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L'affaire du pourpoint

L'affaire du pourpoint

Titel: L'affaire du pourpoint Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Fiona Buckley
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inquiétude qu’ils se creusaient de répulsion.
    — Je gage, dit-il avec une sévérité inattendue, que vous ne verrez pas d’objection à ce que nous vous appelions « Mrs. », dans le style moderne ? Il est vrai qu’à maints égards, je reste vieux jeu. Je souhaite que mes filles, en grandissant, soient modestes et vertueuses comme les jeunes femmes d’antan…
    J’aurais volontiers rétorqué que, d’après le peu que j’avais vu de ses filles, ses efforts n’étaient pas, jusqu’alors, couronnés de succès. L’absence de Matthew m’accabla soudain. J’aurais voulu qu’il fût près de moi afin de lui chuchoter mon opinion peu flatteuse sur l’éducation des petites Mason, et de l’entendre me répondre : « Cuiller à sel ! » Je me languissais tant de lui que la tête me tournait, mais Mason parlait toujours :
    — Par d’autres aspects, en revanche, j’essaie de préparer mes enfants au monde moderne, c’est pourquoi, à Lockhill, nous avons adopté les nouvelles formules de politesse. Cela vous convient-il ?
    Je recouvrai mon sang-froid.
    — Cela me paraît fort avisé, Mr. Mason, et je ferai de mon mieux pour vous seconder auprès de vos filles.
    — J’y compte bien, dit Mason, toujours acerbe. Vous semblez bien jeune pour cette tâche !
    C’était donc la raison de cette hostilité. Mais n’y avait-il rien d’autre ? Une fois de plus, je sentis mes entrailles se nouer. Eh bien, j’étais dans la place, à présent ! Si quelque chose d’anormal se passait ici, la meilleure conduite à tenir était de sembler en tout point innocente et inoffensive, de ne pas attirer les soupçons ou de les dissiper s’ils existaient déjà. J’étais Ursula Blanchard, venue dans le Berkshire pour recouvrer la santé et initier les filles d’Ann à la couture et à la danse. Je souris avec douceur et affirmai que je tâcherais de me rendre utile.
    — Je suis sûre que vous me serez d’un grand secours.
    Dans les yeux bleus d’Ann, l’irritation se mêlait à la bonté, comme si elle eût souhaité que son époux me réservât un accueil plus aimable.
    — Je vous en prie, reprit-elle, entrez tous à la maison. Mrs. Blanchard, voulez-vous présenter vos compagnons à mon mari ?
     
    Peu de choses avaient changé, à Lockhill. Les enfants étaient aussi turbulents, leur précepteur aussi harassé et négligé dans sa mise, sa barbe grisonnante en bataille et son front sillonné telles des terres de labour. Mason lui-même était ascétique et obsédé par des notions abstraites comme dans mes souvenirs, et je constatai avec regret qu’Ann, qui portait une vieille robe et dont les boucles brunes s’échappaient de sous son bonnet, semblait toujours soucieuse et exténuée. Il ne manquait que la bande de petits chiens dont, l’automne précédent, les jappements ajoutaient au vacarme ambiant.
    Nous nous organisâmes, et l’on emmena nos bagages et nos montures. Brockley et les serviteurs d’Henderson allèrent aux écuries s’assurer qu’on s’occupait bien des chevaux.
    Nous suivîmes Ann dans l’immense entrée en désordre, où la poussière s’accumulait sur les cornes de cerfs ornant les murs, et où la vaste cheminée était froide. Dans le salon, en revanche, un bon feu créait une atmosphère accueillante, à défaut d’être ordonnée. Il y avait un berceau dans un coin, et presque chaque surface conçue pour servir de siège était occupée par une chose ou une autre : un panier à ouvrage, une pile de linge à raccommoder, un chat tigré endormi. Ann ne cessait de répéter que Rob et ses hommes ne partiraient pas le ventre vide.
    — Logan se débrouillera, j’en suis sûre. Un instant.
    Elle posa le petit Ned dans le berceau et sortit en hâte. Une minute plus tard, nous l’entendîmes se récrier car une certaine Jennet se trouvait au mauvais endroit au mauvais moment.
    — Jennet, au nom du ciel, que faisiez-vous en haut ?
    — Je rangeais le bureau du maître, madame, répondit une voix lente, un peu vexée.
    — Pour l’amour de Dieu ! Ann, je vous l’ai répété mille fois !
    Leonard Mason nous avait suivis à l’intérieur, mais s’attardait dans l’entrée.
    — Jennet ne doit en aucun cas épousseter mes affaires. Elle les dérange et ensuite je ne trouve plus rien. Vous seule êtes autorisée à pénétrer dans mon bureau. Je l’ai installé au premier à seule fin de le préserver du plumeau des domestiques autant que des

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