deux Rôdeurs. Je suppose que je vais pouvoir m’accorder des vacances pendant qu’ils prendront les choses en main.
Halt et Will eurent un petit rire de dédain. Horace leur sourit.
— Je ne plaisante pas : je serai content de m’asseoir à l’écart et de vous regarder faire tout le travail.
— Comme à ton habitude, pas vrai ? rétorqua Will non sans ironie.
Le guerrier parut quelque peu vexé. Il comprit toutefois qu’il avait laissé la porte ouverte à ce genre de répartie.
— Non, sérieusement, reprit-il. Halt, j’ai pensé…
Il s’interrompit et dévisagea les deux Rôdeurs. Voyant qu’ils restaient muets, il ajouta :
— Vous n’allez donc pas me lancer que c’est « une activité dangereuse » ?
Halt et Will échangèrent un coup d’œil, puis secouèrent la tête.
— Non, car tu t’attendais à une telle remarque, précisa le jeune Rôdeur. Et si tu sais à l’avance ce que nous allons te dire, ça n’a plus rien d’amusant.
Horace, déçu, haussa les épaules. Il avait en effet préparé une réponse cinglante, qu’il lui fallait à présent mettre de côté pour une autre occasion.
— Bon, ça n’a pas d’importance, reprit-il. Si j’ai bien saisi, vous voulez dénigrer Tennyson, et pas seulement le capturer pour le ramener au château d’Araluen ?
— En effet, répondit Halt. C’est essentiel : il nous faut briser le mythe qu’il a bâti. Qu’as-tu en tête ?
— Eh bien, j’ai pensé qu’il pourrait se retrouver face au fantôme du roi Ferris…
Le vieux Rôdeur considéra cette proposition avec intérêt. Le chef des Bannis n’avait jamais su que le roi Ferris qui l’avait provoqué à Dun Kilty avait été en réalité Halt, lui-même déguisé en Ferris. Et les autres fois où Tennyson avait croisé le Rôdeur, le visage de ce dernier était resté en partie dissimulé sous son capuchon.
— Ce n’est pas une mauvaise idée, Horace, finit-il par admettre. Tennyson use sans cesse de supercheries. Si nous l’imitons, cela pourrait en effet le déstabiliser. Et peut-être sera-t-il tellement surpris qu’il laissera échapper des aveux compromettants.
Il se caressa la barbe, qui avait repoussé depuis leur départ de Dun Kilty, après qu’Horace l’avait taillée pour qu’elle ressemble à celle de son frère jumeau.
— C’est dommage, ajouta-t-il. Je recommençais tout juste à me réhabituer à ma barbe…
— Négligée, ne put s’empêcher de faire observer Will.
Le vieux Rôdeur le foudroya du regard.
— Pour ma part, je préfère dire qu’elle est « luxuriante », rétorqua-t-il avec dignité.
Son ancien apprenti s’empressa d’approuver.
— Évidemment ! C’était le mot que je cherchais. Je me demande vraiment pourquoi j’ai dit « négligée » !
Il parvint à garder tant de sérieux que Halt comprit que le jeune homme, au fond de lui, se tenait en réalité les côtes de rire.
Le lendemain, avant qu’ils ne lèvent le camp, Malcolm
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