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L'Amour Et Le Temps

L'Amour Et Le Temps

Titel: L'Amour Et Le Temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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message pour montrer qu’il fallait accuser non point le Roi mais les responsables de la mésentente entre celui-ci et la nation. Se servant adroitement de Robespierre, il ajouta : « Notre frère et ami, l’homme insoupçonnable, l’Incorruptible, vous a dit ici-même : la république n’est qu’un mot. Cela est très vrai. Rien ne saurait être plus républicain que la Déclaration des droits, que notre Constitution. Elle attribue fort sagement le législatif à la masse de la nation représentée par ses députés, c’est-à-dire au nombre, et l’exécutif à un seul, car un seul peut le manier sans l’affaiblir, un seul peut être assez aisément surveillé pour n’éprouver point la tentation d’abuser de son pouvoir. Or, quel individu trouverez-vous assez indépendant des partis, et, par essence, exempt d’ambition, pour lui confier ce pouvoir ? Notre unique garantie de liberté, d’indépendance, se trouve dans un homme répondant à ces deux conditions. Pour moi, je ne vois de tel que le Roi. Si le mot vous déplaît comme un vestige de la tyrannie, nommez Louis XVI président des affaires publiques, ou que sais-je ? Peu importe le titre, pourvu que le fondement de ce que nous avons construit ne soit point changé. L’édifice reste encore fragile, n’allez pas joindre follement vos efforts à ceux des antidémocrates pour ébranler ses assises, gardez-vous de courir l’aventure d’une régence, de je ne sais quel conseil. Plus tard peut-être, quand le temps aura consolidé notre construction, nos successeurs auront-ils la possibilité de transformer la monarchie républicaine en république nominale. »
    Robespierre approuva. Assurément, il se guidait lui-même sur l’opinion départementale. Il n’y avait pas eu consultation officielle par le canal des assemblées primaires, comme le désiraient les Roland, Buzot, Brissot, les Cordeliers et tous les démocrates extrêmes, mais les avis exprimés par les clubs de province montraient bien que le pays, dans sa masse, était réfractaire à un changement de régime. Seuls six départements : la Moselle, la Haute-Marne, le Jura, le Puy-de-Dôme, les Pyrénées-Orientales, l’Hérault manifestaient – certains assez violemment – des velléités républicaines, auxquelles certains des soixante-dix-sept autres s’opposaient avec fermeté. C’est ainsi que Claude lut aux Jacobins la réponse de la société limougeaude à une pétition envoyée à l’Assemblée nationale par le club de Montpellier. Celui-ci ne craignait pas de s’adresser aux députés en ces termes : « Représentants, vous avez grand besoin de connaître l’opinion publique ; voici la nôtre. Il ne nous manquait pour être romains que la haine et l’expulsion des rois. Nous avons la première, nous attendons de vous la seconde. Si vous repoussez l’honneur qui vous est offert par les circonstances, si par vous les Capets et leur trône pèsent encore longtemps sur nous, soyez-en sûrs, Représentants, nous vous maudirons de tous les maux qu’ils nous feront ; et ils nous en feront sans doute, car la race des rois est malfaisante. » Les Montpelliérains avaient communiqué leur pétition à toutes les sociétés jacobines pour qu’elles l’appuyassent par des adresses. Au lieu de quoi les Jacobins de Limoges leur répondaient sagement : « Dans un instant où les pouvoirs ne sont pas encore déterminés et assis, où nos troupes sont à peu près sans chefs, où la France, divisée en deux partis, est prête à voir des guerres s’allumer dans son sein, nous la diviserions en un troisième parti, et cette division serait le tombeau de la liberté, puisqu’elle s’opérerait chez les patriotes eux-mêmes. Enfin, il est évident qu’en renversant le trône vous favoriseriez l’usurpateur le plus adroit, et qu’il faudrait recommencer à gagner une liberté qui nous a coûté tant de travaux. » Pierre Dumas avait communiqué à Claude copie de cette réponse qui traduisait parfaitement les craintes répandues dans la majorité des esprits.
    Un peu avant était arrivée de Limoges une autre missive : une lettre de Bernard. Il annonçait qu’hélas nulle délégation ne se rendrait à Paris pour le 14 juillet. Les fédérés limousins renouvelleraient leur serment sur la place Tourny au moment où la même cérémonie se déroulerait au Champ-de-Mars. Ce serait tout. Les alarmes produites par la situation n’inclinaient pas aux grandes

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