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Le Crime De Paragon Walk

Le Crime De Paragon Walk

Titel: Le Crime De Paragon Walk Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Perry
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surpris la lueur de compréhension dans ses yeux. Pas étonnant que la pauvre Phoebe ne l’eût jamais considéré comme un violeur potentiel. Et maintenant que Charlotte savait elle aussi, il ne le lui pardonnerait pas jusqu’au tombeau.
    Elle s’éloigna à l’aveuglette, consumée par sa découverte. Les soieries retombaient mollement dans l’air immobile. Les peaux satinées étaient constellées de minuscules moucherons noirs. Il faisait de plus en plus chaud. Les conversations allaient bon train autour d’elle, mais elle n’entendait qu’un brouhaha.
    —    Vous prenez les choses trop à cœur. C’est stupide, certes, et pas très reluisant, mais il ne faut pas que ça vous affecte, ni vous ni votre sœur.
    C’était Paul Alaric qui lui tendait un verre de citronnade; il avait l’air soucieux, mais son œil pétillait comme toujours d’un humour caché.
    Elle se souvint du jardin d’hiver.
    —    Ça n’a rien à voir, dit-elle en secouant la tête. Je pensais à tout autre chose, quelque chose de réel.
    Il lui offrit la citronnade et, de sa main libre, chassa un moucheron qui allait se poser sur sa joue.
    Elle prit le verre et, se tournant légèrement, croisa le regard malveillant de Jessamyn Nash. Cette fois, elle sut presque par avance ce que c’était : rien de très compliqué, juste de la jalousie pure et simple parce que Paul Alaric l’avait touchée, parce qu’il se préoccupait d’elle et qu’il était sincère.
    Charlotte éprouva une envie irrépressible de fuir tout cela, la politesse qui masquait les rancœurs, le jardin étouffant, les bavardages futiles et les haines rentrées.
    —    Où est la tombe de Hallam Cayley ? demanda-t-elle à brûle-pourpoint.
    Alaric ouvrit des yeux étonnés.
    —    On l’a enterré dans le même cimetière que Fulbert et Fanny, à un quart d’heure d’ici. Ou, plus précisément, à l’extérieur... les suicidés n’ont pas droit à la terre consacrée.
    —    Je voudrais aller le voir. Croyez-vous qu’on va s’en apercevoir si je cueille quelques fleurs au portail en sortant?
    —    J’en doute. Pourquoi, ça vous gêne?
    —    Pas du tout.
    Charlotte lui sourit, reconnaissante qu’il se fût abstenu de commentaires évidents ou de critiques à son encontre.
    Elle ramassa quelques pâquerettes, quelques dahlias et trois ou quatre lupins à longue tige, déjà un peu flétris, mais encore colorés, et s’engagea dans la rue en direction de l’église. C’était moins loin qu’elle ne l’avait cru, mais la chaleur était proprement suffocante. Le ciel était bas et lourd, et l’air pullulait de petits insectes.
    Le cimetière était désert. Elle franchit le porche à l’abri des regards et suivit l’allée entre les sépultures avec leurs anges sculptés et leurs plaques commémoratives, jusqu’aux ifs et au-delà, dans l’espace réservé à ceux que l’on enterrait sans la bénédiction de l’Église. Sur la tombe toute fraîche de Hallam, la terre portait encore des traces de bouleversement.
    Charlotte la contempla pendant plusieurs minutes avant de déposer ses fleurs. Elle n’avait pas pensé à apporter un récipient, et il n’y avait rien de prévu à cet effet. Peut-être estimait-on que personne n’irait porter des fleurs à quelqu’un comme Hallam.
    Elle regardait la glaise sèche et dure, songeant à Paragon Walk, à la bêtise, aux souffrances inutiles et à la solitude.
    Plongée dans ses réflexions, elle entendit soudain des pas et leva la tête. Jessamyn Nash sortait de l’ombre des ifs, un bouquet de lis dans les bras. Reconnaissant Charlotte, elle hésita, les traits pin-cés, l’œil presque noir.
    — Que faites-vous ici ? demanda-t-elle tout doucement, se dirigeant vers Charlotte.
    Elle brandissait son bouquet, et Charlotte surprit l’éclair argenté d’une paire de ciseaux dans sa main.
    Sans savoir pourquoi, elle eut peur, comme si, surgie de l’atmosphère électrique, la foudre s’était abattue à ses pieds. Jessamyn s’arrêta en face d’elle, de l’autre côté de la tombe.
    Charlotte regarda ses fleurs.
    —    Je... j’étais juste venue apporter ceci.
    Jessamyn, qui avait suivi son regard, leva lentement un pied et les écrasa, pesant de tout son poids, jusqu’à les réduire en bouillie et les étaler sur la terre dure comme de la pierre. Puis elle dévisagea Charlotte et, calmement, laissa tomber ses lis au même endroit.
    Au-dessus d’elles,

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