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L'Amour Et Le Temps

L'Amour Et Le Temps

Titel: L'Amour Et Le Temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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sans-culottes ! » Il aurait dit : ces enjuponnées, comme les prédicateurs d’autrefois, le mot n’eût frappé personne. L’originalité de l’expression lui valait une vogue grandissante et, les journaux royalistes la tournant en injure, elle devenait en quelque sorte un brevet de patriotisme.
    Il y avait aussi, circulant dans le public en faisant cliqueter leur crécelle, les débitants de sorbets et de coco, qui portaient sur leur dos leur marchandise dans un cylindre peint de couleurs vives, les marchands de pain d’épice, de gâteaux de Nanterre : friandise nouvelle, très en vogue. Il y avait, enfin, assis au bas des marches, un petit bonhomme maigre à perruque bien frisée, en habit vert un peu usé mais très propre, qui détaillait les citoyennes d’un regard expert et sournois.
    Lise et Claude étaient descendus de voiture devant l’École militaire. Là, des compagnies de la garde citoyenne veillaient près de leurs fusils en faisceaux. En avançant vers l’autel, les deux jeunes gens virent exposé sur la base un tableau du triomphe de Voltaire ainsi que l’affiche inspirée aux Cordeliers par le serment de « Brutus » : Songez qu’au Champ-de-Mars, à cet autel auguste, Louis nous a juré d’être fidèle et juste… Ils étaient là en nombre, les Cordeliers, avec leur carte représentant un œil ouvert, pendue à la boutonnière par une ganse bleue. Montés sur les quatre socles cubiques flanquant les angles de l’escalier monumental et supportant les cratères où, les jours de célébration, brûlait la flamme patriotique, des commissaires lisaient à l’assistance la pétition jacobine. L’un de ces commissaires était Danton, vêtu à la légère de basin gris, quelque peu dépoitraillé ; le second, Brissot, avec son nez hardi. Les deux autres, après les avoir aperçus de loin, on ne les voyait pas de ce côté : l’escalier les masquait. Aucun des quatre ne remportait, semblait-il, grand succès, à en croire les murmures, et même quelques clameurs de la foule où l’on entendait crier dans les premiers rangs : « À bas les traîtres ! Plus de monarchie ! Plus de despotes ! »
    « Ah bah ! l’accord ne me semble guère parfait ! dit Lise. Avançons un peu. »
    Parvenus plus près du piédestal de Danton, ils se rendirent compte que l’ancien président des Cordeliers se trouvait aux prises avec ses propres troupes fort mécontentes. « C’est une adresse monarchiste que vous nous baillez là ! protestait-on. Nous ne voulons pas plus d’un autre roi que de Louis XVI. » Danton, aussi leste qu’au temps où il luttait avec le taureau, sauta au sol pour argumenter. Bonneville s’avança, très ferme : « On vous abuse, Danton. Ne voyez-vous pas ce que couvrent ces mots : par tous les moyens constitutionnels ? Ou bien voulez-vous, vous-même, tromper le peuple ? Nous n’entendons pas déposer Louis de Bourbon pour le remplacer, sous quelque forme que ce soit, par Philippe d’Orléans. Il faut détruire toute forme monarchique. »
    Pétion, Claude lui-même intervinrent, rappelant que les Jacobins n’estimaient pas les temps mûrs pour la république, surtout maintenant, après la redoutable scission des « constituants ». Danton, suant, la cravate défaite, explosa. « Oui, tout cela est bougrement mal emmanché ! Qu’est-ce que vous souhaitez ? Si vous le savez, dites-le ; accordez vos violons, une fois pour toutes ! »
    Brissot arriva, annonçant que les gens ne semblaient pas disposés à signer. Certains voulaient barrer la phrase : et à pourvoir à son remplacement par tous les moyens constitutionnels. D’autres voulaient ajouter, après ne reconnaîtront jamais Louis XVI, « ni aucun autre roi ».
    « Qu’ils aillent se faire foutre ! s’exclama Danton. J’en ai par-dessus les oreilles. Allez, venez ! dit-il en prenant Claude et Lise chacun par le bras, quittons cette pétaudière. Allons boire un verre de clairet au Gros-Caillou à la santé de la ravissante Lison. Elle est à croquer, cette enfant. Je ne vous ai jamais vu les yeux si bleus, madame. »
    Elle lui rendit son sourire. Mais Claude : « Mon ami, mille excuses ; je voudrais quand même savoir comment on va conclure.
    — Par quelque sottise, assurément. J’ai idée que tout cela finira par tourner très mal !… Venez donc dîner avec nous, demain, lança-t-il en s’éloignant. Nous vous attendrons. »
    Brune et quelques Cordeliers le

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