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Le Chant des sorcières tome 1

Le Chant des sorcières tome 1

Titel: Le Chant des sorcières tome 1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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balaya leur querelle d'un geste de la main avant de se tourner vers Marthe :
    — Hâte-toi.
    Marthe foudroya encore Algonde d'un regard terrible avant de dévaler l'escalier en relevant ses jupes.
    — Puis-je disposer, Votre Seigneurie ? demanda Algonde, espérant s'en tirer de même.
    — Envoie-moi ta mère, décida Sidonie en se détournant.
    Avant qu'Algonde ait pris la mesure de ce que cela pouvait sous-entendre, la porte s'était refermée sur elle. Sidonie avait rejoint Jacques.
    Algonde descendit les marches en traînant des souliers, le cœur lourd. À cause de sa sottise, on allait renvoyer sa mère, c'était sûr. Elle songea à retourner auprès de sa maîtresse pour s'accuser de mensonge, et supplier qu'on ne punisse pas l'intendante à sa place, mais elle n'en eut pas le courage. Cela n'aurait fait qu'aggraver son cas. Autant tout raconter à sa mère et lui demander pardon de son inconséquence, avant de faire son maigre bagage.
    Le visage rieur de Mathieu passa devant ses yeux humides, balayé par celui de Mélusine, et un rire aigri lui échappa : de toute évidence, la fée s'était méprise sur son compte.
    Elle haussa les épaules. Quelle importance désormais ? Lorsqu'elle parvint à la cuisine où elle savait trouver sa mère, elle se retrouva nez à nez avec Marthe qui en sortait, son message délivré au coursier.
    — Je finirai bien par t'écraser, lui souffla la chambrière, haineuse.
    Algonde s'offrit le luxe de la braver encore d'un rictus de défi, mais son regard dut trahir sa détresse car Marthe ajouta, perfide :
    — Mais peut-être est-ce déjà fait…
     
    Dans les cuisines du donjon, on s'activait en tous sens à la préparation du repas. Des odeurs de viandes rôties le disputaient au fumet des tourtes qui cuisaient sous la cendre. Sur un billot, une volaille tout juste plumée attendait qu'on vienne la fagoter pour la pendre au-dessus des braises, à côté de la potée qui y mijotait déjà. D'ordinaire, Algonde aimait à traîner dans cet endroit pour le seul plaisir des parfums qui s'y mélangeaient. Sa gourmandise y trouvait toujours quelque fond de crème que lui gardait maître Janisse.
    Elle le vit justement qui discutait avec sa mère à quelques pas du cavalier attablé devant sa pitance. Gersende, la mère d'Algonde, était ce qu'il convient d'appeler une maîtresse femme. Sévère mais juste, d'une honnêteté sans faille, attentive à chacun et de nature généreuse bien que disciplinée, elle était aussi grande qu'elle était ronde, et dépassait d'une tête le cuisinier auquel elle dictait ses ordres en les énumérant sur ses doigts boudinés. Gersende aurait pu se remarier à la mort accidentelle de son époux, mais elle avait préféré élever sa fille et se consacrer à son emploi d'intendante, jugeant que les hommes n'étaient bons qu'à faire des enfants et à tomber d'une toiture parce qu'ils avaient trop bu. Quand, comme son mari, ils ne levaient pas la main sur leur compagne ! De sorte qu'elle abordait ce jourd'hui la trentaine fière de son veuvage, mais plus encore de son métier et de sa fille dont chacun lui faisait éloge.
    Sachant à quel point son inconséquence allait coûter à la naturelle bonhomie de sa mère, Algonde s'avança vers elle, la mine sombre et le pas traînant.
    Ce fut maître Janisse qui l'aperçut le premier et l'accueillit comme à l'accoutumée :
    — Te voilà donc, ma bécaroïlle !
    Puis, se tournant vers Gersende :
    — Quand je vous le disais qu'elle ne tarderait plus. Il suffit que je tourne mes œufs au lait pour qu'elle montre son nez.
    Mais la bécaroïlle n'avait pas le cœur à rire. Comme le rouge-gorge dont on lui offrait le surnom, elle avait les ailes collées et se sentait bien incapable de les ouvrir pour s'envoler. Sa mère la couvrit d'un regard inquiet.
    — Es-tu malade ? s'inquiéta-t-elle aussitôt, comme Algonde les rejoignait enfin.
    — C'est vrai qu'elle a l'air chiffouillée, ajouta maître Janisse en frottant ses mains grasses sur son tablier.
    — Il faut que je vous parle, mère, se lança Algonde, la gorge serrée.
    — Cela ne peut-il attendre ? s'étonna Gersende.
    Algonde secoua la tête, le regard suppliant.
    Maître Janisse éclata alors d'un rire clair.
    — Allez-y donc, dame Gersende, chagrin d'amour empoisonne bien plus sûrement le ventre qu'une baie de laurier et on en meurt tout autant.
    Gersende pinça les lèvres. Elle connaissait trop sa fille pour s'en

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