Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Dernier Caton

Le Dernier Caton

Titel: Le Dernier Caton Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
Vom Netzwerk:
cuisines romaine et byzantine mais avaient su y ajouter le meilleur des plats arabes. Les épices, l’huile d’olive, le miel, le laurier, le yaourt, l’ail, le thym, le piment noir, le sésame et la cannelle faisaient toujours partie de leurs préparations.
    J’eus l’occasion de le vérifier. Du pain, de délicieuses aish ou miches faites avec des farines différentes, jusqu’aux gambari , les crevettes géantes qui me donnèrent envie de me lécher les doigts, tout le dîner était franchement excellent. Glauser-Röist paraissait plus qu’enchanté, même s’il ne nous crut pas une seule seconde quand nous prétendîmes avoir préparé ces merveilles culinaires. Boutros continua à nous raconter que pour lui les meilleurs plats étaient ceux avec de la viande, mais il n’y en avait aucun sur la table, à part le hamam, des pigeonneaux farcis de blé et cuits à feu doux. Néanmoins, dit-il, l’agneau était apprécié par les Égyptiens eux-mêmes et les étrangers.
    Glauser-Röist et Boutros accompagnèrent de bière leur repas. Boutros nous révéla que celle-ci avait été inventée en Égypte ancienne et qu’il n’y avait rien de meilleur que d’en boire un verre avant d’aller se coucher ; relaxant naturel, elle aidait à trouver le sommeil.
    Farag et moi prîmes seulement de l’eau minérale et du karkadé, une boisson rafraîchissante de couleur rouge faite à partir de la fleur d’hibiscus que les Égyptiens buvaient à toute heure du jour avec le shai nana, le thé noir à la forte saveur qu’ils accompagnaient de feuilles de menthe.
    Mais le pire, ce fut les desserts. Il n’y avait pas moyen de s’arrêter. Les Alexandrins, fidèles à leur héritage byzantin, étaient comme les Grecs de grands amateurs de pâtisseries. Farag avait commandé un assortiment digne d’un régiment affamé plutôt que de quatre personnes déjà rassasiées par un repas succulent : des om ali, au lait, noisettes, raisins secs et noix de coco, des konafa , pâte feuilletée au miel, baklava , pâte feuilletée avec sucre, pistache et noix de coco, et des ashura , ces gâteaux de blé pilé, de lait, fruits secs, raisins et eau de rose que les musulmans consomment le dixième jour du mois de Moharram, mais que Farag et son père mangeaient avec gloutonnerie à la première occasion. Glauser-Röist et moi échangeâmes des regards surpris devant l’extraordinaire capacité de la famille Boswell à consommer des gâteaux.
    — Tu ne crains pas le diabète, Farag, dis-je en riant.
    — Ni diabète, ni surpoids, ni hypertension artérielle, dit-il après avoir avalé une énorme bouchée de konafa. Oh ! cela m’a manqué !
    — Alexandrie a la triste réputation de pratiquer le péché de gourmandise, dit le capitaine.
    — Que dites-vous là ! s’exclama Boutros après avoir avalé sa baklava avec une gorgée de bière.
    — Ne t’inquiète pas, papa, le rassura Farag. Kaspar n’est pas devenu fou, c’est juste une de ses plaisanteries.
    Mais non, ce n’en était pas une. Moi aussi, je ne sais pas pourquoi, j’avais pensé au message des Caton sur cette ville et son péché.
    — Il me semble, dit le capitaine en changeant de sujet, que dans les pays arabes l’accès à Internet est restreint. C’est aussi le cas en Égypte ?
    Boutros plia méticuleusement sa serviette et la posa sur la table avant de répondre d’un air préoccupé :
    — C’est un sujet sérieux. Ici, en Égypte, nous ne subissons pas les mêmes restrictions qu’en Arabie Saoudite ou en Iran, pays qui filtrent l’accès de leurs citoyens à des milliers de pages de la Toile. L’Arabie Saoudite, par exemple, dispose d’un centre de haute technologie dans les environs de Riyad, d’où elle contrôle toutes les pages visitées par ses citoyens et bloque quotidiennement des centaines de nouvelles adresses jugées par le gouvernement comme allant contre la religion, la morale et la famille royale. Le pire, c’est en Irak et en Syrie, où Internet est complètement interdit.
    — Mais qu’est-ce que cela peut te faire à toi, papa ? Tu sais à peine utiliser un ordinateur, et en Égypte nous n’avons pas ces problèmes.
    — Un gouvernement ne peut pas espionner son peuple, mon fils. Ni agir comme un gardien de prison et restreindre l’opinion et la liberté de ses citoyens. Et une religion encore moins. L’Enfer dont nous parlent les livres n’est pas dans l’autre vie, Farag, il est déjà là, tout près.

Weitere Kostenlose Bücher