Le dernier templier

n’était pas une mauvaise chose dans mon milieu professionnel. Et surtout, je n’avais pas envie d’associer plus longtemps le nom de cet individu au mien.
    Loin de lui nuire, le nom de Chaykin l’avait largement aidée à obtenir son poste à l’institut Manoukian. Et c’était pour cela aussi qu’une découverte de cette envergure, découverte qui ne devrait rien à Oliver Chaykin ni au fait d’être sa fille, pouvait être le coup décisif qui lèverait tout doute dans son esprit comme dans celui des autres, et les convaincrait qu’elle avait bien un nom... et un prénom.
    À condition, bien sûr, qu’elle soit la seule à réussir.
    Ses paupières battirent. Elle était épuisée et avait besoin de dormir. Tous deux en avaient besoin.
    Après un moment de silence, elle dit simplement :
    — Merci.
    — Pour quoi ?
    — Pour tout.
    Elle se pencha et l’embrassa sur la joue avant de se rabattre contre son hublot. Dehors, les étoiles semblaient si proches qu’on aurait pu les toucher. Elles glissaient dans le ciel de plus en plus sombre. Tess descendit le store. Puis, fermant les yeux, elle se sentit partir.

54
    On était déjà au milieu de l’après-midi quand Tess et Reilly descendirent les marches de métal pour poser le pied sur le tarmac de l’aéroport de Dalaman. Ils se sentaient tous deux éreintés. Les quelques heures de sommeil qu’ils avaient réussi à s’octroyer au cours du vol transatlantique leur avaient fait du bien, mais ils auraient volontiers dormi un peu plus, dans un vrai lit, avant de poursuivre leur voyage. Seulement ils n’en avaient pas le temps. Pire, les trois heures de transit à l’aéroport d’Istanbul avaient encore aggravé leur fatigue. Ils avaient dû attendre le court vol de correspondance vers Dalaman, sur la côte sud, d’où ils comptaient entamer leur long voyage à l’intérieur des terres.
    Reilly avait passé une partie de son temps à Istanbul suspendu à son portable. Il avait d’abord mis Aparo au courant avant d’avoir une conversation animée avec Jansson. Celui-ci n’était toujours pas convaincu par la décision intempestive de son collaborateur, qui avait préféré accompagner Tess au lieu de la traîner de force à Fédéral Plaza. Le reste de son temps, il l’avait passé avec l’agent de liaison officiel local du Bureau, un homme répondant au nom de Vedat Ertugrul.
    Celui-ci s’était déplacé pour les rencontrer et faciliter l’entrée sur le territoire de Reilly, qui n’avait pas son passeport. Quelques jours plus tôt, Ertugrul s’était vu notifier l’arrivée potentielle de Vance dans cette partie du monde. Il avait confirmé à Reilly que, jusque-là, aucun des points d’entrée possibles en Turquie n’avait signalé quoi que ce soit. Puis il avait abordé la logistique et la mise en place des soutiens dont ils auraient besoin. Le FBI n’avait aucun agent permanent en poste en Turquie. Les plus proches se trouvaient à Athènes, où ils aidaient la police locale dans son enquête sur une récente affaire d’attentat à la voiture piégée. Les relations avec le gouvernement turc étaient tendues, à cause des problèmes suscités par l’intervention en Irak qui traînait en longueur. Ertugrul avait assuré à Reilly que, au besoin, il pouvait s’arranger pour qu’une escorte de la police les rejoigne à Dalaman. Reilly avait décliné l’offre, préférant ne pas avoir à gérer des problèmes de barrière linguistique et de bureaucratie locale. Il avait simplement demandé à Ertugrul de s’assurer que la police soit bien informée de leur présence dans le secteur. Il resterait en contact étroit et demanderait des renforts si nécessaire, tout en soupçonnant qu’il aurait à se débrouiller seul.
    Reilly avait aussi utilisé l’escale pour se procurer des vêtements plus appropriés et un petit sac à dos. Dans ce dernier, il avait rangé la tenue qu’il avait sur lui en partant et les papiers qu’Ertugrul lui avait obtenus en lieu et place de son passeport. Le Turc lui avait aussi confié un téléphone satellite Iridium, qui, via la station EMSS du Département de la Défense à Hawaii, permettrait à Reilly de rester en liaison avec le monde depuis quasiment n’importe quel point de la planète.
    Dans le sac, il y avait aussi son browning Hi-Power, pour lequel Ertugrul avait aussi gracieusement fourni des cartouches et des chargeurs supplémentaires.
    Tess avait profité de l’attente pour