Le clan de l'ours des cavernes
position dans la communauté. Elles possédaient un savoir qui leur était propre. L'art de la chasse n'était pas inscrit dans leurs gènes. Pourquoi une femme lutterait-elle pour changer le cours naturel de son existence ?
Se rebeller contre l'ordre établi leur paraissait aussi absurde que de s'arrêter de manger ou de respirer. Si Brun n'avait été certain du sexe d'Ayla, le comportement de la fillette lui e˚t donné à penser qu'elle appartenait au sexe masculin. Pourtant elle avait remarquablement assimilé
le savoir-faire des femmes et révélait même certains dons de guérisseuse.
Néanmoins, Brun se retenait d'intervenir dans ce conflit o˘ il voyait enfin Broud lutter pour apprendre à conserver son sang-froid, qualité
indispensable à un futur chef. Broud était un chasseur courageux, et Brun se sentait fier de sa bravoure. S'il parvenait à se corriger de son principal défaut, il ferait un chef remarquable.
Ayla n'était pas pleinement consciente de toutes les tensions qu'elle provoquait. Cet été-là, elle se sentit plus heureuse qu'elle ne l'avait jamais été. Elle profita de sa nouvelle liberté pour aller à travers bois et ramasser des herbes ou bien s'entraîner à la fronde. Sans pouvoir se dérober totalement aux corvées qui lui incombaient, elle bénéficiait cependant du prétexte de rapporter des plantes à Iza pour s'échapper de la caverne aussi souvent que possible. La guérisseuse n'était pas encore remise de son pénible hiver, bien qu'elle touss‚t beaucoup moins avec les beaux jours revenus. Creb et elle s'inquiétaient au sujet d'Ayla. Iza redoutait que son comportement ne finisse par incommoder le clan et appelle à une sanction. Elle décida d'accompagner la fillette dans sa cueillette pour trouver l'occasion de lui parler.
- Uba, viens vite, maman est prête, dit Ayla en soulevant la petite fille et en l'installant sur sa hanche.
Elles descendirent la colline, traversèrent la rivière et continuèrent leur route à travers les bois en suivant une sente ouverte par un animal et élargie par le passage des hommes. Iza fit halte dans une prairie dégagée et, après avoir repéré les lieux, se dirigea vers une touffe de grandes fleurs jaune vif qui ressemblaient à des asters.
- Ce sont des aunées, Ayla, dit Iza. Elles poussent généralement dans les prés. Les feuilles sont ovales et pointues au bout, vert foncé par-dessus et vert clair en dessous, tu vois ?
Iza s'était agenouillée pour montrer une feuille à Ayla.
- Oui, je vois.
- C'est la racine qu'il faut utiliser. La plante se reproduit tous les ans, mais il vaut mieux la ramasser la seconde année, à la fin de l'été ou en automne, au moment o˘ la racine est lisse et ferme. Il faut la couper en petits morceaux, puis en faire réduire une poignée dans l'écuelle en os. Ce breuvage se boit froid, deux fois par jour. Il s'utilise contre la toux et plus particulièrement quand on crache du sang. Il fait aussi transpirer abondamment. (Iza s'était assise par terre pour extraire la racine avec le b‚ton à fouir, agitant rapidement les mains à mesure qu'elle s'expliquait.) On peut aussi faire sécher la racine et la moudre en poudre, ajouta-t-elle.
Puis elles se dirigèrent vers un petit monticule. Uba s'était endormie, rassurée par la chaude présence d'Ayla.
- Tu vois cette petite plante aux fleurs jaunes en forme d'entonnoir, mauves au centre ? demanda Iza, en montrant à Ayla une plante de trente centimètres environ.
- Celle-ci ?
- Oui, ce sont des jusquiames. Elles sont très utiles aux guérisseuses, mais il ne faut jamais en manger car elles sont vénéneuses.
- que faut-il utiliser ? La racine ?
- Les racines, les feuilles et les graines. Les feuilles sont plus grandes que les fleurs et poussent les unes après les autres de part et d'autre de la tige. Regarde bien, Ayla, les feuilles sont vert tendre et dentelées.
(La guérisseuse froissa une feuille entre ses doigts.) Sens, dit-elle à
Ayla, qui perçut une forte odeur de narcotique. Le parfum disparaÔt une fois les feuilles séchées. Dans quelque temps, il y aura beaucoup de petites graines marron. (Iza arracha une racine brune et rugueuse qui, une fois cassée, révéla une chair blanche.) Toutes les parties de la plante sont efficaces pour lutter contre la douleur. On peut les préparer en infusion ou bien en lotion à appliquer sur la peau. Elles calment les contractions musculaires, détendent, apaisent et favorisent le
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