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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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vous nous avez envitaillés.
    — Que
voilà, dis-je, de la bonne et belle gratitude de la part de ta bonne
maîtresse ! Et qu’as-tu découvert, Franz ?
    — Que
vous visitiez fort souvent M me de Nemours.
    — Tiens
donc !
    — Justement,
Monsieur, dit Franz, faut-il le dire à ma bonne maîtresse ?
    Cette question
m’étonna, mais je n’eus pas le loisir d’y répondre incontinent, car on toqua
derechef à l’huis, et Miroul introduisit un petit «  vas-y-dire », maigre
comme un cerceau, qui m’apportait un billet de Pierre de L’Étoile dont voici la
teneur :
    « Mon
Pierre, je ne sais plus à quel saint me vouer dans l’infamie des temps, dont la
coupe déborde. Lisette, autour de qui tournaient plus de galants que de guêpes
autour d’un pot de miel, m’a quitté hier sans crier gare, se peut bien pour
suivre l’un d’eux, me laissant en grand embarras, sans servante aucune, pris au
pied d’une mauvaise goutte et ne pouvant marcher. Comme je sais que vos gens et
vous-même êtes sans cesse à courre les rues, mon Pierre, peux-je vous demander,
si vous encontrez ma Lisette, de la persuader de revenir au bercail sans tant
languir. J’ai fait crier son signalement hier en tous quartiers par le crieur
de ville avec très forte récompense à qui la ramènera, mais en vain. Je suis
fort marri pour elle, la garce étant si naïve qu’un mauvais garçon pourrait la
mettre au bordeau ou ès étuves sans même qu’elle entendît son vilain propos. O
Tempora ! O Mores ! Et que penser aussi de son ingratitude, elle
que j’ai tirée quasiment du cercueil, la recueillant, alors qu’elle était au
bout de son pain. Je suis, mon Pierre, votre bien embarrassé et désappointé
serviteur. Pierre de L’Étoile. »
    Cette lettre
tout ensemble m’amusa et m’attrista, mais j’écrivis sur l’heure un mot à
L’Étoile pour le conforter et lui promettre mon rescous, dès que j’aurais
terminé une affaire que j’avais sur les bras et ayant confié le poulet au petit
«  vas-y-dire  » et lui ayant donné une piécette et un croûton,
je crus qu’il allait avaler la première dans sa hâte à gloutir le second. À la
réflexion, mais tardive, à peine fut-il parti que je dépêchai Pissebœuf porter
à Pierre de L’Étoile de la chair salée et du pain, craignant qu’il ne fût un
peu à court, ne pouvant saillir hors, vu sa goutte, et Lisette n’étant plus là
pour aller à la moutarde.
    — Franz,
dis-je, dès que le petit «  vas-y-dire  » fut envolé (et bien le
pouvait-il, pesant à peine au sol, tant il était léger), que quiers-tu donc de
moi ?
    — Si je
dois ou non révéler à ma bonne maîtresse que vous visitez si souvent Madame sa
mère ?
    — Pourquoi
non ?
    — Monsieur,
il pourrait y avoir là quelque danger pour vous.
    — Un
danger, Franz ? dis-je en levant le sourcil.
    — Ma
bonne maîtresse vous suspicionnant jà d’être un agent de Navarre, se pourrait apenser
que Madame sa mère vous confie le soin de lui porter ses messages.
    — Des
messages, mais touchant quoi ?
    — Touchant
un mariage entre Nemours et la sœur de Navarre.
    — Projet
lointain et fort peu consistant.
    — Lequel,
toutefois, inquiète fort ma bonne maîtresse, à telle enseigne qu’étant la femme
des chemins raccourcis, elle se pourrait bien aviser de supprimer le messager.
    — Franz,
dis-je en riant, voilà qui est bien pensé et bien dit. Donc, s’il te plaît,
bouche cousue sur mes visites à M me de Nemours.
    — Là,
Monsieur, dit Franz gravement, c’est moi qui encourrais péril.
    — Comment
cela ?
    — Ma
bonne maîtresse a bien pu placer un second espion à votre queue et s’il lui va
dire ce que je lui cache, où en serai-je ?
    Ceci me laissa
si rêveux et songeard que je demeurai un long temps bec cloué, sans pouvoir
rien résoudre. À la fin, donnant de l’œil à Miroul, je fis quelque excusation à
Franz et passai dans la chambre attenante, où Miroul, closant l’huis sur nous,
me vint rejoindre.
    — Qu’en
es-tu apensé, Miroul ?
    — Qu’il
faut lui dire que M me de Nemours vous a mis sur la queue du
chevalier d’Aumale.
    — Miroul,
c’est trahir la duchesse !
    — Point
du tout ! La duchesse est toute à Nemours, la Boiteuse toute à Mayenne,
mais je gage que la Boiteuse n’adore pas plus que sa mère, son cousin
d’Aumale : Ces trente mille hommes dans la main du chevalier en font un
rival pour Mayenne. Et Moussu, vous

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