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L'archer du Roi

L'archer du Roi

Titel: L'archer du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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Totesham, ce
n’est point mon ennemi.
    Sur ce, il tourna les talons.
    — Ventredieu ! brailla l’Épouvantail, dont la
colère n’avait pas décru.
    Il avait été appauvri par la maison de Douglas et était
toujours pauvre, car le risque qu’il avait pris en poursuivant Thomas n’avait
pas payé, puisqu’il n’avait pas trouvé de trésor. Et maintenant, voilà que ses
ennemis au grand complet paraissaient réunis dans les personnes de Thomas et de
Robbie. Il avança en titubant et cracha sur l’Écossais.
    — Moi, je les jette au feu, les hommes qui portent le
cœur de Douglas, dit-il, je les jette au feu !
    — Oui, c’est ce qu’il fait, confirma Thomas à voix
basse.
    — Il les jette au feu ? répéta Robbie.
    — À Durham, répondit l’archer en plongeant son regard
dans les yeux de sir Geoffrey, il a fait jeter au feu trois prisonniers.
    — Tu as fait quoi ? hurla Robbie.
    L’Épouvantail, malgré les vapeurs de l’alcool, eut soudain conscience
de la fureur qui animait l’Écossais. De plus, il sentait qu’il n’avait pas
gagné la sympathie alentour, car les volontaires étaient plus enclins à ajouter
foi à l’opinion de Will Skeat qu’à la sienne.
    Il enroula sa cravache, cracha sur Robbie et s’éloigna d’un
pas incertain.
    Mais à présent, c’était le jeune Écossais qui souhaitait se
battre.
    — Dis, toi ! glapit-il pour l’arrêter.
    — Laisse, le stoppa Thomas, pas ce soir.
    — Il a fait jeter au feu trois hommes ?
    — Pas ce soir, répéta l’archer en repoussant son ami
d’un coup si rude qu’il l’assit sur les marches du monument.
    Robbie suivit des yeux l’Épouvantail qui battait en
retraite.
    — C’est un homme mort, proféra-t-il entre ses dents. Tu
m’entends, Thomas, ce misérable est un homme mort.
    — Nous sommes tous des hommes morts, intervint messire
Guillaume à voix basse.
    Car l’ennemi les attendait, véritable marée humaine.
    Et sir Thomas Dagworth se rapprochait de son piège.
    C’était John Hammond, un adjoint de sir Thomas Dagworth, qui
menait la feinte par la route de Lannion. Il était à la tête de soixante
hommes, d’autant de femmes, d’une douzaine de chariots et de trente chevaux,
qu’il utilisa pour faire un vacarme assourdissant lorsqu’ils furent en vue des
campements du duc Charles.
    Les contours des fortifications de terre étaient éclairés
par des brasiers, et des lueurs vacillantes apparaissaient entre les minces
fentes des poutres de la palissade. Le campement semblait illuminé par une
quantité de feux, et d’autres s’allumèrent encore quand la petite troupe de
Hammond commença à taper sur les pots et les chaudrons, à donner des coups de
bâton sur les arbres, à souffler dans les trompettes et à battre frénétiquement
le tambour. Pourtant, nulle panique ne sembla monter des remparts de terre.
Quelques soldats ennemis apparurent, scrutèrent quelque temps la route baignée
de lime où se détachaient les ombres du bruyant cortège, puis ils disparurent.
Hammond ordonna à ses gens de redoubler d’ardeur et ses six archers, les seuls
véritables soldats de cette pseudo-armée, s’approchèrent du camp pour décocher
des flèches par-dessus la palissade, mais il n’y eut toujours aucune riposte.
    Contrairement aux prévisions, rien ne bougea sur la rivière
dont les espions de sir Thomas avaient dit qu’elle était recouverte d’un pont
de barques. Visiblement, la feinte avait échoué.
    — Si nous restons ici, dit quelqu’un, ils vont nous
crucifier, ces maudits chiens.
    — Pour sûr ! approuva Hammond d’un ton véhément.
Il nous faut rebrousser chemin un peu, rien qu’un peu, et retourner par là où
il fait plus sombre.
    La nuit avait mal commencé avec l’échec de la feinte, mais
les hommes de sir Thomas, les véritables assaillants, avait fait plus de
progrès qu’ils ne l’espéraient.
    Ils arrivèrent en vue du flanc est du campement du duc
Charles peu après que le groupe de Hammond eut commencé sa bruyante diversion à
une lieue de là.
    Ils se tapirent à la lisière d’un bois et scrutèrent les
contours des forts les plus proches, par-delà le terrain dénudé. Pâle à la
lueur de la lune, la route courait, vide de toute présence, jusqu’à une grande
porte de bois où elle était avalée par le fort improvisé.
    Sir Thomas avait séparé ses hommes en deux divisions qui
attaqueraient chacune un côté de la porte de bois. Cette attaque n’aurait

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