Le clan de l'ours des cavernes
l'entrée était complètement obstruée après une nuit o˘ le blizzard n'avait cessé de souffler avec violence. Terrorisée, elle se sentit prise au piège. Afin de savoir sous quelle épaisseur de neige elle se trouvait prisonnière, elle enfonça une longue branche dans le mur blanc et réussit à ménager une petite ouverture. La neige tombait toujours. Elle laissa la branche dans le trou, afin qu'il entre de l'air dans la faille et s'installa auprès du feu, mais elle ne fut pas longue à s'apercevoir qu'elle n'avait pas besoin d'entretenir son foyer pour avoir chaud, car la neige, enfermant de minuscules poches d'air, isolait parfaitement la grotte o˘ régnait une douce chaleur. Mais comme il lui fallait de l'eau, elle attisa néanmoins le feu pour faire fondre la neige.
Seule dans son antre éclairé par les maigres flammes, Ayla ne pouvait distinguer le jour de la nuit qu'à la faible lueur qui filtrait quand elle retirait la branche de son trou. Et, chaque fois que la lumière déclinait, elle prenait grand soin de tailler une nouvelle encoche dans le morceau de bois.
Réduite à une inaction totale, Ayla se perdait dans ses pensées, contemplant le feu d'un regard fixe. Les flammes dansaient, vivantes, et elle les regardait dévorer lentement une b˚che, jusqu'à ce que celleci ne soit plus qu'un tas de cendres. Est-ce qu'il existe un esprit du feu ? se demandait-elle. Et o˘ peut bien aller l'esprit du feu quand il meurt ? Creb dit qu'à la mort de quelqu'un, son esprit part dans l'autre monde. Serais-je dans cet autre monde ? Il ne m'a pas l'air différent de celui que je suis censée avoir quitté. L'unique différence, c'est que j'y suis terriblement seule. Après tout, peut-être que mon esprit est parti ailleurs ? Comment le saurais-je ? Mon esprit est avec Creb, Iza, Uba. J'ai été maudite, mais suis-je morte ?
Les jours se suivaient et se ressemblaient tous. Un soir, après avoir nourri son feu exigeant, Ayla décida de compter les entailles. Elle commença par placer tous ses doigts de la main droite sur chacune des encoches, puis ceux de la main gauche, à nouveau ceux de la main droite et ainsi de suite jusqu'à ce qu'elle les e˚t toutes recouvertes. C'est hier que mon ch‚timent a pris fin, constata-t-elle. Demain, je pourrai rentrer à
la caverne, mais comment faire avec toute cette neige ?
quand elle se réveilla le lendemain, elle se précipita pour vérifier le temps qu'il faisait dehors. Mais le blizzard soufflait toujours. Désespérée de ne pouvoir sortir, elle se laissa aller à de sombres pensées. Elle se demanda si Brun n'avait pas entre-temps aggravé sa peine, et ne l'avait pas condamnée à une malédiction éternelle. Se pourrait-il que je ne puisse pas revenir, même si la tempête s'arrêtait ? C'est alors que j'en mourrais pour de bon. Non, je ne pourrai jamais tenir plus d'une lune ici. Elle s'interrogea sur la sentence de Brun. Pourquoi l'avoir maudite pour la durée d'une lune seulement ? Pourquoi cette condamnation temporaire, peu courante dans le Peuple du Clan ? Je ne m'y attendais pas. Mais aurais-je pu revenir si c'était mon corps, et non mon totem, qui avait disparu dans le monde invisible ? De toute façon, rien ne me dit que mon esprit m'ait quittée. Mon totem m'a tout de même bien protégée jusqu'à maintenant. Ce que je sais, c'est que je n'aurais jamais eu une seule chance de m'en sortir sans cette malédiction temporaire.
Ayla comprit soudain que le désir de Brun avait été de lui donner une chance. Il m'est reconnaissant d'avoir sauvé la vie de Brac. Il devait me maudire, car c'est la loi du clan, mais il a tenu à me laisser une possibilité de revenir parmi eux. Aurais-je lutté comme je l'ai fait, si je n'avais eu cet espoir de retour ? Non, il est probable que je n'aurais pas chassé à la fronde pour manger, que je n'aurais eu ni faim ni soif ni envie de faire un pas de plus. C'est pour cela, pour cette chance de retrouver ceux que j'aime, que j'ai eu envie de vivre. Et puis, je suis s˚re que mon totem aussi était là pour m'aider.
Le lerdemain, Ayla mit un grand moment à se convaincre qu'elle était bien éveillée. Elle chercha à t‚tons la longue branche qui traversait la paroi glacée obstruant la grotte et poussa frénétiquement jusqu'au moment o˘ des paquets de neige se détachèrent, laissant apparaître un lambeau de ciel bleu.
Une bouffée d'air frais lui fouetta le visage. «a y est s'exclamat-elle. Il ne neige plus !
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