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L'affaire Nicolas le Floch

Titel: L'affaire Nicolas le Floch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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des conseils du chanoine Le Floch, son tuteur et père adoptif : « Il ne faut pas que tu te disperses parce que tu verras partout les tourments et les morts, alors que tu sais que tout est épreuve. Le deuil et la patience doivent engendrer l'espérance et l'impassibilité par lesquelles on meurt au monde. » Hélas, il n'avait pas encore atteint cette sagesse-là !
    Sartine et lui étaient arrivés juste à temps pour le début de l'office. Placé derrière son chef dans une tribune latérale, il avait pu observer tout à loisir les personnages de la Cour. Aux côtés de son chef impavide, se tenait, petite forme tassée, M. de Saint-Florentin, ministre de la maison du roi. Il ne parvenait pas à le nommer autrement, alors que la faveur du souverain avait fait ériger en duché-pairie sa terre de Châteauneuf-sur-Loire et qu'il portait désormais le titre de duc de la Vrillière. L'homme le mieux renseigné de France voyait sa faveur perdurer et les attentions du roi se multiplier ; ainsi, la perte d'une main au cours d'un accident de chasse avait été aussitôt compensée par la royale attention d'une prothèse en argent qu'un gant de soie dissimulait ordinairement.
    Plus loin, le duc d'Aiguillon, ministre des Affaires étrangères et de la Guerre, lorgnait à loisir les femmes de l'assistance, sans égards pour la sienne, assuré qu'elle ne lui en tiendrait pas rigueur habituée qu'elle était aux infidélités du beau duc. Elle-même, nièce de M. de Saint-Florentin, édifiait la Cour par sa piété, sa dévotion et sa résignation. Nicolas, qui la détaillait, mesura qu'on ne mentait pas sur son compte. Il nota la bouche enfoncée, le nez de travers et le regard égaré. À cela s'ajoutait une taille de harengère à la poitrine et aux bras énormes. Pourtant, l'effet général n'était pas désagréable et, comme il l'avait entendu dire, « cette personne était un spectacle chargé de machines et de décorations, où il se trouve quelques traits merveilleux sans suite et sans ordre, que le parterre admire, mais qui est sifflé des loges ».
    L'office s'achevait dans l'exaltation d'une fugue triomphale de l'orgue. Le bruissement des fidèles s'accentuait et, debout, chacun reprenait les formules de bénédiction. La procession des officiants quitta la chapelle après avoir salué la tribune royale. La nef se vida. Le roi se leva et reprit ses gants et son chapeau des mains d'un aumônier. Les portes du salon de la chapelle s'ouvrirent et les Cent-Suisses, disposés en haie, prirent les armes au son du tambour.
    M. de Sartine murmurait à l'oreille du ministre. Celui-ci fit la moue et Nicolas l'entendit s'engager à parler au roi sur-le-champ. Ils attendirent un long moment son retour. Le lieutenant général de police s'abîmait dans la contemplation d'une statue du salon représentant La Gloire tenant le portrait de Louis XV . Un garçon bleu apparut qui les invita à se rendre dans la salle du conseil où le roi, par extraordinaire, recevrait le magistrat. Le messager salua le commissaire, qui reconnut Gaspard. Celui-ci, autrefois au service de M. de La Borde 21 , relevait désormais du service intérieur du souverain. La confiance du roi en son premier valet de chambre lui avait valu cette flatteuse promotion. Nicolas, à qui l'intéressé avait naguère rendu bien des services, se dit que le choix n'était peut-être pas pertinent et qu'il ne l'aurait pas conseillé en tout état de cause, tant l'appât de l'or tenait fortement le drôlet. Or, les tentations étaient grandes dans les coulisses et les antichambres du palais. Ils traversèrent bientôt la Galerie des Glaces encore remplie de la foule des dimanches. Nicolas, qui avait eu longtemps la responsabilité d'assurer la sécurité de la famille royale, redoutait particulièrement ces jours où chacun, à condition d'être convenablement vêtu, le chapeau à la main et l'épée au côté – épée qu'on louait à l'entrée du château – pouvait approcher le roi et les siens. Sartine fit signe à Nicolas d'attendre sur une banquette et pénétra dans la salle du conseil.
    Le commissaire avait connu dans la galerie un autre mobilier que le désir de nouveauté avait écarté en 1769. Il admira les guéridons de bois doré représentant des groupes d'enfants et les femmes tenant des cornes d'abondance. Au-dessus, le cartouche du tableau central proclamait : « Le roi gouverne par lui-même. » Mercure descendait des cieux le caducée

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