L'archipel des hérétiques
volonté et le respect de ses voisins.
Comme bien d'autres villes dans les Provinces-Unies,
Haarlem abritait de nombreux étrangers. La population avait augmenté d'un tiers
depuis 1600, grâce à l'afflux des réfugiés qui avaient fui le sud de la
Hollande pendant la guerre avec l'Espagne. D'autres, parmi lesquels Jeronimus
et peut-être son épouse, étaient arrivés d'autres régions de la République,
avec leurs conceptions religieuses, leurs mœurs sociales, leurs statuts et
leurs biens. Parmi les quelque dix mille immigrés qui s'étaient installés dans
la ville, la plupart n'avaient ni famille ni amis vers qui se tourner, en cas
de difficultés, et il était essentiel de pouvoir compter sur l'aide du gebuurte, c'est-à-dire du voisinage.
Haarlem comptait alors presque cent communautés de
voisinage de ce type, et l'on n'en comptait pas moins de cinq à Grote
Houts-traat, où vivait Cornelisz. La réputation jouait un rôle prépondérant,
dans ces microsociétés. Sans une bonne renommée, il était impos-sible d'obtenir
le moindre crédit, et - du fait que la présence d'une maisonnée peu
recommandable tendait à discréditer tout le voisinage - tout manquement à
l'honneur devenait un sujet de préoccupation pour le gebuurte. C'est
dans ce contexte qu'il faut comprendre les efforts de Jeronimus et de Belijtgen
pour se laver du soupçon de syphilis. Voir Gabrielle Dorren, « Burgers en hun
besognes. Burgemeestersmemorialen en hun bruikbaarheid als bron voor
zeventiende-eeuws Haarlem », Jaarboeck Haarlem 1995 p. 58 ; idem, Het
Soet Vergaren : Haarlems Buurtleven in de Zeventiende Eeuw (Haarlem :
Arcadia, 1998), pp. 12-13, 16, 22-23, 27-29 ; idem, « Communities within
the community : aspects of neighbourhood in seventeenth century Haarlem », Urban History 25 (1998), pp. 178, 180-183.
30. Les conditions économiques dans la République
de Hollande des années 1620 : Israël, op. cit., pp. 478-479.
31. Loth Vogel : ONAH 99, fol. CLIXv. On ne
retrouve aucune mention de ce nom dans les registres de baptêmes, de mariages
ou d'enterrements de Haarlem. Cependant, l'historienne Gabrielle Dorren note
l'existence d'un Otto Vogel, négociant en maïs à Amsterdam, extrêmement riche,
qui s'était établi à Haarlem dans l'espoir de voir s'améliorer la santé fragile
de son épouse. Ce Vogel, qui se trouvait donc à Haarlem vers 1604, résista à
plusieurs tentatives de la part des dignitaires locaux qui le pressaient de
devenir un citoyen à part entière de sa ville d'adoption. Par la suite, Vogel
s'irrita de leur insistance au point de menacer de quitter la ville, en
emmenant son frère - dont le nom ne nous est pas parvenu, mais qui pourrait
bien avoir été ce Loth dont parle Cornelisz. « De Eer-zamen. Zeventiende-eeuws
burgerschap in Haarlem », in R. Aerts & H. te Velde (eds), De
Stijl van de Burger : Over Nederlandse Burgerlijke Cultuur vanaf de
Middeleeuwen (Kampen : Kok Agora, 1998), p. 70.
32. La disgrâce de la faillite : Schama, op. cit., 343-344 ; Geof-frey Cotterell, Amsterdam : the Life of a City (Farnborough : DC Heath, 1973), p. 118.
33. Le cas Heyltgen : Concernant la situation
de Belijtgen, voir le témoignage de Gooltgen Joostdr, 3 mai 1628 (ONAH 130 fol.
159) ; Aeffge Jansdr, Ytgen Hendricxdr, Grietgen Dircksdr et Wijntge
Abrahamsdr, 18 juin 1628 (ONAH 130 fol. 198) ; Maikcke Pietersdr Van den
Broecke, 6 juillet 1628 (ONAH 130 fol. 219 verso) ; Willem Willensz Brouwerius
(médecin de Cornelisz), 8 août 1628 (ONAH 99 fol. CXXXI) ; Aeltgen Govertsdr, 9
août (ONAH 99 fol. CXXXIV) ; et Aecht Jansdr & Ytgen Henricxdr, 11 août
1628 (ONAH 99 fol. CXXXIVv). Concernant Heyltgen, voir le témoignage de
Jannitge Pietersdr, Willem Willemsz, Griet-gen Woutersdr, Hester Ghijsbertsdr.
Jannitgen Joostsdr et Elsken Adamsdr, 27 juillet 1628 (ONAH 60 fol. 99) ;
Elsken Adamsdr, 11 août 1628 (ONAH 99 fol. CXXXVv).
34. Aert Dircxsz : ONAH 60 fol. 99. Interrogé
par une certaine Cornelia Jansdr sur Dircxsz, Heyltgen aurait répondu : « C'est
un sale chasseur de putes. » Dans le contexte du conflit, ce détail semble
suggérer que son ancien amoureux était atteint d'une maladie vénérienne.
35. La réponse de Heyltgen : ONAH 99, fol.
CXXXI ; ONAH 130, fol. 159.
36. « Elle déforma en les amplifiant... » : ONAH 99, fol. CXXXIV. Aeltgen Govertsdr, qui avait fait une déposition devant
le notaire Sonnebijl, à la demande de la nourrice, contesta par la suite
l'exactitude de la
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