Le bûcher de Montségur
la maison de sa parente Cavaers à Mongradail, Hugues et Sicart de Durfort allèrent chercher Guillaume Tournier et son compagnon. Les diacres Bernard Coldefi et Arnaud Guiraud résidaient à Montréal et à leurs réunions venaient : Raymond de Sanchas, Rateria femme de Maur de Montréal, Ermengaude de Rebenty, veuve de Pierre, Bérengère de Villacorbier, veuve de Bernard Hugues de Rebenty, Saurina veuve d’Isarn Garin de Montréal et sa sœur Dulcia, Guiraude de Montréal, Poncia Rigaude femme de Rigaud de Montréal… c’était en 1204 171 . » La déposition relate donc des faits vieux de plus de trente ans. D’ailleurs, mortes ou vivantes, les personnes convaincues d’avoir participé à une cérémonie hérétique, trente, quarante, voire cinquante ans plus tôt, devaient être punies ; les morts par l’exhumation et la confiscation des biens de leurs héritiers, les vivants par des peines canoniques ou par la prison.
On comprend la sensation d’écœurement, d’étouffement progressif qui devait envahir le peuple soumis à un régime pareil. D’autres époques devaient connaître, plus tard, le poids de terreurs policières analogues ; mais c’est à l’Inquisition dominicaine que revient l’honneur d’avoir inventé le système. La voie était tracée, les imitateurs ne manquèrent pas de la suivre, et de la perfectionner ; et il semble même qu’il ne leur restât plus grand-chose à trouver, à part des améliorations d’ordre purement technique.
Mais dans les premières années, la résistance fut âpre, quoique condamnée d’avance à l’échec, à cause de l’appui total que la papauté accorda jusqu’au bout à sa nouvelle arme de combat.
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160 G. Pelhisson, op. cit ., p. 95.
161 G. Pelhisson, op. cit ., p. 98.
162 G. Pelhisson, op. cit., p. 98.
163 Bernard Gui, Libellis de Ordine Praedicatorum , Recueil des Hist. des Gaules, t. XXI, pp. 736-737.
164 G. Pelhisson, op. cit ., p. 98
165 Idem.
166 G. Pelhisson, op. cit ., p. 98.
167 Registres de Grégoire IX, n° 3187.
168 Tel ce meunier de Belcaire qui était venu s’accuser du méfait suivant : des femmes en visite chez lui ayant souhaité à son moulin la protection de Dieu et de saint Martin, il leur avait répondu que c’était lui et non Dieu qui avait fabriqué le moulin et se chargerait de le faire bien marcher.
169 La bulle Ad exlirpanda , d’Innocent IV, en date du 15 mai 1252.
170 Bernard Gui, op. cit ., ch. I. § 5.
171 Doat, t. XXII, p. 142 ; t. XXIII, p. 165.
CHAPITRE XI
LA RÉSISTANCE CATHARE
I – ORGANISATION DE LA RÉSISTANCE
Les cathares désarmaient d’autant moins que la persécution leur fournissait les meilleurs arguments pour leur propagande : une preuve tangible, si l’on peut dire, du caractère diabolique de l’Église qu’ils combattaient.
D’ailleurs, ils ne croyaient pas leur cause perdue : les Églises de Bosnie, de Bulgarie, de Lombardie étaient puissantes et disputaient le terrain à l’Église de Rome, parfois victorieusement, comme c’était le cas des pays slaves. Ces Églises sœurs leur envoyaient des émissaires, des lettres d’encouragement, des secours. En 1243, en pleine bataille de Montségur, l’évêque cathare de Crémone enverra un messager à l’évêque Bertrand Marty pour l’assurer que son Église jouit d’une paix profonde et pour lui demander l’envoi à Crémone de deux parfaits. Ces pays où leur Église jouissait d’une paix profonde (qui n’allait pas toujours durer) pouvaient attirer, comme une Terre promise, beaucoup d’hérétiques et de croyants lassés par les persécutions ; beaucoup de cathares, dès les années 1230-1240, émigrèrent en Lombardie.
Les plus courageux, les plus combatifs restaient à leur poste, préférant risquer la mort et ne pas abandonner leurs fidèles. Ils organisaient leur vie clandestine en attendant des jours meilleurs. Si G. Pelhisson constate que les hérétiques faisaient, en ce temps-là, plus de mal que pendant la guerre, c’est que, très probablement, les parfaits étaient sortis de leur attitude sinon passive du moins pacifiste, et encourageaient et absolvaient les actes de violence. Cette religion qui répugnait à l’effusion de sang, et interdisait à ses ministres le meurtre d’un poulet ou d’une souris, avait, elle aussi, trouvé un biais pour justifier la violence : certains êtres étant, non des âmes déchues accomplissant leur pénitence, mais des
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