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Le Chant de l'épée

Le Chant de l'épée

Titel: Le Chant de l'épée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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la
petite île qui en formait le rivage nord.
    — Elle s’appelle l’île des Deux Arbres, me
dit le pêcheur.
    — Il n’y en a qu’un, fis-je remarquer.
    — Du vivant de mon père, ils étaient deux,
seigneur.
    La marée qui commençait à remonter poussait
nos trois navires vers le camp ennemi.
    — Vire de bord ! ordonnai-je à Ralla,
qui parut soulagé. Mais auparavant remets les figures de proue en place !
    Les hommes de Sigefrid virent alors
réapparaître les têtes de dragon et d’aigle et durent se douter de quelque
chose, d’autant plus que nous virions de bord et que Ralla décrochait et
laissait dériver le petit navire marchand. Du haut de leur place forte, ils
durent voir se déployer au mât de l’ Aigle-des-Mers ma bannière à tête de
loup qu’avaient cousue Gisela et ses femmes. Et ils durent comprendre que j’avais
massacré l’équipage du navire.
    Puis nous repartîmes en ramant contre la marée.
Et une fois passée Caninga, nous laissâmes le puissant courant nous entraîner
vers Lundene.
    Et le navire marchand, la cale remplie de
cadavres ruisselants de sang et rongés par les mouettes, remonta la crique sur
la marée pour aller heurter le long vaisseau qui en barrait l’entrée.
    J’avais à présent trois navires de guerre, alors
que mon cousin en possédait quinze. Il les avait fait amarrer en amont où, pour
ce que j’en savais, ils pourrissaient. Si j’avais eu plus de dix navires et
assez d’hommes pour les équiper, j’aurais pu prendre Beamfleot, mais je n’en
avais que trois et la crique sous la forteresse était hérissée de mâts.
    Mais j’avais envoyé mon message : la mort
venait à Beamfleot.
    Elle visita d’abord
Hrofeceaster, une ville voisine de Lundene, sur la rive sud de l’estuaire de la
Temse, dans l’ancien royaume de Cent. Les Romains y avaient édifié un fort et
une cité de bonne taille avait grandi autour. Cent faisait depuis longtemps
partie du Wessex et Alfred avait ordonné que les défenses en soient renforcées,
ce qui avait été facile car les vieux murs de terre des Romains tenaient encore.
Il avait suffi de creuser un peu plus les fossés, d’élever une palissade de
chêne et d’abattre quelques constructions extérieures trop proches des remparts.
Et c’était une bonne chose, car, au début de cet été-là, une vaste flotte dane
vint de Franquie. Elle trouva refuge en Estanglie, puis fit voile au sud, remonta
la Temse à la marée et échoua ses navires sur la rivière Medwæg, l’affluent au
bord duquel se dresse Hrofeceaster. Les Vikings espéraient dévaster la ville, mais
les remparts et la garnison résistèrent.
    J’appris leur arrivée avant Alfred. J’envoyai
un messager l’en avertir et, le même jour, descendis la Temse sur l’ Aigle-des-Mers. Arrivé devant la Medwæg, je dus constater mon impuissance. Au moins
soixante navires étaient échoués sur la rive et deux autres à l’ancre en
barraient l’embouchure. Sur la rive, je vis les envahisseurs élever un talus de
terre : ils avaient l’intention d’enfermer Hrofeceaster dans leur enceinte.
    Leur chef était un certain Gunnkel Rodeson. J’appris
plus tard qu’il avait quitté la Franquie après une maigre saison et espérait
prendre le monastère et l’église de Hrofeceaster que l’on disait regorger d’argent.
Je repartis et, profitant d’un vent favorable, hissai la voile pour traverser l’estuaire.
J’espérais trouver Beamfleot déserte. Mais, si manifestement une grande partie
des navires et des équipages de Sigefrid avaient rejoint Gunnkel, il restait
seize vaisseaux et les murs de la forteresse étaient toujours hérissés de
lances.
    Nous retournâmes donc à Lundene.
    — Connais-tu Gunnkel ? me demanda
Gisela.
    — Jamais je n’en ai entendu parler.
    — Un nouvel ennemi ? sourit-elle.
    — Ils ne cessent de déferler du nord. Tues-en
un et deux autres surviennent.
    — Voilà une bonne raison de cesser de les
occire.
    Gisela n’allait jamais plus loin quand elle me
reprochait de massacrer son peuple.
    — J’ai prêté serment à Alfred.
    Le lendemain, au
réveil, la corne qui sonna m’apprit que de nouveaux navires franchissaient le
pont. C’était la corne de la sentinelle postée sur les murs du petit burh que
je bâtissais à l’extrémité sud du pont. Appelé Suthriganaweorc, ce qui
signifiait « défense du Sud », il était bâti et gardé par des hommes
de la fyrd du Suthrige. Quinze navires de

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