Le Druidisme
simple. Les
Tuatha Dé Danann sont non seulement les experts en religion, en sagesse, en
magie, mais aussi en science. Or, qui dit science, dit technique. C’est
d’autant plus vrai chez un peuple qui a toujours refusé la dichotomie entre le
sacré et le profane et qui a tout mis en œuvre pour glorifier le travail manuel
(ce qui a d’ailleurs été une des raisons de leur facile conversion au
Christianisme). Les Dieux des Tuatha Dé Danann apparaissent non seulement comme
de brillants guerriers, mais surtout comme des spécialistes de toutes les
techniques, médecine, charpente, métallurgie, etc. Et le plus grand d’entre
eux, le dieu Lug, se présente comme « sachant tout faire ». Il est le
« Multiple Artisan ». Les Tuatha Dé Danann viennent donc couronner
l’édifice : eux seuls peuvent permettre la mise en œuvre du plan divin.
Ils sont les dieux incarnés. Les fils de Mile peuvent maintenant occuper le
terrain.
Mais il y a plus : à eux seuls, les Tuatha Dé Danann
représentent la totalité de la société indo-européenne, son idéalisation,
c’est-à-dire, dans l’esprit de la tradition druidique, le modèle divin que les hommes doivent appliquer . Et
ce ne sont pas des mythologues ou des sociologues contemporains qui le disent.
C’est Geoffrey Keating, l’auteur de la si précieuse Histoire
de l’Irlande . Keating décompose en effet les trois termes du nom des
Tuatha (est-ce de son propre chef ou transmet-il une tradition plus
ancienne ? nous ne le savons pas). Cela donne trois catégories : Tuatha , les nobles, Dé ,
les druides, la classe sacerdotale, Dana , les
artisans. Les étymologies sont justes : les Tuatha sont évidemment l’affaire des guerriers nobles ; les dieux étant tous
druides, les druides sont également des dieux ; le peuple des artisans
constitue une classe qu’on appelle aes dana . Tout
est dit de la façon la plus simple.
Et, bien entendu, l’accent est mis sur le druidisme incarné
essentiellement par les Tuatha Dé Danann. Il est peut-être alors inutile de
chercher l’origine du druidisme ailleurs que chez les Celtes eux-mêmes. Et
pourquoi ne pas faire confiance à César quand il affirme que la doctrine
druidique a été élaborée dans l’île de Bretagne, et que, de là, elle a été
répandue en Gaule, et bien entendu dans les autres pays celtiques ?
2) LES DIEUX ET LES HOMMES
Toute religion a son système de référence absolue, en
l’occurrence une ou plusieurs divinités dont la personnalité, la fonction et le
comportement sont exemplaires. Il n’est pas question ici d’essayer de savoir si
ce ou ces dieux sont des entités réelles, extérieures au monde humain,
régissant ou conseillant les êtres vivants selon un plan prévu à l’avance et
une finalité précise, ou s’ils sont simplement des projections idéalisées de
l’esprit humain tourmenté par le désir de parfaire le monde en justifiant sa propre existence. Dans ce genre de débat, le thème du
pari de Pascal est toujours d’actualité, et quelle que soit la solution
choisie, on ne peut que constater, dans le temps et dans l’espace, la présence
de divinités auxquelles des êtres humains ont cru, et avec lesquelles ils ont
établi réellement ou symboliquement des rapports d’interdépendance, notamment
sous forme d’actes cultuels. De la même façon, on ne peut que constater qu’il
existe des récits qui mettent en scène ces divinités et les font se comporter
en une série d’actes significatifs, récits que, faute de mieux, on qualifiera
de « mythologiques ». Ce sont ces divinités qu’il convient d’examiner
à travers ce que nous en présentent l’histoire, l’archéologie et la tradition.
Comme les autres religions, le druidisme a eu ses dieux, encore
qu’il faille souvent s’interroger sur la signification réelle que donnaient les
druides à ce terme : dieux personnalisés ou fonctions spécialisées de la
divinité. Mais c’est un autre problème. Nous connaissons ces dieux par des témoignages
d’auteurs anciens, par des inscriptions votives ou funéraires, des
représentations plastiques, et surtout, à une époque plus tardive, par les
récits épiques irlandais et gallois qui nous en donnent une image plus fournie
encore qu’altérée puisque héroïsée. Cela ne facilite pas le repérage exact.
« Les divinités gauloises sont souvent restées à peine plus personnalisées
que les numina , ces forces mystérieuses
auxquelles on
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