Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Cercle du Phénix

Le Cercle du Phénix

Titel: Le Cercle du Phénix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Carolyn Grey
Vom Netzwerk:
argentée.
     
    *
     
    Gagnée par une anxiété croissante, Cassandra enfonça le
couteau contre le linteau de la fenêtre. Le carreau céda facilement, et elle
put glisser sa main à l’intérieur pour tourner la poignée et ouvrir la croisée.
D’une démarche féline, elle bondit alors du balcon balayé par les vents pour
s’introduire dans la tiédeur des appartements de la comtesse Killinton. Elle
n’avait quitté le manoir Jamiston que peu après minuit pour se rendre à
Grosvenor Square. Par un malheureux hasard, Andrew avait en effet précisément
choisi cette nuit pour rester dormir au manoir avec sa sœur. Il était évident qu’il
flairait un secret, et qu’il s’inquiétait pour Cassandra. Celle-ci détestait
lui mentir, mais dans son propre intérêt, il valait mieux le laisser en dehors
de cette affaire…
    Werner lui ayant fourni des indications très précises
sur la topographie des lieux, Cassandra n’eut guère de mal à se diriger à
travers les pièces. La résidence était plongée dans une torpeur ensommeillée
que nul bruit ne venait troubler, hormis le tic-tac d’une pendule de bronze sur
le manteau de la cheminée du boudoir. Les domestiques dormaient à poings
fermés, Lady Killinton devait être partie pour l’Espagne depuis deux jours, et
aucun homme de main du Cercle n’était en vue. La voie était donc libre.
    Avec précaution, Cassandra entra dans la chambre à
coucher où devait être dissimulé le carnet. Une entêtante odeur d’encens mêlé
d’opium flottait dans l’air. De dimensions respectables, la pièce était garnie
de meubles coûteux. Son décor était d’inspiration nettement orientale, comme en
témoignaient le vase Ming trônant sur la jardinière, les statuettes de jade et
les plats chinois de la famille verte posés sur les guéridons, ainsi que les
estampes japonaises accrochées à la tapisserie de velours grenat, de la même
couleur que le tissu garnissant le large lit à baldaquin.
    Cassandra s’approcha de la table de chevet sur laquelle
s’empilaient des dizaines de revues de mode. Elle feuilleta le premier de la
pile et le reposa presque aussitôt avec un léger soupir de mépris. Selon
Werner, le carnet devait se trouver dans un coffre situé au-dessus du
secrétaire de Lady Killinton, aussi contourna-t-elle le lit à la recherche du
meuble en question. Elle passa devant la coiffeuse dont le miroir à trois faces
reflétait la vaporeuse clarté lunaire et découvrit le secrétaire en cèdre niché
contre le mur du fond, sur le sous-main duquel était posé un exemplaire du Mariage du ciel et de l’enfer de William Blake ; Lady Killinton avait pour le
moins des lectures éclectiques. Le secrétaire était surmonté d’une gravure
encadrée qui devait dissimuler le coffre. Cassandra tendit la main vers le
cadre mais suspendit aussitôt son geste ; elle avait la désagréable
impression d’être observée. Elle engloba la chambre du regard et sursauta
violemment. Assises dans un fauteuil près de la fenêtre, graves et inquiétantes
dans la pénombre, deux poupées la fixaient de leurs yeux de verre. L’une était
blonde et vêtue d’une robe blanche cousue de perles ; la seconde était
habillée de rouge et sa chevelure brune sertie de rubis. Un frisson griffa le
dos de Cassandra. Elle secoua la tête, affligée par sa poltronnerie, et se
concentra sur le but de sa mission, sans parvenir toutefois à se défaire de la
sensation de malaise qui l’avait envahie.
    D’un geste rapide et précis, la jeune femme retira la
gravure du mur. Werner ne s’était pas trompé : le coffre se trouvait bien
là. Elle ne mit que quelques minutes à le forcer et à en extraire le carnet. Il
était tel que l’avait décrit Werner : relié de cuir brun et pourvu d’une
impressionnante serrure propre à décourager les regards indiscrets.
    Cassandra s’apprêtait à refaire le chemin en sens
inverse lorsqu’elle s’immobilisa, le cœur battant.
    C’était beaucoup trop facile.
    Ses membres se raidirent sous l’effet de la nervosité.
Tapie sous chaque parcelle de sa peau, la peur gagnait du terrain. Cassandra
secoua une nouvelle fois la tête, irritée par son manque de professionnalisme. Ce
n’était vraiment pas le moment de se laisser aller.
    D’un pas mal assuré, elle retourna dans le boudoir et
s’approcha de la fenêtre restée entrouverte. Un grand vase de Chine se dressait
sur une table sculptée près de là, empli de fleurs de serre

Weitere Kostenlose Bücher