Le discours d’un roi
journaliste du North-Eastern Daily Gazette aboutit à la même conclusion le mois suivant, après un discours prononcé par le duc lors d’un autre événement organisé pour l’hôpital, au Savoy cette fois. « L’un dans l’autre, je me demande si ses discours ne sont pas aussi bons que ceux du prince de Galles. Et ce n’est pas peu dire. Le duc a appris les deux plus grandes leçons d’un orateur : le mot d’esprit, et la brièveté. À ce dîner, il a osé une comparaison assez intéressante : il espérait que les intervenants suivants auraient l’effet d’une plumeuse électrique qu’il avait vue récemment à une foire agricole : cet appareil dépouillait un poulet de toutes ses possessions extérieures en un rien de temps. »
En octobre, l’ Evening News broda sur le même thème : « Le duc d’York est de plus en plus à l’aise en public. Il est visiblement plus sûr de lui qu’il y a deux ans, et même qu’il y a quelques mois. Un entraînement continu se remarque lorsqu’on prend la parole en public. » Le Daily Sketch était impressionné par le fait que le duc se libérait « de plus en plus de ce défaut d’élocution qui avait jusqu’ici empêché d’apprécier à sa juste valeur son vrai don pour les phrases finies et pertinentes ». En écoutant la « musique » présente dans la voix du duc lors d’un discours donné au Stationer’s Hall, un journaliste du Yorkshire Evening News , qui avait l’imagination plus fertile, se rappela d’autres exemples de grands orateurs ayant dû surmonter des difficultés similaires : « J’ai pensé à Démosthène et à sa victoire sur ses lèvres hésitantes ; à la conquête personnelle de M. Churchill ; à M. Disraeli, dont la première allocution avait été une humiliation ; à M. Clynes, qui, lorsqu’il était adolescent, se rendait dans une carrière pour s’entraîner à l’art du discours 50 . »
Tandis que les journalistes prenaient note des progrès d’élocution du duc, la façon dont il s’y était pris (et le rôle joué par Logue) demeurait un mystère pour ceux qui l’écoutaient parler, ce qui ne manquait pas d’amuser son enseignant. Dans un autre article de l’époque, intitulé « Comment le duc d’York s’est entraîné tout seul à bien parler », Logue a souligné les mots « s’est entraîné tout seul ». Dans un bref article du 28 novembre 1928, le Star attribua à l’écuyer du duc, le commandant Louis Greig, la victoire de Bertie sur sa « vieille difficulté à s’exprimer » ; Greig était devenu un ami intime dès leur première rencontre, près de deux décennies plus tôt, alors qu’il était assistant du médecin militaire à l’école navale d’Osborne.
Cependant, compte tenu du nombre de visites rendues par le duc à Harley Street et de la fréquente présence de Logue à ses côtés, ce ne serait qu’une question de temps avant que le secret ne soit dévoilé. Le 2 octobre 1928, Logue reçut une lettre de la part de Kendall Foss, correspondant au bureau londonien de l’United Press Associations, l’agence de presse américaine.
Cher monsieur, commençait Foss, écrivant du bureau de l’agence sur Temple Avenue, à l’est de Londres,
Je crois savoir que vous êtes en possession des faits concernant la guérison du défaut d’élocution du duc d’York.
Si diverses informations circulent à ce sujet à Fleet Street, j’aimerais, naturellement, connaître la vérité avant de l’imprimer.
Par respect envers Sa Majesté, je vous écris pour prendre rendez-vous, dans l’espoir que vous aurez la bonté de nous communiquer les faits afin de publier un article exclusif aux États-Unis.
Dans l’attente d’une réponse favorable de votre part,
Kendal Foss, pour l’ United Press .
Logue semble avoir appelé Hodgson pour lui demander son avis, mais on lui aurait répondu qu’il était « en vacances, perdu quelque part sur le continent ». Au cours des jours suivants, Foss passa quelques coups de fil à Harley Street ainsi qu’à Bolton Gardens. Le 10 octobre, Logue, exaspéré, lui écrivit une lettre : « Tout en vous remerciant pour votre courtoise missive du 2 octobre, il m’est tout à fait impossible de vous fournir des renseignements à ce sujet. »
Sans se laisser décourager pour autant, Foss poursuivit ses recherches. Son article finit par paraître le 1 er décembre 1928, en première page du Pittsburgh Press et dans un certain
Weitere Kostenlose Bücher