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Le Chant des sorcières tome 1

Le Chant des sorcières tome 1

Titel: Le Chant des sorcières tome 1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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entré dans la rivière à son tour. Ils avaient fini en bagarre, chacun cherchant à couler l'autre pour reprendre l'avantage. Insouciants. Amoureux, sans le savoir encore.
    — Tu te souviens ? demanda-t-il, rattrapé sans doute lui aussi par la vision de leurs corps enlacés.
    De ce baiser qui les avait surpris, chaste, aussi pur que l'onde. Rien n'avait plus été pareil ensuite.
    Algonde hocha la tête, les yeux rivés sur le courant qu'une petite truite remontait.
    Entrecoupé des trilles d'un épervier qui tournoyait au-dessus des arbres de la forêt toute proche, un silence embarrassé s'installa entre eux. Mathieu finit par le rompre d'un soupir.
    — Elle est comment, la chambre de Mélusine ?
    — Banale, répondit Algonde.
    Elle aurait préféré aborder un autre sujet, mais n'en trouvait aucun.
    — Tu ne veux toujours pas me parler d'elle ?
    — Il n'y a rien à en dire, je t'assure. La chambre a été ouverte, j'ai nettoyé, Bastien le menuisier a réparé, et Bertille la couturière a décoré. Elle est prête pour accueillir la fille du baron.
    — On raconte que deux hommes se sont battus pour elle…
    — Qui te l'a dit ? s'étonna Algonde.
    Il haussa les épaules.
    — Tout se sait.
    Elle frissonna. Quelqu'un avait-il remarqué son manège auprès du baron ? Elle n'avait croisé personne. .
    — Tu te battrais pour moi ? demanda-t-elle.
    — Tu le sais bien. Mais il n'y a pas de raison, n'est-ce pas ?
    — Non.
    — Il ne t'a pas touchée ?
    Elle comprit qu'il parlait du baron. Elle affirma sa voix. Ne pas le regarder.
    — Non.
    — Essayé ?
    — Non.
    — Parce que moi à sa place…
    Elle se tourna vers lui.
    — Je préfère la tienne.
    Il sourit d'aise et gonfla le torse.
    — Tu as raison. Je suis beau, amusant, jeune…
    — … et je t'aime, le faucha Algonde que l'aveu étouffait.
    Il se tut. Leurs regards se mêlèrent.
    — Assez pour m'épouser ? Parce que jusqu'à maintenant tu…
    — … ne me l'as jamais vraiment demandé.
    — Et si je le faisais là ? Maintenant ? bredouilla-t-il en fouillant le limon de la rivière d'un bâton qu'il venait de ramasser sur le bas-côté, cherchant une contenance.
    — Essaie…
    — Tu ne vas pas te moquer ? s'inquiéta-t-il encore.
    Algonde le couvrit de tendresse. Il s'en détourna, hésita quelques minutes. Il cherchait ses mots. Les traçait en des formes imaginaires dans le lit du cours d'eau. Y égarait son orgueil malmené à d'autres reprises. Puis, brusquement, comme piqué au derrière par une mouche plate, il se dressa sur ses jambes, franchit les deux pas qui les séparaient, les joues rouges de son trouble, et, au lieu de s'agenouiller comme elle s'y attendait, la culbuta dans la rivière. Algonde battit des bras pour s'en garder, mais l'eau pénétra sa bouche et son nez, y ramenant des sensations familières. Elle n'eut pas le temps de réaliser qu'elle ne pouvait pas se noyer que Mathieu l'attirait dans ses bras. Ils se retrouvèrent à genoux, de l'eau jusqu'à la poitrine, dégoulinants et enlacés. Assoiffés.
    Leurs bouches se joignirent. S'explorèrent. Timidement tout d'abord. Fougueusement ensuite. Longuement. Lorsqu'il la laissa reprendre son souffle, elle sentit qu'un gardon lui chatouillait les orteils. Elle le chassa d'un mouvement discret du pied. C'est le moment que choisit Mathieu pour emprisonner ses joues dans ses mains et planter son regard dans le sien.
    — Veux-tu être ma femme, Algonde ?
    L'instant aurait dû être solennel. Elle éclata d'un rire nerveux. Pouvait-il savoir qu'elle venait de prendre conscience qu'il avait choisi pour sa demande cette rivière où leur amour aurait dû être englouti ? Comme un pied de nez à la prophétie ? Les bras du jouvenceau retombèrent. Son œil se fit noir. Blessé. Déjà, il s'apprêtait à la planter là. Elle le retint d'un geste de la main. D'un regard empli d'amour. D'une phrase.
    — À toi seul et à jamais.
    — Alors c'est oui ?
    — Oui, répéta Algonde en cherchant une nouvelle étreinte.
    Il referma ses bras sur elle.
    — Tu n'es vraiment pas possible, murmura-t-il. Avec toi, on sait jamais…
    — Mais quelle idée aussi, cette baignade, se plaignit Algonde. Je suis glacée.
    — Fallait que je t'embrasse. Avant. Pour être sûr. Mais avec toi, on sait jamais répéta-t-il, en l'aidant à regagner la rive.
    Ils se laissèrent tomber dans l'herbe sous le soleil déjà chaud qui perçait les frondaisons

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