Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Druidisme

Le Druidisme

Titel: Le Druidisme Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
Vom Netzwerk:
moments, dont deux sont particulièrement important, Samain et Beltaine .
Et comme ces fêtes concernent et rassemblent un nombre considérable
d’individus, on peut dire, une fois de plus, que le druidisme est une religion sociale . L’attitude individuelle n’y a
aucun sens si elle n’est pas intégrée à l’activité du groupe. Cela ne veut pas
dire que chaque individu n’avait pas d’autonomie : au contraire, il semble
que le druidisme ait privilégié la notion de Libre-Arbitre. Mais c’est une
question de justification : l’activité individuelle n’a aucune
signification et est donc injustifiable si elle n’entre pas dans le cadre de la
société tout entière, cette société étant – c’est du moins le but exprimé – la
réalisation de la société divine. Les fêtes, comme les rites, sont l’affaire de
tous. Ceux qui n’y participent pas s’excluent d’eux-mêmes de la communauté. Et
si, pour une raison ou pour une autre, une fête n’est pas célébrée (cela a dû
être très rare), l’équilibre de la société, et donc du monde, est menacé. Car
les fêtes, comme les rites, sont des opérations de type magique ou religieux
(ou les deux) qui établissent des rapports d’harmonie entre les êtres et les choses,
entre les humains et les dieux, entre les forces visibles et les forces
invisibles.
    D’où la nécessité d’une liturgie organisée, hiérarchisée, et
conçue comme étant la projection, à l’échelle humaine, de ce qui se passe sur
le plan cosmique.

6) LA PUISSANCE DE LA PAROLE
    La civilisation celtique est de caractère oral. Les druides,
en effet, estiment que « la religion ne permet pas de confier à l’écriture
la matière de leur enseignement » (César, VI, 14). Mais on n’a jamais dit
qu’ils ne savaient pas écrire. César ajoute d’ailleurs : « pour le
reste, en général, pour les comptes publics et privés, ils se servent de
l’alphabet grec ». Et, en Irlande, les druides ont utilisé l’écriture
ogamique sur le bois et sur la pierre, comme l’affirment les auteurs de nombreux
récits. Mais les récits eux-mêmes n’étaient pas écrits, parce qu’ils transmettaient
la doctrine. Était-ce par souci de développer la mémoire, ou par souci de ne
point divulguer la doctrine, comme le pense César ? Certainement pour ces
deux raisons, et pour une troisième : la tradition orale est une tradition
vivante, qui, transmise de génération en génération, se modifie et évolue constamment
en fonction de ce qu’on éprouve de nouveau. C’est un type de culture vivant,
par opposition à l’écrit qui fige nécessairement les choses et les fixe d’une
façon immuable. En un sens, une civilisation de l’oralité est plus souple, plus
libre, plus susceptible d’innovation, qu’une civilisation de l’écriture.
    Cela n’empêchait pas les druides de se servir de l’écriture
quand ils en avaient besoin, pour les rapports avec les autres peuples
notamment, mais aussi dans des cas particuliers, quand il s’agissait
précisément d’agir sur l’éternité . L’écriture
avait alors un rôle magique, inquiétant : on pouvait prononcer une
invocation, une malédiction, une exécration, toutes sortes de
« satires » contre un individu, il était toujours possible, par la
suite, de lever le sortilège, c’est-à-dire de prononcer d’autres invocations
qui neutralisaient la première. Mais si l’on écrivait l’exécration, par
exemple, celle-ci prenait un caractère absolu et perpétuel. Écrire une
malédiction contre quelqu’un sur une branche d’if ou de coudrier constituait
alors un acte très grave, en somme tout à fait irréversible. On comprend alors
bien mieux l’interdit jeté sur l’écriture. Écrire devait être un acte rare, et
de plus, comme il pouvait constituer un danger, il ne fallait pas en répandre
l’usage chez ceux qui auraient pu s’en servir n’importe comment.
    Cela dit, c’est quand même la Parole qui importe le plus. Le
redoutable interdit connu sous le nom de geis a un nom significatif : geis est de même
racine que le mot guth , « voix ». Et
l’on retrouve cette racine dans le nom d’un Gaulois, prêtre spécialisé, le gutuater , c’est-à-dire « Père de la Voix »,
ou « qui incante par la voix ». Georges Dumézil émet l’hypothèse que
lorsque les apprentis-druides apprenaient tant de vers par cœur, ils ne
chargeaient pas leur mémoire de l’ensemble d’un récit, mais

Weitere Kostenlose Bücher