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Le calice des esprits

Le calice des esprits

Titel: Le calice des esprits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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à la voix cristalline entonnaient des chants de Noël.
    Oh ! comme je me souviens
bien de cette soirée ! Le meurtre lui aussi se joignit à nous. J'étais
assise à côté de Sandewic et je compris vite qu'il n'était pas là seulement en
tant qu'émissaire ; pour le roi d'Angleterre, au moins, il devait
remplacer Pelet comme custos, gardien ou protecteur de la maison de la
princesse quand elle se rendrait à Boulogne. Sandewic commença à présenter ses
excuses pour ne point m'avoir offert de cadeau, puis il me tendit sa dague à la
belle lame incurvée et au manche d'ivoire. Je crus qu'il était ivre, mais il
insista et glissa la gaine or et rouge dans mes mains, les larmes aux yeux.
    — J'avais une fille,
autrefois, murmura-t-il. Vous avez ses yeux et ses manières.
    Puis il se détourna pour parler
avec l'un des clercs. Je voyais bien qu'il était triste. J'avais déjà échangé
des présents avec ma maîtresse ; elle m'avait donné une copie des adages
d'Hildegarde de Bingen avec le très célèbre, souligné d'or : O homme contemple
l'homme, car il a les deux, la terre et toutes les autres créations en lui. Il
ne fait qu'un avec eux et toutes choses sont cachées en lui . Moi, j'avais
remis à la princesse un anneau, largesse de mon oncle Réginald qu'elle admirait
beaucoup. Pendant le repas, je sirotai mon vin et regardai Philippe rendre
honneur au taciturne Wenlock de Westminster, me demandant ce que je pourrais
donner à Sandewic dont l'air sérieux et les façons affables me rappelaient tant
oncle Réginald. Je lui effleurai l'épaule ; il se retourna vers moi avec
un regard plein d'intérêt.
    — Je n'ai ni or ni argent,
rétorquai-je avec gaieté, en reprenant les mots de saint Pierre dans les Actes
des Apôtres, mais ce que je possède, je te le donne volontiers.
    — C'est-à-dire, demoiselle * ?
    — Messire, vous souffrez de
catarrhe, vous avez des douleurs dans les membres et votre tête est lourde et
engourdie.
    — Vous êtes fort savante,
Mathilde !
    — Assez savante, messire, pour
savoir que de l'huile chaude, de l'eau salée et une potion de verveine vous
soulageraient.
    Sandewic crut que je le taquinais,
mais quand je lui eus affirmé le contraire, il accepta mon aide et, comme le
font les vieillards, présenta ses excuses pour ce malaise manifeste. Cela ne
l'empêchait pas de faire montre d'astuce et d'intelligence. Goûtant avec
sobriété les différents vins, il décrivait sa Tour bien-aimée avec son grand
donjon aux quadruples enceintes, sa ceinture de murs et ses portails béants, quand
notre attention fut soudain attirée par le vacarme qui s'élevait à la table du
roi. Lord Wenlock semblait mal en point. Rejeté en arrière dans sa chaire, il
agrippait la table comme s'il était en proie à un fort vertige. Serviteurs et
valets l'entouraient. Sandewic se leva, suivi des clercs anglais. Isabelle me
lança un coup d'œil et me fit signe de l'accompagner. Je pensai d'abord que le
bénédictin avait trop bu. On l'emporta dans une petite salle de la chancellerie
et on l'étendit sur le parquet en lui glissant sous la tête, pour qu'il soit à
son aise, des coussins de brocart. Pourtant Wenlock semblait inconscient ;
il se tordait, se convulsait et maugréait contre le froid qui lui paralysait
les pieds et les jambes.
    On envoya en hâte quérir un physicien,
cependant l'état de Lord Wenlock empirait ; ses paroles devenaient
incompréhensibles ; il eut un haut-le-cœur, mais ne parvint même pas à
cracher dans le bol en érable placé sous ses lèvres. Il retomba, grommelant
d'une voix rauque. On ajouta d'autres coussins. Le râle de la mort résonnait
dans sa gorge. Sandewic s'agenouilla près de lui et tenta de le réconforter,
mais le père abbé, agitant la tête en tous sens, les yeux voilés par la
souffrance, la bouche grande ouverte en quête d'air, était incapable de
répondre. On appela un prêtre. Il chuchota les paroles de l'absolution sans
couvrir les bruits effroyables émis par le mourant. Wenlock eut un violent
sursaut, poussa un profond soupir, puis resta immobile, la tête inclinée de
côté.
    Je m'accroupis près de Sandewic,
feignant de le consoler tout en appuyant mes doigts sur la jambe, le ventre et
la main de l'abbé. Je sentis la dureté des muscles, comme si la rigor mortis avait déjà fait son œuvre. J'en savais davantage que tous ces médecins. J'avais
étudié les propriétés de tous les genres de ciguë, que ce soit du

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