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L'archer du Roi

L'archer du Roi

Titel: L'archer du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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contentant de regarder sans la voir la rivière plongée dans
l’obscurité. Puis il reprit :
    — Vous m’avez dit, n’est-ce pas, que le roi vous avait
dépêché en compagnie d’un chevalier et d’un chapelain de la maison royale ?
    — Oui, Monseigneur.
    — Et ils sont tombés malades à Londres ?
    — Oui, c’est vrai.
    — Un lieu malsain. J’y suis allé par deux fois, et deux
fois, c’est plus qu’assez ! Nocif ! Mes cochons sont logés à
meilleure enseigne ! Mais un chapelain royal, hein ? Sans doute
est-ce un garçon intelligent, pas un curé de campagne, hein ? Pas un
vilain quelconque qui sait prononcer une phrase ou deux en latin, mais un
personnage plein d’avenir, un garçon qui sera évêque avant longtemps s’il
survit à sa fièvre. Alors pourquoi le roi enverrait-il un tel personnage ?
    — C’est à lui qu’il faut le demander, Monseigneur.
    — Un chapelain royal, rien de moins… poursuivit lord
Outhwaite comme si Thomas était resté muet.
    Il se tut. Quelques étoiles se montrèrent çà et là entre les
nuages. Il leva la tête vers elles, puis soupira.
    — Un jour, reprit-il, il y a longtemps, en Flandre,
j’ai eu la chance de voir une fiole de cristal contenant du sang de
Notre-Seigneur, et ce sang se liquéfiait en réponse à la prière ! Il y a
une autre fiole dans le Gloucestershire, m’a-t-on dit, mais je ne l’ai point
vue. Une autre fois, j’ai caressé la barbe de saint Jérôme à Nantes. J’ai eu
entre les doigts un poil de la queue de l’ânesse de Balaam. J’ai baisé une
plume de l’aile de saint Gabriel et j’ai brandi le véritable os de mâchoire
avec lequel Samson trucida des Philistins à foison ! J’ai vu une sandale
de saint Paul, un ongle de Marie Madeleine et six fragments de la Vraie Croix,
dont l’un portait une tache de sang, exactement le même que celui que j’ai vu
en Flandre. J’ai entrevu les arêtes des poissons avec lesquels Notre-Seigneur a
nourri les cinq mille hommes, j’ai senti le tranchant de l’une des pointes de
flèche qui ont transpercé saint Sébastien et j’ai respiré une feuille du
pommier du jardin d’Eden. Dans ma propre chapelle, jeune homme, j’ai un morceau
de l’articulation de saint Thomas et une charnière de la boîte qui contenait
l’encens offert à l’Enfant Jésus. Cette charnière m’a coûté moult espèces
sonnantes et trébuchantes. Donc dites-moi, Thomas, quelle est la relique qui
pourrait être plus précieuse que toutes celles que j’ai vues et toutes celles
que j’espère voir encore dans les prestigieuses églises de la chrétienté ?
    Thomas ne répondit pas. Les yeux tournés vers les feux qui
illuminaient la crête où gisaient tant de morts, il pensa à Eléonore.
Était-elle déjà au ciel ? Ou était-elle condamnée à passer des milliers
d’années au purgatoire ? Cette perspective lui rappela qu’il devait faire
dire des messes pour le repos de son âme.
    — Vous ne dites rien, observa lord Outhwaite. Mais
dites-moi, jeune homme, croyez-vous que je possède réellement une charnière de
la boîte d’encens du Christ enfantelet ?
    — Je ne sais pas, Monseigneur.
    — Il m’arrive d’en douter, avoua le vieux lord avec
simplicité, mais ma femme a la foi. Et c’est ce qui compte : la foi. Celui
qui croit qu’un objet possède le pouvoir de Dieu voit ce pouvoir s’exercer pour
lui-même.
    Il redressa sa tête chenue, narines au vent, comme flairant
l’obscurité pour sentir la présence de ses ennemis.
    — Je crois que vous êtes à la recherche d’une chose
contenant le pouvoir de Dieu, une grande chose, et je crois que le diable
essaie de vous en empêcher, poursuivit-il. C’est Satan en personne qui fait
agir ses créatures pour vous contrarier. (Lord Outhwaite tourna un visage
inquiet vers son jeune interlocuteur.) Cet étrange prêtre et son ténébreux
valet sont les suppôts de Satan, et sir Geoffrey pareillement ! Cet être
est un diable, si jamais diable il devait y avoir !
    Il jeta un coup d’œil sur le parvis de la cathédrale où
s’étaient dissimulés l’Épouvantail et ses deux hommes de main, tandis qu’une
procession de moines encapuchonnés débouchait dans l’obscurité de la nuit.
    — Les œuvres de Satan sont maléfiques, reprit-il, et
vous devez les combattre. Avez-vous de quoi payer ?
    Après son discours sur le diable, la trivialité de cette
dernière question surprit Thomas.
    — De quoi payer,

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