La Vallée des chevaux
s’installa sur une formation
rocheuse et essaya de percer des yeux le rideau de pluie pour voir si une
éclaircie s’annonçait. Les prairies plates à perte de vue n’offraient aucun
abri : ni arbre de belle taille, ni rochers sous lesquels elle aurait pu
trouver refuge. Tout comme la jeune jument ruisselante d’eau qui se trouvait à
ses côtés, Ayla resta assise sous la pluie en attendant que celle-ci s’arrête.
Elle espérait que les rennes faisaient comme elle. Elle n’était pas prête pour
les prendre au piège. En milieu de matinée, elle faillit flancher à nouveau,
mais finalement resta sur place.
Capricieux comme il l’est toujours au printemps, le temps
changea brusquement à la mi-journée : la couverture nuageuse se disloqua
et le vent se mit à souffler. En début d’après-midi, il n’y avait plus trace de
nuages et les steppes humides de pluie resplendissaient sous le soleil
printanier. Le vent sec qui avait chassé les nuages absorba avidement
l’humidité de l’air, comme s’il craignait que le glacier lui confisque sa part.
Même si elle ne se faisait aucune illusion sur l’issue de la
chasse, Ayla retrouva un peu de courage. Elle étendit la peau d’aurochs
détrempée sur des buissons dans l’espoir qu’elle commence à sécher et revint
vers l’endroit où les rennes devaient passer. Quand elle s’aperçut que la fosse
qu’elle avait creusée la veille avait disparu, son cœur fit un bond dans sa
poitrine. En regardant de plus près, elle finit par retrouver le trou, transformé
par la pluie en une mare pleine de branches, de feuilles et de débris végétaux
de toutes sortes.
Nullement démoralisée, elle alla chercher un panier dont elle se
servait pour puiser de l’eau. Comme elle revenait avec cet ustensile, elle se
rendit compte que, de loin, il était très difficile de voir la fosse. Cette
constatation la fit sourire. Si j’ai du mal à apercevoir ce piège à cause des
feuilles et des branches qui s’y trouvent, il y a des chances pour qu’un renne
arrivant à vive allure ne le voie pas du tout, se dit-elle. Le problème, c’est
qu’il faut que je le vide. Mais peut-être existe-t-il un autre moyen de le
cacher...
Pourquoi ne pas utiliser des branches de saule ? Ces
branches seraient assez longues pour s’appuyer d’un bord à l’autre et je pourrais
les recouvrir de feuilles et de rameaux.
Et soudain Ayla éclata de rire. Whinney lui répondit en
hennissant joyeusement.
— Peut-être que cette pluie n’était pas une si mauvaise
chose, Whinney.
Après avoir écopé l’eau, elle trouva que la fosse était moins
profonde qu’avant et voulut la creuser à nouveau. Mais elle dut s’arrêter
presque aussitôt car elle se remplissait d’eau au fur et à mesure. Non
seulement la pluie avait fait monter le niveau de la rivière, mais elle avait
ramolli en surface la couche de sol gelé qui se trouvait au-dessous de la terre
arable.
Camoufler le piège ne fut pas aussi facile qu’elle le pensait.
Les buissons de saule étaient tellement rabougris qu’elle dut suivre la rivière
pendant un certain temps avant de réussir à ramasser une brassée de branches
et, comme ce n’était pas suffisant, elle y ajouta des roseaux. Elle eut beau
entrecroiser les branches, le camouflage végétal s’affaissait au centre et elle
fut obligée de le bloquer sur les bords. Quand elle l’eut recouvert de feuilles
et de brindilles, il s’affaissa à nouveau. Ayla n’était pas entièrement
satisfaite mais elle ne pouvait faire mieux.
Elle retourna alors vers son campement et retira avec un soupir
de soulagement ses vêtements humides et maculés de boue ainsi que ses chausses.
Après s’être baignée, elle étendit ses vêtements sur un rocher qui affleurait
près de la rive et se trouvait en plein soleil. C’était l’endroit rêvé pour
allumer un feu.
En général, les branches mortes qui se trouvaient à la base des
pins restaient sèches même quand il pleuvait à verse et celles du pin rabougri
qui se trouvait près de son campement ne faisaient pas exception à la règle.
Ayla emportait toujours avec elle les écorces et herbes sèches dont elle avait
besoin pour allumer un feu et, avec son silex et sa pyrite de fer, elle eut
vite fait de les enflammer. Au début, elle alimenta son feu avec des brindilles
et des petites branches, disposant les branches humides au-dessus du foyer pour
les faire sécher avant de les utiliser. Grâce à cette
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