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Le calice des esprits

Le calice des esprits

Titel: Le calice des esprits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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l'occurrence, aurait dû faire son
examen de conscience, car son heure était proche, plutôt que d'étaler son
pouvoir. Il tendit une main semblable à une serre afin que nous baisions son
lourd anneau abbatial. Isabelle s'exécuta avec empressement, je fis de même,
puis nous nous installâmes pour échanger des civilités. Les questions affables
provoquèrent des réponses affables. Mais le vieux Sandewic mit fin à ce
cérémonial.
    — Madame, remarqua-t-il en se
penchant pardessus la table, on vous appellera sans aucun doute Isabelle la
Belle. Vous gagnerez le cœur de vos loyaux sujets par votre beauté et votre
grâce.
    Ma maîtresse rougit un peu et
inclina la tête en guise de remerciement.
    —  Mon seigneur *,
continua Sandewic en ignorant le regard offensé que lui lança Wenlock, a grande
hâte de vous rencontrer. Tout est prêt. Vos appartements à la Tour sont
propres, en ordre et tendus des plus belles tapisseries. Aucun luxe ne vous
manquera. À Westminster, après le récent incendie, ils ont été entièrement
rénovés. Dans les jardins, pelouses et treillis ont été refaits et les viviers
drainés et curés. Vous disposez même d'un embarcadère remis à neuf à Queen's
Bridge.
    Le vieux chevalier jeta un regard
radieux à ses compagnons, mais il ne cessait de porter la main à son
oreille : j'en déduisis qu'un catarrhe lui enflammait le nez et la gorge.
Ces maux ne diminuaient ni son enthousiasme ni la sincère admiration que
suscitait en lui la beauté d'Isabelle. Je me souvins de l'amour légendaire
entre Édouard I er et sa reine, Éléonore de Castille ; peut-être
Sandewic espérait-il que cela se produirait à nouveau.
    — À Douvres, reprit-il avec
brusquerie, mon seigneur * a fait préparer la nef royale, le Margaret
of Westminster , baptisée en l'honneur de votre noble tante. Elle a été,
ainsi que son escorte de bateaux et de barges, totalement restaurée. Elle
contient des garde-robes neuves et des dépenses aménagées pour votre confort.
    L'exaltation de notre
interlocuteur gagna Isabelle. L'atmosphère se détendit ; on servit vin et
douceurs. Baquelle et Wenlock adoptèrent alors le ton choisi par Sandewic. Le
marchand expliqua à quel point les Londoniens avaient envie de voir leur
nouvelle reine et Wenlock vanta les beautés de l'abbaye de Westminster où elle
serait couronnée. Isabelle les remercia gracieusement, pria qu'on l'excuse et
se retira pour se réjouir de la tournure inattendue des événements.
    Le roi apparaissait à présent dans
toute sa gloire. Édouard était à sa botte, sa fille serait reine d'Angleterre
et son petit-fils, trônant à Westminster, porterait la croix du Confesseur. La
liesse et l'allégresse de la Cour de France à la Noël nous grisaient. La messe
des anges fut célébrée à minuit ; celle de l'aurore et celle des bergers,
glorieuses cérémonies liturgiques où les prêtres avaient revêtu les chasubles
or et blanc des grandes fêtes, lui succédèrent. Le chœur royal chanta les
hymnes : Ego hodie genui te  — « Aujourd'hui je t'ai
engendré » — et Puer natus est nobis  — « Un
enfant nous est né ». L'air se chargea d'encens comme si une brume
parfumée était descendue du ciel et que la magnificence divine participait à
toutes nos réceptions, nos chants, nos danses, nos pantomimes et nos
festivités. Il était difficile de savoir si le souverain se réjouissait de la
Nativité ou de la future naissance de son petit-fils.
    Le soir de Noël, dans la salle des
Fleurs de lys, Philippe organisa un grand banquet. On avait dressé quatre
tables disposées en carré que protégeaient des écrans drapés de splendides
tapisseries évoquant la gloire des lys et les exploits des Capets. Philippe,
Marigny et Nogaret, Wenlock et Baquelle avaient pris place à la haute table. À
la deuxième, Casales et Rossaleti étaient les hôtes des trois princes. Je
remarquai que Louis me jetait des regards torves. La troisième table était
celle des clercs d'importance, des diplomates et des officiels. À la quatrième,
en face de son père, Isabelle, que j'accompagnais, accueillait Sandewic et les
principaux clercs de l'ambassade anglaise. Le festin fut délicieux : soupe
de chapon émincé liée au lait d'amande, servie avec des grenades et des fruits
confits, rôtis, chevreau à la crème, canards et poulets, écrevisses en gelée
suivies de fromentée. Les musiciens jouaient avec entrain et des chœurs de
petits garçons

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