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Le calice des esprits

Le calice des esprits

Titel: Le calice des esprits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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damas écarlate
marchaient à nos côtés.
    Nous sortîmes par la Porte du Lion
et le cortège se dirigea vers Westminster. Dans les rues principales, ce
n'étaient que spectacles et tableaux vivants somptueux : roses et lys à
Gracechurch ; la reine vertueuse près de Cornhill. Dans Cheapside, un
chœur chantait les louanges d'Isabelle autour de la belle croix d'Éléonore
tandis que les clercs de la cité lui présentaient une escarcelle de mille marcs
d'or. Des érudits de St Paul tinrent de charmants discours dans lesquels ils
comparaient Isabelle aux femmes fortes et vertueuses de la Bible.
Partout — sur les balcons, aux fenêtres, sur le seuil des portes,
tous adornés de tissus, de draperies, d'étendards multicolores frappés de différentes
devises —, la foule bariolée béait d'admiration et poussait des clameurs.
    À Temple Bar, l'échevinage nous
fit ses adieux formels. Nous suivîmes la Voie royale jusque dans l'enceinte de
Westminster, une petite ville en soi avec ses manoirs, ses maisons de pierre et
ses chaumines. C'est là que vivaient des légions de charpentiers, de
tonneliers, de forgerons, d'étameurs, d'orfèvres, d'armuriers, de boulangers et
de bouchers, ainsi que ceux qui travaillaient dans les différents domaines de
la maison royale : office, dépense, réserve d'épices, de chandelles,
garde-robes et cuisines. Comme dans la cité, les rues et les demeures étaient
garnies de tentures cramoisies et écarlates. Le long des allées et des ruelles
sinueuses se donnaient d'autres spectacles, allégories et mystères montrant des
gentes damoiselles et des géants, des anges et des démons. Les tables sur
tréteaux craquaient sous le poids des mets et des fontaines jaillissait du vin
rouge et blanc. Nous pénétrâmes dans la cour intérieure du palais aux superbes
maisons brillantes sous le gel, avec leurs pignons à pans sculptés, leurs
façades de crépi et leurs vitraux, que surplombaient le palais et la silhouette
élancée de la chapelle St Stephen qui, à cette époque, n'était pas encore
achevée.
    Les appartements qui nous étaient
attribués se trouvaient près de la Chambre peinte dont la magnifique fresque
narrait l'histoire des Maccabées. Néanmoins, lors de notre arrivée ce matin-là,
parmi ce déploiement de vives couleurs et de bruit, sonneries de trompettes, de
cornes, bouquets de gonfalons et de pennons, un souvenir, presque une vision,
m'occupait l'esprit. On aurait dit que les morts, les assassinés, ces âmes
envoyées ad patres avant l'heure, m'entouraient et me parlaient à voix basse
pour prévenir mon cœur. Je me tenais sur le seuil de la petite salle. Sur le
sol carrelé, contre le mur, un escalier poli comme un miroir se perdait dans
l'ombre des hauteurs. Un vieux portier, un coffre sur l'épaule droite,
gravissait les marches avec peine et s'appuyait au mur de la main gauche pour
garder l'équilibre. Debout, là, sur le pas de la porte, je frissonnais de peur
comme si le Calice des Esprits avait déversé son contenu. Cette scène me
rappelait mon entrée chez messire de Vitry, l'huis se fermant derrière moi et
le serviteur gisant à moitié hors de la chambre, à droite. Le vieillard
continuait de monter tandis qu'une servante descendait en courant. J'embrassai
du regard les alcôves, recoins et coins. J'avais l'impression de voir ce que
l'assassin avait vu dans la maison de Vitry pendant ces quelques secondes avant
de frapper, pourtant, quelque chose m'échappait. Je me perdis dans mes pensées.
Demontaigu m'écarta et bondit dans l'escalier avec des documents dans un
portefeuille. Je le regardai s'éloigner.
    — Madame ?
    Rossaleti, une sacoche de cuir sur
les épaules, me contemplait avec curiosité et admirait ma robe dorée. Il
effleura le voile que je portais sur la tête.
    — Mathilde, vous êtes le
portrait de la belle damoiselle.
    Je sortis de ma rêverie et le remerciai.
    Casales s'approcha. Nous
attendîmes la princesse, puis montâmes à l'étage où Boudon et d'autres
officiers de la maisnie nous accueillirent. Une étrange soirée à la lueur des
chandelles s'ensuivit. Le chœur des bénédictins de Westminster entonna les
chants solennels de vêpres et de complies qui résonnèrent dans tout le palais.
Ce fut une soirée déconcertante, avec un repas pris à la hâte dans le bruit et
le bavardage des valets surexcités qui se préparaient pour le lendemain.
    Le grand jour se leva, clair et
beau. Aux cloches de l'abbaye répondirent

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