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Le Chant des sorcières tome 2

Le Chant des sorcières tome 2

Titel: Le Chant des sorcières tome 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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de voir lequel d'entre vous passera après moi le premier.
    Ils s'élancèrent d'un même élan, soulevant dans leur impatience un nuage de poussière. Certaine que son frère l'avait fait exprès pour les incommoder, Philippine attendit que les particules en suspension soient retombées pour se tourner vers le groupe qui s'était comme elle spontanément protégé le nez d'un revers de manche. Seul le conducteur du chariot avait basculé son chapeau sur sa face qu'il avait jusque-là gardé baissée.
    — Pardonnez à mon frère, Gersende, il est comme un taon au cul d'un équidé. Il agace sans avoir les moyens d'envenimer, ne put s'empêcher de commenter Philippine, rancunière.
    Le rire tonitruant et spontané de maître Janisse s'envola.
    — Permettez que nous avancions, damoiselle. Il me faut voir Algonde. De toute urgence, insista Gersende en foudroyant son promis d'un regard qui lui coupa le sifflet.
    La gorge de Philippine se noua. Se pouvait-il que de loin, Gersende ait perçu à quel point sa fille était fatiguée ?
    — Elle n'est pas au mieux, Gersende. Pour autant que l'enfant soit sauf et en bonne santé malgré sa venue prématurée, à dire vrai, les relevailles d'Algonde ne se passent pas comme elles le devraient.
    Le cœur de Mathieu manqua un battement. Oubliant sa décision de ne pas saluer Philippine, il tomba le masque, pressé soudain de s'assurer de ce qu'il venait d'entendre.
    Philippine ne put masquer sa surprise devant sa face sévère que la cicatrice laissée par l'épervier barrait à l'œil droit.
    — Ai-je donc si vilaine allure ? se moqua-t-il aigrement avant de se tourner vers Gersende, l'air mauvais.
    — Vous saviez ? Pour l'enfant… Vous saviez ?
    Gersende hocha la tête. Debout sur le plateau arrière, Janisse se tordait les mains. Entre le bonheur de cette naissance et le désespoir de perdre sa bécaroïlle.
    — Branle ton chariot, imbécile, et hâtons-nous, répondit-il en place de tous en moulinant soudain des bras, comme s'il voulait donner des ailes à leur équipée.
    — Tu auras tout le temps des reproches, Mathieu. Plus tard. Pour l'heure le temps presse, ajouta Gersende avant de se tourner vers Philippine.
    — J'ai vu la sorcière de Sassenage, damoiselle. Vous savez sa prescience. Elle m'a confié le remède pour sauver ma fille.
    Le cœur de Philippine bondit dans sa poitrine. Libérer Algonde de la menace permanente de Philibert de Montoison… Était-ce possible ? Plus vite elle aurait une discussion avec Gersende, mieux cela serait. Or l'endroit ne s'y prêtait guère. Elle talonna son cheval, passa au-devant du bœuf et se retourna vers Mathieu qui avait repris sa place, le visage fermé. Il était là. Attiré par menterie, certes, mais il était là. Pouvait-elle changer le destin ?
    Le regard apaisant de Djem passa en sa mémoire. C'était au moment de prendre congé, quelques minutes seulement après qu'elle était remontée de la chapelle avec Philibert de Montoison. Profitant de ce que ce dernier glissait quelques mots à Louis, sans doute pour lui rendre compte de sa docilité, Djem l'avait invitée de la manière la plus anodine qui soit à admirer la vue depuis le bord du promontoire.
    — Soyez à la clairière. Demain. À l'aplomb du soleil, lui avait-il chuchoté, avant d'arrondir le bras pour la ramener vers son frère et les remercier tous deux de l'agréable moment de causerie qu'il avait passé.
    À l'instant d'enfourcher leurs chevaux, Louis s'était penché vers elle :
    — Je suis heureux que vous vous soyez enfin rangée à la raison. Soyez certaine que je veillerai à ce que vous ne changiez pas d'idée.
    — Aucun risque. Je sais à présent ce que vous et mon promis valez, lui avait répondu froidement Philippine.
    Ils n'avaient plus échangé d'autre mot durant le trajet.
    Ce jourd'hui, Philippine-Hélène de Sassenage comprenait ce qu'Algonde éprouvait. Elle ne se sentit plus le droit de l'en spolier davantage.
    — Elle t'attend, Mathieu. Ta fille t'attend, lui accorda-t-elle dans un sourire confiant avant de détourner la tête et d'avancer.

23
    Adossée aux oreillers, contre le ciel de lit, comme chaque fois que la bouche de petite Elora emprisonnait son téton, Algonde était émue. Elle caressa d'un doigt léger la menotte aux articulations si fluettes, émerveillée de la finesse des ongles. Instinctivement la main se referma sur son index et Algonde s'attendrit de la force avec laquelle elle oppressait

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