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L'Amour Et Le Temps

L'Amour Et Le Temps

Titel: L'Amour Et Le Temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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représentants.
    Bien que partageant l’avis de Rewbell, Claude ne dit rien, pour ménager ses amis du triumvirat. Robespierre lança quelques mots : La Fayette, Bailly n’étaient pas seuls suspects. Il fallait établir une liste de tous les complices. Déjà Barnave répliquait. « Je jure, s’écria-t-il avec flamme, que le général La Fayette, en prenant des mesures immédiates, a bien mérité de la patrie ! »
    Les deux comtesses applaudirent, suivies par l’assistance, à la seule exception des « noirs », royalistes forcenés, et de la gauche extrême.
    « Je ne sais, dit M. Roland, si le jeune Barnave parle avec sincérité ou par politique, en tout cas sa déclaration est adroite, encore qu’il soit bien difficile de justifier le général. » M. Roland, sec, la voix aigre, les yeux très rapprochés, vêtu sans soin, avait cinquante-sept ans, vingt de plus que sa femme ; mais jeune d’esprit, très philosophe, très libéral, il accordait comme elle toute sa sympathie à la fraction avancée des Jacobins.
    La Fayette attendait sans doute l’absolution de l’Assemblée. Il entra, prit place, accueilli par les murmures de ses adversaires. La séance se poursuivit par l’audition des ministres. Montmorin affirma qu’il n’était en rien dans le secret du départ. On le crut. Laporte, intendant de la liste civile – un petit homme noir et crispé – vint alors présenter un mémoire du Roi. La salle vibra aussitôt.
    « Un mémoire ! s’écria Beauharnais. Comment l’avez-vous reçu ?
    — Le Roi l’a laissé, accompagné d’un billet à mon nom.
    — Où est ce billet ? Lisez-le, lança une voix.
    — Non, non, protesta Claude avec nombre de ses collègues.
    — C’est une lettre personnelle, dit Lanjuinais, nous n’avons pas le droit de la lire. »
    Beauharnais agitait sa sonnette. Rompant le cachet du mémoire, il en commença la lecture. C’était un long message intitulé « Déclaration à tous les Français » : une protestation contre les excès qui bouleversaient le pays, contre la destruction totale de la royauté, le viol des propriétés, l’anarchie régnant dans toutes les parties de l’Empire. Comment le monarque gouvernerait-il, quand tous les pouvoirs se trouvaient aux mains des comités dont certains exerçaient « un véritable despotisme » ! Que restait-il de liberté, quand l’Assemblée elle-même se trouvait sous la domination des clubs ? Rappelant tous les outrages qu’il avait subis « et qui ont tant ravalé la fonction royale », les atteintes intolérables à sa liberté de conscience, l’insuffisance selon lui de la liste civile, les insultes et les menaces adressées à la reine : « épouse fidèle qui venait de mettre le comble à sa bonne conduite », la contrainte du séjour aux Tuileries, « où, loin de trouver les commodités auxquelles il était accoutumé, il n’a pas même rencontré les agréments que se procurent les personnes aisées », le Roi concluait : « Français ! et vous, Parisiens ! vous, habitants d’une ville que vos ancêtres se plaisaient àappeler la bonne ville de Paris, méfiez-vous des suggestions et des mensonges de vos faux amis. Ralliez-vous à votre Roi, il sera toujours votre père. Quel plaisir n’aura-t-il pas à oublier ses injures personnelles et à revenir au milieu de vous lorsqu’une Constitution qu’il aura acceptée librement fera que notre sainte religion sera respectée, que le gouvernement sera rétabli sur un pied stable ! »
    Le plus complet silence suivit cette lecture. On entendait le bourdonnement de la foule dans le couloir et dans le jardin des Tuileries. « Les avis ? » demanda Beauharnais.
    Pas une voix ne lui répondit. « L’Assemblée passe à l’ordre du jour », dit-il.
    Un huissier étant venu lui murmurer quelques mots, il annonça : « Le général Rochambeau et d’autres officiers généraux des troupes de ligne demandent à se présenter devant vous pour vous assurer de leur loyauté et de leur dévouement. »
    Tandis qu’ils défilaient les uns après les autres à la barre, le bonhomme Roland chuchotait : « Quelle mesquinerie, quelle inconscience dans le message du Roi ! Il y a certaines choses justes, mais sottement dites ; il les noie dans un fatras égoïste, borné. La Reine, épouse fidèle !… Le pauvre homme !… Et vingt-quatre millions de francs ne sont-ils pas un beau denier, quand l’État ne sait où

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