La Traque des Bannis
l’emmener avec eux, répliqua Halt avant de sortir de la maison.
Ses deux compagnons le suivirent jusqu’à l’enclos où étaient enfermées les vaches.
— Leurs propriétaires ont apparemment essayé de les chasser, expliqua le vieux Rôdeur en indiquant le portail grand ouvert. Mais les abreuvoirs et les mangeoires sont pleins et j’imagine qu’après le départ des fermiers, les bêtes sont revenues.
Ces dernières, placides, les observaient. La plupart étaient occupées à ruminer, et la vue d’étrangers ne paraissait pas les alarmer. Trapues et bien bâties, elles avaient un pelage à longs poils pour se protéger durant les mois d’hiver.
— Peut-être les fermiers espèrent-ils que les Scotti se contenteront des vaches et ne brûleront pas les bâtiments, fit observer Will.
Halt leva un sourcil.
— C’est possible. Mais ils ne vont pas se priver de tout incendier, sois-en sûr. Les Scotti trouvent du plaisir à ce genre d’activité.
— Dans ce cas, que faire ? demanda Horace. Rebrousser chemin ? Après tout, les habitants de la ferme doivent maintenant être en sécurité quelque part.
— C’est vrai. Mais s’ils n’ont plus ni bétail, ni maison, ni champs, ils mourront de faim cet hiver.
— Dans ce cas, que proposes-tu, Halt ? ajouta Will.
Le vieux Rôdeur hésita un instant avant de répondre :
— Je crois que nous devrions leur envoyer le bétail.
Will le dévisagea avec étonnement. Halt avait-il perdu la raison ?
— Si c’est ton plan, pourquoi avoir fait ce détour ? Nous aurions pu continuer de traquer Tennyson.
Halt affichait un sourire ironique.
— Je ne parle pas de l’offrir aux Scotti mais de l’envoyer sur eux, précisa-t-il.
Will et Horace comprirent enfin. Le premier s’apprêtait à répondre quand Halt, d’un geste, l’en empêcha, lui indiquant l’entrée de la propriété, à la lisière de la forêt.
— Retourne là-bas pour faire le guet. Quand ils arriveront, avertis-moi. Dès qu’ils émergeront des arbres, nous chasserons les vaches dans leur direction.
Will acquiesça, un grand sourire aux lèvres à l’idée de la surprise qu’ils réservaient aux pillards. Il enfourcha Folâtre et traversa le champ au galop pour s’arrêter à une trentaine de mètres des bosquets les moins touffus ; cette partie de la forêt avait dû être défrichée au fil des années pour procurer du bois de construction et de chauffage aux paysans. En tout cas, les arbrisseaux très espacés ne fourniraient pas de refuge aux Scotti quand le troupeau chargerait.
Il trouva un buisson feuillu entre deux arbres, derrière lequel il mit pied à terre, et jeta un bref coup d’œil à Halt et à Horace, restés près de l’enclos. Il se demanda comment l’on semait la panique parmi des vaches pour les inciter à fuir, puis il écarta cette pensée, conscient que Halt saurait s’y prendre. Après tout, il n’y avait rien que le vieux Rôdeur ne sache pas.
****
— Comment allez-vous vous y prendre ? s’enquit Horace.
— Il faut d’abord effrayer les bêtes pour les encourager à s’enfuir. Ensuite, il nous suffira de monter en selle et de les guider jusqu’aux Scotti, expliqua Halt.
Il déambulait parmi les vaches, qui le dévisageaient avec indifférence. Il en poussa une – aussi solide qu’une maison, pensa-t-il –, et agita les bras devant elle.
— Bouh ! s’exclama-t-il.
L’animal émit un vent bruyant, mais ne bougea point.
— Vous lui avez fichu une de ces frousses ! commenta Horace, hilare.
Halt lui décocha un regard furieux.
— Si tu ôtes brusquement ta cape, elles auront peut-être peur de te voir soudain apparaître, suggéra-t-il d’un ton acide.
Le sourire d’Horace s’élargit. Il alla même jusqu’à enlever sa cape, ce qui n’eut aucun effet sur les vaches ; une ou deux le regardèrent d’un air placide et certaines lâchèrent d’autres vents.
— C’est apparemment l’une de leurs occupations favorites, fit-il observer. Nous pourrions les tourner en direction des Scotti : elles parviendraient sans doute à les souffler jusqu’au défilé…
Halt eut un geste d’impatience.
— Trouve donc une meilleure idée. Après tout, tu as grandi dans une ferme.
— Nullement, répliqua Horace. J’ai passé mon enfance à l’orphelinat du château de Montrouge. En revanche, vous étiez un prince hibernien : ne possédiez-vous pas nombre de vaches ?
— Si, mais nous avions aussi de grands rustres dans ton
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