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Le cercle de Dante

Le cercle de Dante

Titel: Le cercle de Dante Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matthew Pearl
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particulièrement proches mais, du jour où le pauvre homme avait tenté de s’empoisonner dans sa détresse d’avoir jeté l’opprobre sur sa famille, Holmes avait éprouvé pour lui une sympathie jusque-là inconnue : ce qui arrivait à son collègue aurait très bien pu lui arriver à lui. Et il avait décidé de tenir un rôle dans sa disculpation, mineur, certes, mais significatif, il en était convaincu.
    Et voilà qu’ils s’étaient retrouvés devant le gibet. Durant tous ces mois d’auditions et de pourvois en appel, ce jour leur avait paru si lointain, si peu probable : une éventualité qui ne se produirait pas mais qui était finalement arrivée. Le Boston élégant dans sa grande majorité était resté calfeutré chez soi, confit dans la honte d’avoir eu un meurtrier pour voisin. En revanche, dockers et contremaîtres, ouvriers et blanchisseuses n’avaient pas boudé leur plaisir. Un brahmane humilié et rabaissé, quelle aubaine !
    Forçant le cercle de spectateurs, un J. T. Fields en nage avait réussi à rejoindre le Dr Holmes.
    « Un fiacre nous attend, Wendell. Rentrez chez vous auprès d’Amelia. Prenez du repos avec vos enfants.
    — Vous ne voyez donc pas où nous en sommes arrivés ?
    — À une conclusion inévitable, Wendell », avait répondu Fields en posant les mains sur les épaules de son ami.
    La municipalité avait essayé de bloquer le secteur, mais le cordon de police n’avait pu contenir la foule. Tous les toits, toutes les fenêtres des maisons de Leverett Street qui donnaient sur la cour de la prison démontraient à l’envi le sentiment de la populace. En cet instant, Holmes avait éprouvé le besoin urgent de faire plus que regarder. Oui, il allait haranguer ses concitoyens, improviser un poème dans lequel il stigmatiserait la grande folie de la ville. Après tout, ne passait-il pas à Boston pour l’homme qui portait les toasts les plus remarquables ? Et tandis qu’il se dressait sur la pointe des pieds, un œil sur le gibet, l’autre sur la chaussée derrière Fields pour être le premier à repérer le porteur du décret de grâce, voire la victime supposée, George Parkman en personne, des vers magnifiant les vertus du Dr Webster avaient commencé à s’assembler dans sa tête.
    « Si Webster doit mourir aujourd’hui, avait-il dit à l’éditeur, ce ne sera pas sans que ses mérites aient été célébrés. »
    Et il s’était hâté vers la potence. À la vue du nœud coulant et du bourreau, il s’était immobilisé, le souffle court, suffoquant. Il ne s’était pas trouvé face à face avec cette corde depuis le jour où, petit garçon, il avait emmené son frère John assister à une exécution à Cambridge. Ils étaient arrivés au moment précis où le condamné chutait dans son ultime souffrance et c’était cette vision, pensait-il, qui avait décidé de sa double vocation de médecin et de poète.
    Le silence s’était propagé à travers la foule. Le condamné escaladait la plate-forme d’un pas vacillant, les bras tenus par un garde. En cet instant, les regards de Holmes et de Webster s’étaient croisés et le docteur avait eu un mouvement de recul. Une des filles de Webster s’était alors matérialisée devant lui, serrant une enveloppe contre sa poitrine.
    « Oh, Marianne ! s’était écrié Holmes en étreignant le petit ange contre son cœur. C’est le décret du gouverneur ? »
    Marianne Webster lui avait tendu la lettre à bout de bras.
    « Père voulait que vous la lisiez avant qu’il ne parte, docteur Holmes. »
    Holmes avait reporté les yeux vers le gibet. On finissait d’enfiler le capuchon noir sur la tête du condamné. Il avait décacheté l’enveloppe.
     
    Mon très cher Wendell,
    Comment pourrais-je avec de simples phrases vous exprimer ma gratitude ? Vous avez cru en moi sans l’ombre d’un doute dans votre esprit, et ce sentiment me soutient dans l’épreuve. Vous seul m’êtes resté fidèle depuis que la police m’a arraché à ma maison, quand tant de gens se sont écartés de moi, les uns après les autres. Imaginez l’émotion qui vous saisit lorsque des hommes de votre monde, en compagnie desquels vous avez soupé à table et prié à la chapelle, vous fixent, les yeux emplis d’une crainte terrible ; lorsque les regards de vos filles chéries révèlent involontairement leurs doutes sur l’honneur de leur pauvre papa.
    Pour toutes ces raisons, mon cher Holmes, je me sens obligé

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