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L'année du volcan

L'année du volcan

Titel: L'année du volcan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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lampa d’un coup son verre de sherry .
    — Hum, lorsque toutes les haines ont éclaté, toutes les réconciliations sont fausses. Disons que nous sommes au milieu de l’entracte. Mais entre nous c’est différent. Le temps a fait son œuvre. Se combattre, c’est se rapprocher et les ennemis qui se réconcilient tiennent souvent plus fortement l’un à l’autre que des amis qui ne sont point brouillés. Voyez comme vous buvez de bon cœur ce sherry qu’une main criminelle aurait pu empoisonner !
    Nicolas tendit son verre vide.
    — Achevez-moi, milord. Je mourrai confiant que vous êtes innocent. Jamais vous ne vous abaisseriez à un acte aussi vil et déshonorant. L’ennemi doit avoir l’honneur, sinon à quoi ressort le combat contre lui ?
    Aschbury éclata de rire, se tapa sur les cuisses avec cette vulgarité rustaude qui le caractérisait, poussa un cri et grimaça.
    — J’oublie toujours mes blessures de guerre. Un morceau d’espar français m’est resté fiché dans la cuisse, ou plutôt, un bout de fer oublié par le chirurgien du Glorious Heart . Car, sachez-le, tout jeune,je fus officier de marine avant de me cantonner dans des travaux de bureau.
    — Je loue votre modestie ! Cantonnement qui vous offrait des voyages et des loisirs animés dont vos amis supportaient les aléas.
    — C’est vrai. Mais vous-même ne comptiez-vous pas parmi les héros du combat d’Ouessant ? J’aime les adversaires de cette carrure-là !
    — Supposeriez-vous que nous avons perdu la main ?
    — J’aurais garde de le croire et votre propos justifie ma prudence. Reste, mon ami, que trop de sincérité demeure dans cette occurrence plus que suspecte, et que votre échange avec l’Excellence pourrait dissimuler autre chose. Ainsi la pâte du pie recouvre le rognon.
    Nicolas s’efforçait de faire bonne figure, s’appliquant à masquer ses sentiments derrière un visage aimable et immobile.
    — Vous ne dites rien ? Aurais-je débusqué la mouche ?
    — Non pas, milord. Je pensais à M. de Sartine. Vous êtes très semblables et vos trop-pleins d’intelligence et de finesse vous entraînent à des conclusions souvent bien éloignées de la vérité.
    — Soit, monsieur le marquis, soit ; la comparaison est flatteuse ! Que dit-on du temps en France ?
    — Il inquiète, milord. Et mon parcours m’a permis de constater le ravage d’un certain brouillard dans nos campagnes. J’ai remarqué que pareillement à Londres, le soleil est fâcheusement voilé et qu’une certaine odeur puante surnage d’inquiétante façon.
    Un valet apporta une turtle soup et, tout en la dégustant, ils se plongèrent dans leurs souvenirs descombats d’antan. Nicolas demeurait pourtant sur ses gardes ayant affaire à forte partie. Il en connaissait les astuces pour les avoir toutes éprouvées. Lord Aschbury pointa l’oreille lorsque fut apportée une selle d’agneau entourée de pommes rissolées. Un claret français fut servi, qui ajouta encore à la chaleur de la rencontre.
    — Quel était le but de votre visite au comte d’Adhémar ?
    La pointe était directe et exigeait une réponse aussi droite.
    — Oh ! Simple visite, une sorte d’inspection au moment où la chancellerie est ouverte. Point de complot sous roche, rassurez-vous. J’ai transmis à notre ambassadeur des instructions du ministre. Et voyez, je peux même vous les révéler : développer les relations avec le monde politique anglais, tenir le cabinet britannique au courant des démarches à la cour de Saint-Pétersbourg et demeurer en liaison avec l’ambassade d’Espagne pour faciliter les préliminaires de paix à Paris. Sans compter des détails d’ameublement.
    Aschbury derechef se mit à rire.
    — Cela correspond exactement à ce que j’ai appris.
    — Ne me dites pas que…
    Lord Aschbury feignit d’ignorer la remarque et en revint au climat.
    — Nous en sommes nous-mêmes fort préoccupés. Tout a commencé en juin par des brouillards secs et épais. Une odeur fétide s’est peu à peu fait sentir, comme celle des œufs pourris. Il y a eu de terribles orages. De toute une partie du royaume nous parviennent d’inquiétantes informations. Les trèfles et les herbes tendres ont été brûlés. La lune et le soleil furent obscurcis. On a alors relevé des cas de choléra, des convulsions, des coliques et des vomissements. La peau des paysans s’irritait et beaucoup sont morts.
    — Toutes ces remarques correspondent

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