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L'archer du Roi

L'archer du Roi

Titel: L'archer du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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à
l’ouvrage, poursuivit Villeroy d’une voix qui paraissait sortir des tréfonds
d’une profonde caverne.
    — Un message de messire Guillaume d’Evecque, insista
Thomas.
    — Il faut profiter de la marée basse, vous
comprenez ? J’ai trois bassines de mousse dans la cale. Moi, je prends
toujours de la mousse. Mon père aussi. Il y en a qui prennent du chanvre, mais
moi, je ne veux point de ça. La mousse bien fraîche, c’est ce qu’on fait de
meilleur. Parce que la mousse, ça tient, vous comprenez ? Et ça se mélange
mieux avec le brai.
    Un sourire partiellement édenté fendit soudain son affreuse
face.
    — Mon doux caneton ! s’attendrit-il à la vue
d’Yvette lui apportant son plat débordant de bonnes choses.
    Son doux caneton gratifia les visiteurs de deux œufs chacun,
puis leur remit d’office deux marteaux et une paire d’étranges instruments en
fer qui ressemblaient à des burins émoussés.
    — Il va nous falloir calfater les joints, expliqua
Villeroy. Moi, je m’en vais faire chauffer le brai et vous autres, vous pourrez
enfoncer la mousse.
    Du jaune d’œuf ayant dégouliné sur son menton, il le
rapatria dans sa bouche avec ses doigts. Puis il précisa :
    — Ça se fait entre les marées, tant que le bateau est
hors de l’eau et au sec.
    — Mais nous vous avons apporté un message, insista
Thomas.
    — Vous l’avez déjà dit. De messire Guillaume. Ce qui
veut dire qu’il veut le Pentecôte pour un voyage et ce que veut messire
Guillaume, il l’aura, pour sûr, parce qu’il a été bon pour moi. Mais le Pentecôte , il ne sera pas bon pour lui s’il tombe au fond de l’eau, pas
vrai ? Il ne sera pas bon s’il se retrouve à tenir compagnie à tous les
marins noyés, pas vrai ? Il demande à être calfaté. Avec mon petit cœur,
nous nous sommes quasiment noyés hier, pas vrai, mon doux caneton ?
    — Il prenait l’eau, confirma Yvette.
    — Ah ça pour sûr, il a fait glouglou tout du long
depuis Cabourg ! Aussi si messire Guillaume veut aller quelque part, vous
feriez bien de vous mettre à l’ouvrage, vous autres !
    Le géant leur adressa un sourire épanoui par-dessus sa vaste
barbe agrémentée de jaune d’œuf.
    — Il veut rejoindre Dunkerque, dit Thomas.
    — Il a dans l’idée de mettre les voiles, pas
vrai ? réfléchit Villeroy à voix haute. Il aura franchi le fossé et sauté
sur ses chevaux et sera loin avant que le comte de Coutances ait seulement le
temps d’ouvrir un œil.
    — Pourquoi Dunkerque ? s’étonna Yvette.
    — Il va rejoindre les Anglais, pour sûr, répondit le
géant sans la moindre trace de réprobation pour cette présumée félonie. Son
seigneur s’est retourné contre lui, l’évêque s’en lave les mains et on dit que
le roi trempe dans l’affaire, alors autant changer de côté. Dunkerque ? Il
va rejoindre le siège de Calais. (Il enfourna une énorme quantité d’œufs au
jambon dans sa bouche.) Alors, quand veut-il partir, messire Guillaume ?
    — Le jour de la Saint-Clément.
    — Quand est-ce ?
    Ils ne le savaient ni les uns ni les autres. Thomas
connaissait le jour du mois où l’on fêtait la Saint-Clément, mais il ignorait
le nombre de jours qui les en séparait. Cette ignorance lui fournit une excuse
pour éviter d’avoir à exécuter ce qu’il pressentait comme étant une besogne
salissante qui l’exposerait au froid et à l’humidité.
    — Je me charge de l’apprendre, déclara-t-il, et je
reviens pour vous aider.
    — Je viens avec toi, proposa Robbie.
    — Toi, tu restes ici, répliqua Thomas d’un ton ferme.
Le sieur Villeroy a de l’ouvrage pour toi.
    — De l’ouvrage ? répéta Robbie, n’y comprenant
goutte.
    — Ce ne sera pas grand-chose, affirma Thomas, et cela
te plaira.
    Robbie le considéra avec suspicion.
    — Et toi, où vas-tu ?
    — À l’église, mon cher Robbie Douglas, je vais à
l’église.

 
9
    Les Anglais avaient pris Caen l’été précédent puis avaient
occupé la ville juste le temps nécessaire pour violer ses femmes et piller ses
richesses. Ils avaient laissé une ville défaite, exsangue et sous le choc, mais
Thomas était resté après le départ de l’armée. Malade, il avait été soigné par
le docteur Mordecaï en la maison de messire Guillaume et, plus tard, lorsqu’il
avait été suffisamment rétabli pour pouvoir se remettre sur ses jambes, son
protecteur l’avait conduit à l’Abbaye-aux-Hommes pour y rencontrer le

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