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L'Amour Et Le Temps

L'Amour Et Le Temps

Titel: L'Amour Et Le Temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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vais lui parler. Je veux savoir ce qu’il fait, ce qu’il pense. Laisse-moi, je t’en prie !
    — Tu es folle, mon petit cœur. Tu vas te commettre sottement.
    — Vaut-il mieux être folle ou mourir d’ennui ? Bernard est le seul homme avec lequel je puisse avoir du bonheur à vivre, ne veux-tu pas me comprendre ?
    — Cela m’est difficile. Te rends-tu compte ? l’amant de ma coiffeuse !
    — Il ne l’aurait sans doute pas été si je ne l’avais cruellement déçu. Il a une âme autrement plus noble que celle de ton Mailhard.
    — Bien, bien, soupira Thérèse. Puisque tu n’entends rien, va donc ! Et ne demeure pas trop, je t’attendrai dans le chemin pour rentrer avec toi. On croira que nous nous sommes promenées ensemble.
    — Oh ! ma bonne, merci ! N’auras-tu point froid ?
    — Ne t’inquiète pas, je marcherai. Ne m’oublie pas, seulement.
    — Pas de danger ! » se récria Lise en s’éloignant avec hâte.
    Déjà elle n’était plus occupée que par la peur de ne point trouver Bernard en bas. Aurait-il consenti à venir ? N’avait-il pas dédaigné sa prière ? Voilà ce qu’elle redoutait depuis trois jours.
    De loin, elle l’aperçut sous les ramures bourgeonnantes des ormes, entre les vergnes qui commençaient à feuiller. Il arrivait de Limoges, à pied, sa sœur et son beau-frère n’ayant pas encore repris leurs visites dominicales à leur petite maison. Assis sur le haut d’une des vannes, il attendait. Quand il vit sortir du chemin creux la silhouette si souvent guettée ici, l’acuité du souvenir et le sentiment de tout ce qui s’était interposé entre eux depuis ce jour de l’automne dernier, lui serrèrent la gorge. Il s’avança au-devant de la jeune femme. Ils se rejoignirent sur la chaussée, au bord de l’eau profonde, d’aspect froid encore, où leur image se ridait. Son chapeau à la main, il s’inclina gravement.
    « Oh ! Bernard, Bernard, vous êtes venu ! Vous gardez donc un peu d’amitié pour moi ?
    — Je n’ai pu me refuser à ce que vous demandiez d’une façon si touchante, mais nous avons tort de nous rapprocher, je sens cela clairement. Il n’en sortira pour tous deux que du mal.
    — Le mal, pour moi, c’est de ne plus vous voir, lui répondit-elle. Écoutez, Bernard, avant de rien envisager, il faut que nous nous expliquions complètement. Les malentendus se sont accumulés entre nous, essayons de les dissiper. Nous saurons alors ce que nous pouvons attendre l’un de l’autre.
    — Rien. Nous ne devons rien attendre, et vous le savez.
    — Ah ! n’est-ce donc rien que de nous trouver ensemble, simplement ?
    — Ne m’avez-vous pas annoncé ici même qu’il fallait y renoncer ! N’y étiez-vous pas résolue, alors ? dit-il d’un ton sévère.
    — J’étais résolue à suivre mon devoir, mais je vous aimais de toute mon âme, Bernard. Je vous le répète, je n’ai jamais, jamais une seconde, aimé que vous. On a hypocritement abusé de ma candeur. Quand j’ai été au fait, alors seulement je me suis rendu compte de l’étendue de ma trahison envers vous. Comment vous dire ma honte ? Combien j’ai approuvé votre colère et votre jalousie ! J’en avais été sottement blessée parce que, encore une fois, j’ignorais à quoi je m’engageais. Ensuite, quand je vous ai revu, au coin de la rue des Combes, je n’ai pas osé affronter votre regard. Je me sentais indigne, odieuse. J’imaginais votre mépris. Je vous ai fui parce que je vous aimais toujours. Serait-ce incompréhensible ? »
    Il fit non de la tête, accablé par ces révélations. En expliquant les faits, elles en rendaient les causes d’autant plus consternantes. Et aussi les paroles de Lise le gênaient. Si voilées qu’elles fussent, elles n’en étaient pas moins cruellement évocatrices pour lui qui adorait naguère sa pureté.
    « Voyez-vous, Bernard, poursuivit-elle, il y a dans ma faute un peu de la vôtre. Je ne puis vous adresser de reproche, c’est tout à votre honneur que vous ayez eu tant de respect pour moi. Cependant !… Ah ! si vous m’aviez appris comment je vous aimais sans le savoir ! »
    Elle soupira et se tut. Lui, il regardait fixement la terre sableuse. Ils s’étaient assis tous les deux sur la vanne. Le mince filet du trop-plein chantait derrière eux sur les pierres, en contrebas. L’herbe, au bord de la chaussée, était bleue de pervenches.
    « Mais dites-moi, reprit Lise, n’allez-vous

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